@coriace : Je n’utilise pas la définition marxiste de ce terme mais une définition élargie au capital humain et surtout relative aux capacités du possédant. Selon cette définition, je considère tout bien ou droit acquis comme un "moyen de production" si et seulement si l’acquéreur a le projet et la capacité d’en tirer un profit supérieur aux coûts d’acquisition et surtout d’entretien.
Un exemple peut-être plus parlant : M. Michu se met en tête de "grimper dans l’échelle sociale", conçoit intuitivement que connaître des "gens riches" serait susceptible de "lui ouvrir des portes" et pétri de clichés, décide d’aller trouver les "riches" où ils se réunissent : pour M. Michu qui apprécie les séries américaines, c’est évidemment le club de golf. M. Michu investit donc dans un ensemble de clubs de golf (acquisition) et une adhésion au club (entretien). M. Michu n’aime pas le golf, mais il se force à aller sur le terrain où il passe plus de temps dans le rough que sur le green. Il croise bien quelques "notables", notamment son dentiste, mais ils n’ont pas beaucoup d’intérêts commun et les conversations émaillées de silences gênants tombent à plat. Au bout de deux ans à pulvériser des mottes de terre et égarer ses balles, M. Michu préfère abandonner et retourner à la pétanque. Il revend ses clubs de golf sur LBC avec une décote de 50% et les deux ans d’adhésion au club sont une perte sèche. Ses anciens camarades de jeu qu’il a négligé pendant deux ans le surnomment désormais "Tiger Woods", ce qui blesse secrètement l’ego de M. Michu. Au delà de perdre du temps et de l’argent dans cette désastreuse expérience golfique, il a aussi durablement endommagé son réseau.
L’erreur de M. Michu c’est de ne pas avoir pris en compte sa capacité à produire de la valeur avec ce qu’il achetait. L’adhésion au club de golf n’était pas intrinsèquement vouée à la perte et le plan aurait pu réussir exécuté par quelqu’un ayant un véritable intérêt pour cette activité et/ou une meilleure intelligence émotionnelle. Vu son objectif ("réseauter"), M. Michu aurait mieux fait de capitaliser sur son loisir existant, la pétanque, pour lequel il a un véritable intérêt et déjà des compagnons de jeux. Ces compagnons de jeux rentabilisent déjà sa triplette MS L’IT gravée à son nom (acquisition), l’essence pour aller au boulodrome et les apéros (entretien) : l’un d’entre eux lui a refait sa salle de bain au black pour vraiment pas cher, du travail perlé. L’autre lui a abattu et débité le peuplier au fond du jardin, à l’oeil. En approfondissant ses relations avec ses camarades de jeu et leurs amis, M. Michu aurait probablement beaucoup plus progressé vers son objectif et découvert que le directeur de son agence bancaire mutualiste était fan de pétanque (mais jouait au boulodrome du bled voisin). Cela lui aurait peut-être évité que son projet d’investissement locatif soit retoqué parce qu’il l’aurait amené à 35% d’endettement…
De mon point de vue, même des actifs traditionnellement considérés comme intrinsèquement productifs ne le sont pas nécessairement. Un terrain laissé en friche, une entreprise mal gérée qui accumule les pertes, un bien immobilier laissé vide, un titre d’une société dont le management n’a aucune considération pour les minoritaires, une dette non collectée… Il faut toujours un minimum de compétence, d’effort ou de pouvoir pour extraire de la valeur de quoi que ce soit, et gare à celui qui n’est pas en mesure de le fournir.
TL;DR : Γνῶθι σεαυτόν ?
Dernière modification par doubletrouble (10/07/2022 11h43)
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