Manifestement, cette discussion est lue, même plusieurs années après. Je vais donc (enfin) apporter la bonne réponse à Sky, ce que je n’avais pas pu faire à l’époque :
Sky, le 10/02/2016 a écrit :
@Bernard2K
Vous aimez couper les cheveux en quatre, mais encore une fois, vous faites fausse route.
Un prêt à usage nécessite un contrat (art. 1875 du code civil).
Pour qu’il y ait contrat (oral, écrit, verbal ou ce que vous voulez), il doit y avoir quatre conditions essentielles (art. 1108 du code civil) dont le consentement. Ici il n’y a plus consentement puisqu’Alsa a demandé à l’occupante de faire un bail et qu’elle a refusé.
Je rappelle la situation telle que l’a exposée alsa67 :
alsa67, le 08/02/2016 a écrit :
Nous sommes des propriétaires bailleurs et du coup on a eu pitié d’elle et on lui a proposé une chambre meublée avec tout le confort sans bail car pas de caution ni garant.
Maintenant elle a retrouvé un travail, nous avons souhaité faire un bail.
Elle a refusé bien-sûr vu qu’elle payait rien avant.
Cet hebergement dure depuis 2 mois.
En droit, cette situation s’analyse en :
- dans un premier temps, alsa67 et son mari ont consenti à l’occupation à titre gratuit, ce qui s’appelle un prêt à usage (ou commodat). Il y avait donc un contrat oral de prêt à usage ;
- dans un second temps, au bout d’environ 2 mois, alsa67 et son mari ont proposé un bail (avec loyer), ce qui veut dire révoquer le prêt à usage (oral) et établir un bail de location (écrit). C’est parfaitement possible mais la jurisprudence est claire : la révocation d’un prêt à usage de logement doit être réalisée avec un délai de prévenance raisonnable, donc en accordant un délai raisonnable pour quitter le logement (par exemple 2 ou 3 mois). Pour pouvoir prouver, devant le juge si nécessaire, que l’on a donné congé avec un délai de prévenance raisonnable, il faut un écrit donnant congé du prêt à usage (et, éventuellement, proposant un bail à la place). La meilleure façon d’obtenir une preuve solide que l’on a fait cela est l’exploit d’huissier, car une LRAR, l’occupante risque de ne pas la prendre ; et la remise en mains propres contre signature, elle risque de refuser.
Voilà pourquoi mes conseils étaient parfaitement corrects du point de vue du droit.
Il y avait bien sûr d’autres solutions :
- prétendre que c’était un bail oral dès le début, avec tel loyer, et qu’elle n’a jamais payé le loyer. Problèmes : 1) c’est faux, et c’est quand même grave de mentir devant un juge ; 2) c’est la parole d’alsa67 contre la parole de l’occupante et on ne pas présumer de quelle parole le juge va croire ; 3) ça la transforme en locataire en bonne et due forme, or l’expulsion d’un locataire pour impayés est longue et compliquée.
- prétendre, come vous le faisiez, que c’est une occupante sans droit ni titre, donc une squatteuse. Ce qui implique que alsa67 n’a jamais donné son accord pour qu’elle s’installe. Problèmes : 1) c’est faux, et c’est quand même grave de mentir devant un juge ; 2) c’est la parole d’alsa67 contre la parole de l’occupante et on ne pas présumer de quelle parole le juge va croire ; 3) ça la transforme en squatteuse, or l’expulsion d’une squatteuse est longue et compliquée (d’autant plus avec un bail oral).
- obtenir son départ par divers moyens de pression, en essayant de rester dans les clous de la légalité. Manifestement, c’est ce qui s’est passé : alsa67 a protesté et a dit que ça ne pouvait pas durer, et l’occupante à titre gratuit a quitté le logement. Ouf ! Quelle chance. Si elle s’était incrustée, il aurait fallu soit recourir à des moyens de pression plus vigoureux pour obtenir son départ (avec les risques de dérapage assez évidents), soit aller devant le juge ; et, tant qu’à aller devant le juge, je maintiens que ma recommandation (dénoncer le prêt à usage par exploit d’huissier en donnant un délai raisonnable pour quitter le logement) me semble la moins mauvaise des solutions.
Dernière modification par Bernard2K (13/02/2021 13h56)