Préparer votre retraite avec le plan d’épargne retraite individuel (PERin)
THÉMATIQUE DE CET ARTICLE
Pourquoi le nouveau dispositif PER individuel est intéressant pour préparer sa retraite ? Comment se compare-t-il avec l’assurance-vie ?
Le sujet de la réforme des retraites revient régulièrement sur le devant de la scène. Avec une question centrale : comment assurer le financement des retraites dans les années à venir ? Le ratio entre le nombre de cotisants et le nombre de retraités ne cesse de décroître (il est actuellement de 1,5 actif pour 1 retraité), ce qui fragilise la pérennité du modèle de retraite par répartition. Pour régler le problème, il n'existe pas de solution évidente satisfaisant tout le monde, il faudra soit allonger la durée de cotisation (cela passe notamment par un recul de l'âge légal de départ en retraite), soit diminuer les pensions, soit alourdir le poids des cotisations supportées par les actifs. Cette dernière solution sera vraisemblablement exclue car les salaires supportent déjà des prélèvements relativement élevés.
Les retraités et futurs retraités ont peu d'espoir à attendre en matière de revalorisation des pensions. Au cours des dernières années, on constate d'ailleurs que l'inflation a progressé plus vite que le niveau des pensions. Sans que cela ne soit explicitement formulé et assumé par les responsables politiques à la barre du pays, il semble que la solution au problème du financement des retraites passera notamment par une individualisation de son financement, avec le développement de la retraite par capitalisation. Il faut donc s'attendre à préparer soi-même sa retraite.
Le modèle de retraite par capitalisation existe dans de nombreux pays. Souvent, le modèle de financement des retraites est une fusée à deux étages avec une retraite par répartition et un deuxième étage via une retraite par capitalisation. C'est le cas en Allemagne et en Suède (pour ne prendre le cas que de ces deux pays socialement proches de la France).
Du côté de l'hexagone, de nombreux dispositifs d'épargne retraite sont déjà en place, mais le gouvernement a récemment remis à plat ces dispositifs, avec deux grands objectifs : rendre l'épargne retraite individuelle plus simple et plus attractive.
Dans le cadre de la loi PACTE (plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises ), le gouvernement a lancé fin 2019 un nouveau dispositif d'épargne retraite, sobrement intitulé plan d'épargne retraite (PER). Ce dispositif se décline sous différentes formes, dont certaines sont dédiées aux salariés d'entreprise (PER entreprise), remplaçant d'anciens dispositifs (article 83, PERCO, PERP, Madelin...) Dans sa forme accessible à tous, le PER prend le nom de PER individuel (PERin). Il s'adresse à l'ensemble des actifs : travailleurs salariés, non salariés, indépendants, professions libérales...
Le principe du PER individuel est relativement simple. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un dispositif d'épargne spécifiquement pensé pour préparer sa retraite. Ainsi, l'épargnant réalise des versements sur son PER tout au long de sa vie active, et il pourra consommer l'épargne accumulée sur le contrat au moment de sa retraite.
Avec ce nouveau PER, le gouvernement a fait mouche, l'ensemble des acteurs de l'épargne et de l'investissement confirme l'enthousiasme des épargnants pour ce nouveau dispositif. On compte déjà plusieurs centaines de milliers de nouveaux contrats ouverts.
Le PER individuel gagne en lisibilité et présente quelques avantages nouveaux par rapport au dispositif qu'il remplace : le PERP (plan d'épargne retraite populaire).
La suite de cet article brosse un portrait à grands traits des caractéristiques, des avantages et des limites du PER individuel. Nous aurons notamment l'occasion de revenir sur les atouts du PER vis-à-vis de l'assurance vie, un des placements financiers préférés des Français.
Plan d'épargne retraite : une fiscalité très incitative
En matière d'épargne, les Français ont la possibilité de se tourner vers l'assurance vie, laquelle dispose de solides atouts pour se constituer une épargne (pour sa retraite ou tout autre objectif), en particulier d'une fiscalité très attractive. Alors y a-t-il un intérêt à se tourner vers le plan d'épargne retraite ?La réponse à cette question dépendra comme souvent de la situation personnelle de chacun, mais il est admis, calcul à l'appui, que le PER présente un réel intérêt. Il se révèle même plus intéressant que l'assurance vie pour peu que les projets financiers et la situation fiscale de l'épargnant collent avec la philosophie de ce dispositif.
