Bonjour IH
Vous semblez avoir une vue plutôt négative sur National Grid. Je ne partage pas cette opinion, moi j’ai une vue plutôt positive de la transformation en cours.
Mes éléments de réflexion :
-A l’origine National Grid était un distributeur d’électricité fortement centré sur le Royaume-Uni. Pour diversifier leur base d’affaires, il se sont renforcés dans la distribution de gaz. Aujourd’hui on est dans une logique de retour aux sources et NG a déjà vendu quelques actifs dans le gaz au cours des dernières années.
-Toutes les utilities sont fortement réglementées au UK. Autrefois c’étaient des business très rentables (au vu des marges nettes très généreuses), mais depuis plusieurs années, le gouvernement fait pression pour faire baisser les prix au consommateur. National Grid, comme tous les autres d’ailleurs, est donc obligé de traquer ses coûts internes afin de préserver sa rentabilité. Depuis un certain temps, ils se sont développés aux USA. Outre-Atlantique les utilities sont aussi régulées, mais j’ai crû comprendre que la pression était moins forte. Encore que là-bas, la tendance à la transformation existe également.
-Actuellement le gaz est aussi un bon business, mais les politiques visent à réduire l’empreinte carbone. A plus long terme, la distribution de gaz pourrait donc perdre en intérêt. Le fait pour NG de vendre une bonne partie de cette activité me paraît donc pertinente. Dans 10 ans, ces mêmes actifs pourraient valoir beaucoup moins.
-Sur le site internet de National Grid il y a une belle présentation de l’opération en cours. Mis à part la partie gaz, ils vendent aussi la filiale « Rhode Island » aux USA (marge nette 7,8%) et achètent à la place WDP au Royaume Uni (marge nette 31% d’après la présentation). Le deal doit être accréditif rapidement.
-Actuellement tout le monde parle de décarbonisation. Si la tendance se poursuit, il y aura de plus en plus de voitures électriques, mais aussi de plus en plus de chauffages alternatifs (échangeurs de chaleur) donc hausse de la consommation d’électricité. Enfin, j’ai entendu que l’hydrogène-carburant pourrait se développer fortement. Encore une bonne nouvelle, puisque la production d’hydrogène propre par électrolyse consomme de très grandes quantités d’électricité.
-En termes de décarbonisation, le gouvernement anglais a un plan 2030/2050 très ambitieux et envisage d’interdire la vente de voitures thermiques dans une dizaine d’années. Donc très positif pour les marchés de National Grid.
-Depuis quelques temps, les critères ESG deviennent plus importants pour les investisseurs petits et grands. Si NG se recentre sur l’électrique, c’est donc positif car cela améliore la notation. Toutefois, NG ne sera toujours pas une valeur verte, puisque même après les cessions, il restera un petit tiers d’actifs hors électricité. (Qui sait… peut-être y aura-t-il à l’avenir encore plus de cessions dans le gaz ?).
Moi je vois en fait 2 risques principaux :
-Il y a deux ans, lors des derniers grands votes au UK, certains politiques de gauche avaient avancé l’idée de nationaliser tout bonnement les utilities, afin d’éliminer la notion de maximisation des gains dans ces entreprises au profit des consommateurs. A l’époque toutes les utilities avaient lourdement chuté lors de la campagne électorale. Un tel scénario pourrait toutefois ressurgir un jour, même si le déficit budgétaire grandissant et les lourdes dettes post-Covid ne militent pas en faveur d’une nationalisation qui coûterait des milliards.
-Deuxième risque : jusqu’ici le marché électrique se basait sur de grandes centrales (thermiques ou nucléaires) et un réseau de transmission longue distance. Avec le développement des petites unités éoliennes et solaires, on s’oriente vers un marché plus local et une distribution elle-aussi sur courte distance (micro grids) sur laquelle il y a beaucoup moins de déperdition. Dans ce contexte, National Grid pourrait être concurrencé par de petits acteurs locaux, qui choisiraient de construire eux-mêmes un réseau alternatif. Toutefois National Grid a déjà créé sa propre structure « NG ventures» et me semble donc préparé à ne pas se faire doubler dans l’évolution en cours. La nouvelle filiale WDP acquise est elle-même très en pointe sur la distribution locale et l’interconnexion avec les infrastructures renouvelables. Le choix me paraît donc très bon.
Conclusion
Si j’additionne tous les éléments, la transformation de NG me paraît positive et aller dans le bon sens. Et le business électrique me paraît porteur sur le LT.
Bien-sûr National Grid est (et restera) un géant aux pieds d’argile. Pas d’envolée des cours à attendre comme avec les darlings du moment Neoen ou Voltalia (devrais-je dire les stars de l’année passée qui tombent actuellement comme Icare?). Mais un business relativement tranquille avec une croissance faible mais rentable, qui devrait continuer à servir de confortables dividendes.
Bon d’accord, pas un champion du dividend growth non plus. L’ambition modeste des utilities anglaises est d’augmenter le dividende de 2-4% par an, en phase avec l’inflation et la croissance lente des bénéfices.