Voici la suite de mes démêlés avec l’URSSAF au sujet de la CSM.
Petit rappel : j’ai mis en avant l’article 47 de la Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés qui rend nul l’appel de cotisation CSM de 2019 par l’absence d’une mention obligatoire :
"Ces décisions comportent, à peine de nullité la mention explicite prévue à l’article L. 311-3-1 du code des relations entre le public et l’administration.". Le "à peine de nullité" est particulièrement important.
L’URSSAF n’avait pas tenu compte de ma demande d’annulation.
Fin novembre 2021 je reviens chez moi après une absence et j’ai la surprise de trouver dans ma boîte à lettre un avis de passage d’huissier ainsi qu’un courrier m’indiquant que l’URSSAF lui avait demandé de me signifier une contrainte.
Dans le courrier il m’était demandé de payer la CSM augmentée de 91,49 € (frais liés à l’intervention de l’huissier) et il était indiqué que je pouvais aller chercher la contrainte dans son étude (à 70 km de chez moi) ou demander qu’elle soit transmise dans une étude de huissier plus proche. J’ai choisi cette dernière option sachant que j’avais assez de temps pour réagir.
Une contrainte ? Mais, qu’est-ce que c’est ?
Une contrainte est un document émis par le directeur d’un organisme de sécurité sociale, ici une URSSAF, qui si on ne fait pas opposition auprès du Tribunal judiciaire dans les 15 après la signification a tous les effets d’un jugement.
C’est donc une arme très (trop !) puissante dans les mains d’une partie (l’URSSAF) en cas de désaccord avec un particulier (dans le cas de la CSM) ou la plupart du temps un employeur ou un indépendant.
Si j’étais revenu chez moi trop tard, je n’aurais pas pu me défendre simplement et cela aurait eu les effets d’un jugement.
Je trouve que cette procédure de contrainte est une arme inéquitable qui ne permet respecte pas le droit à un procès équitable. C’est une des 2 parties qui seule peut prendre une décision qui a les effets d’un jugement ! C’est effarent quand on y pense.
En attendant que cette contrainte fasse les 73 km jusqu’à l’huissier que j’ai désigné, ce qui mettra plusieurs jours (merci La Poste), je recherche sur le Web comment faire opposition à cette contrainte et je prépare mon courrier pour le greffe du tribunal compétent.
J’apprends que la contrainte doit être motivée par des arguments de faits et de droit qu’il faut énoncer.
J’envoie donc par lettre recommandée avec AR début décembre 2021 un courrier au secrétariat du pôle social du tribunal un courrier indiquant que je fais opposition à la contrainte reçue
Je motive mon opposition par 3 points :
1) la nullité de l’appel de cotisation CSM par absence de la mention explicite obligatoire que j’ai rappelée en début de ce message.
2) l’absence d’envoi d’une mise en demeure préalable par lettre recommandée avec AR (ou autre moyen équivalent)
3) le calcul de la CSM est erroné. La raison que je donne à ce moment là est mauvaise (je m’en rendrai compte plus tard), mais cela suffit avec les 2 points précédents.
Je reçois début janvier 2022 une convocation suite à opposition à contrainte à l’audience publique du Pôle Social du Tribunal Judiciaire pour le mois d’avril 2022.
Je dois transmettre mes pièces de conclusions à la partie adverse (l’URSSAF) et au Tribunal pou la mi-février et l’URSSAF doit faire de même pour la fin mars.
Si la procédure est orale, il faut quand même échanger par écrit pour respecter le contradictoire.
J’ai donc un peu plus d’un mois pour rédiger et envoyer mes conclusions. Encore des recherches en perspectives !
Je m’emploie d’abord à rédiger de façon détaillée et en citant les articles de loi ou les jurisprudences tous les points argumentant pour l’annulation de l’appel de la CSM et de la contrainte.
Dans un second temps, j’ai trouvé un document rédigé par le barreau et la cour d’appel de Versailles qui est un guide des bonnes pratiques de la rédaction des conclusions en matière civile. Il m’a beaucoup aidé sur la forme et je vous le recommande.
Sur le fond, j’ai argumenté en suivant le même plan que dans mon courrier d’opposition :
1) nullité de l’appel de la cotisation CSM de novembre 2020 par absence de la mention explicite prévue par la loi.
Se reporter à mon message précédent pour cette partie de l’argumentation : la partie qui est en citation est copiée de mes conclusions.
Au texte cité ci-dessus, j’ai ajouté en exemple, afin de rendre plus facile à comprendre ce que devait mentionner l’URSSAF, la mention qui figure sur mon avis d’impôt foncier :
le service des impôts dans mon avis de taxe foncière a écrit :
« Les calculs ayant permis la détermination du montant de votre imposition ainsi que son détail sont réalisés dans le cadre d’un traitement algorithmique. Conformément au code des relations entre le public et l’administration, vous avez accès aux règles définissant ce traitement ainsi qu’aux principales caractéristiques de sa mise en œuvre et l’explication de vos droits en la matière, en consultant impots.gouv.fr, rubrique « ouverture des données publiques de la DGFIP » ».