Un des atouts majeurs du PER tient à sa fiscalité. En effet, les versements réalisés sur le PER sont déductibles du revenu imposable, ce qui permet incidemment de diminuer son imposition au titre de l'impôt sur le revenu (IR).
Les déductions sont toutefois plafonnées. Les versements sont déductibles :
- dans la limite de 10 % du revenu imposable de l'année N-1 (avec un plafond des déductions à 32 909 euros),
- ou 10 % du PASS (plafond annuel de la sécurité sociale) de l'année N-1.
Le chiffre le plus élevé des deux est retenu pour définir le plafond des versements déductibles. À titre indicatif, le PASS était de 41 136 euros en 2020. Ce plafond est calculé pour chaque membre du foyer fiscal.
L'intérêt fiscal de déduire les versements sur le PER est d'autant plus important que l'épargnant supporte un taux marginal d'imposition (TMI) élevé.
Prenons le cas d'un contribuable avec une seule part fiscale dont le revenu net imposable est de 35 000 euros. Ses revenus se situent dans la tranche marginale à 30 %. Cette tranche touche la part des revenus situés entre 25 711 et 73 516 euros (chiffres en vigueur pour les revenus 2020). Ce contribuable peut réaliser un versement de 3500 euros (10 % de son revenu) sur son plan d'épargne retraite, et bénéficier d'une réduction de son revenu net imposable du même montant. En conséquence, son impôt sur le revenu diminue de 1050 euros (TMI 30 % sur 3500 euros). Notez que dans le cas présenté ici, le contribuable aurait également pu verser sur son PER et déduire jusqu'à 4 113 euros, soit 11,7 % de ses revenus, en se basant sur le plafond correspond à 10 % du PASS.
L'intérêt fiscal du PER est d'autant plus intéressant que le contribuable atteint une tranche marginale d'imposition élevée. Entre 73 517 et 158 122 euros, le taux d'imposition passe à 41 %, et 45 % pour la part des revenus dépassant 158 122 euros.
Grâce à la réduction d'impôt permise par le PER, le contribuable peut donc épargner davantage, ou simplement diminuer son effort d'épargne (puisque le taux d'épargne rapporté aux revenus nets diminue). Il est important de mentionner ici que le PER est également intéressant pour les épargnants non imposables. En effet, les épargnants renonçant à la déduction des versements du revenu imposable bénéficient d'une fiscalité réduite à la sortie du contrat.
La sortie du contrat
En pratique, l'épargnant peut sortir du contrat dès lors qu'il fait valoir ses droits à la retraite. Le législateur a toutefois prévu plusieurs cas de déblocage anticipé.
La sortie du PER peut se faire sous forme de rente ou de capital. Il est également possible de combiner les deux modes de sortie. Dorénavant, et contrairement à l'ancien dispositif en vigueur (PERP), le PER individuel autorise une sortie à 100 % sous forme de capital. C'est donc davantage de souplesse pour le retraité (possibilité de financer un gros achat tel que celui d'une résidence secondaire avec le retrait sous forme de capital). La fiscalité applicable sur les retraits dépendra du mode de sortie (rente ou capital) et de l'option fiscale choisie (déduction des versements du revenu imposable à l'entrée ou avantage fiscal à la sortie). Le calcul de l'imposition distingue la part des versements et la part des gains.
Dans le cas où l'épargnant avait opté pour la déduction des versements du revenu imposable, ces versements seront réintégrés au revenu imposable au moment des retraits. Mais alors, quel est l'intérêt de la déductibilité des versements s'ils sont réintégrés au revenu imposable à la sortie ?
L'intérêt est double. Tout d'abord, le PER offre la possibilité de lisser ses revenus dans le temps. La part des revenus non consommés et épargnés sur le PER disparaît du revenu imposable pour réapparaître au moment des retraits plusieurs années voire plusieurs décennies plus tard. Dans ce laps de temps, les réductions d'impôt obtenues grâce aux versements déductibles sont autant de capital que l'épargnant pourra faire fructifier au sein du PER ! Ce capital pourra à son tour générer des gains qui seront réinvestis au sein du contrat. En matière de placement, il est toujours intéressant de limiter les frottements fiscaux tout au long de la phase d'accumulation du capital. Le PER remplit pleinement cet objectif.
Autre point, certains actifs subissent une diminution importante de leur revenu à la retraite, et basculent d'une tranche marginale d'imposition forte durant leur vie active à une TMI inférieure à la retraite. L'épargne profite alors du différentiel d'imposition. Dans ce cas de figure, l'intérêt du PER est encore plus grand. Par exemple : l'épargnant déduit les versements sur le PER sur la base d'un TMI (taux marginal d'imposition) à 41 %, et les réintègre quelques années plus tard à la retraite sur la base d'un TMI à 30 %.
Les cas de déblocage anticipé
Le législateur a prévu plusieurs cas de déblocage anticipé avant l'âge de la retraite. L'essentiel de ces cas existait déjà pour les dispositifs d'épargne retraite anciens que le PER remplace :- invalidité du souscripteur, de ses enfants ou du conjoint (marié ou pacsé),
- décès du conjoint (marié ou pacsé),
- fin de droits aux allocations chômage,
- surendettement (sur ordre de la commission de surendettement),
- faillite personnelle (cessation d'activité non salarié et liquidation judiciaire),
- acquisition de la résidence principale.
Le PER n'est donc pas seulement un dispositif d'épargne retraite, il peut également être utilisé comme un dispositif de prévoyance pour faire face aux aléas de la vie, en cas de coup dur.
Le législateur a également introduit un nouveau cas de sortie anticipée, plus heureux celui-ci : l'achat de sa résidence principale.
Le décès du souscripteur entraîne de facto la fermeture du PER. Les encours reviennent aux héritiers ou aux éventuels bénéficiaires désignés. Un point à noter ici est que le calcul des droits de succession diffère selon le type de PER souscrit. En effet, il existe deux types de PER individuel : le PER assurantiel et le PER bancaire. Voyons ce qui les distingue.
PER assurantiel et PER bancaire : quelles différences ?
Le PER assurantiel est géré par un assureur. Le PER bancaire, que l'on appelle aussi PER compte-titres, est géré par un gestionnaire d'actif. Notez que l'un comme l'autre peuvent être distribués par des banques, des courtiers, ou même des fintechs.
Le PER assurantiel est plus intéressant en matière de fiscalité des successions, puisque le calcul des droits de succession se base en partie celui de l'assurance vie. Chacun des bénéficiaires désignés du contrat pouvant reçevoir 152 500 euros sans payer de droit de succession. Attention cependant, ce régime fiscal n'est applicable que si le souscripteur décède avant 70 ans. Après cet âge, l'abattement est de seulement 30 500 euros.
Note : l'assurance vie apparaît donc comme un outil de transmission du patrimoine plus intéressant que le PER, puisque contrairement à ce dernier, ce n'est pas l'âge du bénéficiaire au moment de son décès qui détermine le montant de l'abattement et donc de l'exonération d'impôt escomptable sur le capital transmis via le contrat, mais l'âge du bénéficiaire au moment des versements. Pour les versements réalisés sur une assurance vie avant les 70 ans du souscripteur, les bénéficiaires désignés des encours du contrat bénéficient d'un abattement de 152 500 euros, même si le souscripteur décède après 70 ans (ce qui est souvent le cas puisque l'espérance de vie en France est supérieure à 70 ans).
En sus de ces dispositions fiscales intéressantes pour les successions, le PER assurantiel bénéficie d'un autre avantage : il donne accès aux fonds euros, lesquels sont gérés par les assureurs. Les fonds euros constituent d'excellents supports d'investissement sans risque (ils comportent une garantie sur le capital investi).
Du côté du PER bancaire, les épargnants souhaitant sécuriser tout ou partie de leur encours n'ont d'autres choix que de se tourner vers des fonds monétaires, dont les performances actuelles sont quasiment nulles et donc bien en-deçà de celles des fonds euros. Cet inconvénient est à nuancer par le fait que le PER est un dispositif d'investissement à long terme, et qu'à ce titre, les épargnants ont intérêt à privilégier des supports plus dynamiques tels que les fonds d'investissement en actions et/ou éventuellement la pierre-papier.
Le PER assurantiel et le PER bancaire diffèrent donc également en matière de supports d'investissement accessibles. Les supports accessibles au sein des PER assurantiels sont en tout point semblables à ceux accessibles au sein des assurances vie multisupport (nombre de courtiers proposent d'ailleurs des contrats d'assurance vie et des PER avec des caractéristiques semblables en termes de frais et de supports). L'épargnant peut se tourner vers le fonds euro ou des supports en unités de compte.