On voit que les services des impôts appliquent correctement les lois contrairement aux URSSAF.
2) Nullité de la contrainte pour non respect du code de la sécurité sociale et de la jurisprudence.
a) Absence d’envoi de mise en demeure par lettre recommandée
b) Mauvaise période indiquée dans la contrainte
En effet, la contrainte contenait la mention 4E TRIM 2019 dans une case qui devait correspondre à la période concernée par la contrainte. Or, la CSM est une cotisation annuelle et la somme qui m’était réclamée à la fois lors de l’appel de cotisation et dans la contrainte correspondait bien à l’ensemble de l’année et pas au seul quatrième trimestre.
La jurisprudence de la Cour de Cassation, Chambre sociale, du 19 mars 1992 précise la nullité sans besoin de prouver le préjudice.
c) Doute sur la signature de la contrainte
La contrainte est une prérogative du directeur de l’URSSAF. Elle doit être signée par lui. Et pour seule signature, j’ai ce qui s’apparente plutôt à un paraphe (initiales de son prénom et nom). Comme ça ne coûte pas plus cher, j’ai demandé à ce que l’on me fournisse une copie d’une pièce d’identité du directeur afin que je vérifie si c’est bien sa signature ou à défaut qu’on la fournisse au tribunal pour qu’il vérifie la similitude, en l’absence de preuve que c’est bien le directeur qui a signé, j’ai demandé au tribunal de prononcer la nullité de la contrainte.
3) Le calcul de la cotisation est faux.
Cette affirmation que j’avais écrite dans mon courrier d’opposition reste vraie mais la raison que j’avais donnée était fausse. J’ai bien trouvé qu’ils avaient fait une erreur et je l’ai détaillée.
Depuis le début, je ne comprenais pas pourquoi l’assiette retenue par l’URSSAF était différente de mon Revenu Fiscal de Référence (RFR) alors que mes seuls revenus sont des revenus mobiliers et rentre à la fois dans le calcul du RFR et de la CSM.
J’ai fini par trouver qu’ils n’ont déduit de mes revenus qu’une partie de ma CSG déductible (celle qui faisait partie de ma déclaration de revenus (case 6DE)) alors que sur mon avis d’imposition la ligne CSG déductible indiquait un montant de 1518 € de plus que celui retenu.
Cette différence correspondait à la CSG déductible des revenus indiqués pour mémoire à la ligne intitulée "RCM déjà soumis aux prélèvements sociaux avec CSG déductible 19", le 19 étant un renvoi à la notice explicative. Ce renvoi indique :
Les revenus déclarés 2 BH de la déclaration des revenus ouvrent droit à une CSG déductible à hauteur de 6,8 % en cas d’option pour imposition au barème (voir ligne "CSG déductible").
Et voilà que tout s’explique. L’URSSAF qui n’est pas très compétent en fiscalité ne sait pas ce que c’est que "l’option pour imposition au barème" et ne sait pas calculer la CSG déductible qui en découle.
Cette option est choisie en cochant la fameuse case 2 OP (on en a parlé ici quand elle est apparue) et elle permet d’être moins imposée qu’au PFU quand on n’a pas ou peu de revenus "classiques" et des revenus mobiliers pas trop élevés. Comme c’était mon cas et que je connaissais cette case grâce à ce forum, j’avais simulé mon imposition avec et sans cette case cochée. Je l’avais au final cochée puisque c’était la meilleure option pour moi.
Il y avait donc bien une erreur dans leur calcul et c’est une nouvelle raison d’annuler la contrainte.
Je n’oublie pas de demander aussi de condamner l’URSSAF aux dépens (les frais du procès) et à me payer une somme pour frais (article 700 du code de procédure civile).
Je finis mon document de conclusion par le "dispositif" : c’est le rappel de toutes mes demandes :
déclarer nul l’appel de cotisation CSM, déclarer nulle la contrainte, ordonner à l’URSSAF de reprendre son calcul de cotisation ou de justifier précisément son calcul actuel, condamner l’URSSAF aux dépens et à l’article 700.
En annexe, j’écris le bordereau énumérant les pièces invoquées, pièces qui sont jointes à mes 2 lettres recommandées à l’URSSAF et au Tribunal.
J’envoie ces 2 recommandés en ligne afin de pouvoir prouver si besoin le contenu de mon envoi et pour éviter de tout imprimer. L’article 700 devrait me rembourser ces frais.
Il ne me restait donc qu’à attendre les conclusions de l’URSSAF. Mais, vous allez voir que j’ai finalement eu une surprise.
La suite un peu plus tard, j’ai déjà été assez long.
J’espère que cela pourra servir à d’autres personnes.