Le PER bancaire donne accès à une bonne partie de l'univers d'investissement des comptes-titres ordinaires (à l'exclusion des produits dérivés et autres supports exotiques). Les épargnants souhaitant se constituer un portefeuille d'actions (stock-picking) plutôt que de souscrire à des fonds d'investissement trouveront donc leur bonheur avec le PER bancaire.
Les supports détenus en unités de compte au sein d'un PER assurantiel supportent des frais de gestion annuels. Ces frais vont de 0,50 à 1 % selon les contrats. L'avantage du PER bancaire est que les actifs détenus au sein du plan ne supportent pas de frais de gestion. Cet avantage est à nuancer car, en pratique, certains établissements tels que le Crédit Agricole (une des rares banques à proposer un PER bancaire) commissionnent malheureusement des frais de garde qui viennent en grande partie annihiler l'avantage de l'absence de frais de gestion sur le PER bancaire.
Actuellement, le marché du PER individuel est largement dominé par les PER de type assurantiel. Il faut croire que ce type de PER est plus rémunérateur pour les acteurs de l'épargne…
La majorité des épargnants opte pour une gestion pilotée de leur PER. C'est le mode de gestion recommandé pour tous les épargnants n'ayant pas les compétences ou la volonté de gérer eux-même l'allocation du capital au sein de leur PER. L'essentiel des PER propose un mode d'allocation évolutif dans le temps. Ce type de service permet d'automatiser la sécurisation progressive des encours à mesure que l'épargnant s'approche de la retraite.
En effet, en matière de gestion patrimoniale, les bonnes pratiques consistent généralement à opter pour une allocation dynamique lorsque l'épargnant est jeune. Il dispose souvent d'un horizon d'investissement à long terme et peut ainsi profiter des bonnes performances que délivrent les marchés actions sur cette échelle de temps. Puis, à l'approche de la retraite, la gestion passe sur un profil plus sécurisé, de telle sorte que le futur retraité n'ait pas de déconvenue au moment de consommer le capital accumulé. Le retraité a besoin de visibilité sur son capital et doit donc éviter la forte volatilité inhérente aux supports risqués (en particulier les fonds en actions).
PER vs assurance vie
Comme nous l'avons vu, l'assurance vie et le PER (en particulier dans sa forme assurantielle) donnent accès aux mêmes supports d'investissement. Ce qui différencie ces deux dispositifs, ce sont la fiscalité et la disponibilité du capital.
Contrairement à ce que certains épargnants pensent à tort, le capital détenu sur une assurance vie est disponible à tout moment. Ainsi, les épargnants peuvent réaliser des rachats partiels, il faut généralement compter une à deux semaines pour que l'argent arrive sur le compte courant, voire seulement quelques jours chez certains assureurs. En outre, les rachats partiels sur les contrats de plus de 8 ans bénéficient d'un abattement sur les plus-values (4600 euros par an). Fort de cette souplesse quant à la disponibilité de l'épargne, l'assurance vie se présente comme un dispositif convenant à tout âge et à type de projet financier, que ce soit pour investir son capital sur quelques semestres ou plusieurs décennies avec l'objectif de le transmettre.
De son côté, le PER est un dispositif dont l'usage est beaucoup plus restrictif, il ne répond qu'à un seul objectif : préparer sa retraite. Le PER doit donc être considéré comme un dispositif complémentaire à l'assurance vie, et non un outil de substitution.
L'impossibilité de réaliser des retraits avant l'âge de la retraite (hors cas spécifiques mentionnés plus haut dans cet article) est la principale contrainte de ce dispositif. Cette contrainte est contrebalancée par la possibilité de déduire les versements de son revenu imposable et donc de réduire son impôt sur le revenu. Une disposition fiscale à laquelle les épargnants sont particulièrement réceptifs ! Les Français sont très friands de solutions pour réduire leurs impôts. En dehors des dispositifs d'épargne retraite entreprise (parfois abondés par l'employeur), le PER est le dispositif d'épargne le plus attractif fiscalement pour préparer sa retraite.
— Cet article a été rédigé par Avenue des Investisseurs.
---------
“Les prévisions vous en disent beaucoup sur ceux qui les font, elles ne vous disent rien sur l’avenir.” – Warren Buffett