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#1 17/07/2024 15h27
- Politok
- Membre (2017)
Top 10 Entreprendre - Réputation : 49
A la suite des nombreux échanges sur l’investissement intermédié (ici, ici, ici notamment), une question centrale a émergé concernant l’investissement intermédié : l’alignement d’intérêts entre les parties prenantes.
Ce sujet est important pour tous les domaines de l’investissement : immobilier, venture capital, crowdfunding, objets de collection, fonds structurés, etc. Je me focaliserai néanmoins sur le venture capital, où le jeu d’acteurs est le plus complexe et nécessite donc d’y réfléchir à plusieurs fois avant d’y aller.
> Investissement en direct
Dans l’univers de l’investissement en direct, il n’y a que 2 acteurs : l’investisseur et la cible
Les choses sont relativement simples (je force un peu le trait, car il peut y avoir d’autres motivations, notamment non financières) :
=> Concernant l’investisseur
* Dealfow : l’investisseur doit consommer du temps et de l’argent pour rechercher des cibles intéressantes (le dealflow)
* Due diligence : puis il doit en consommer à nouveau, ainsi que de l’expertise générale (finances) et sectorielle (selon le domaine ciblé), pour analyser le marché de la cible, son avancement à date, ses capacités de croissance, son organisation, sa gestion, la qualité de l’équipe, etc.
* Closing : puis il doit en consommer à nouveau pour négocier avec la cible les meilleures conditions d’investissement, et le meilleur cadrage juridique (pacte d’associés) avec l’objectif de maximiser ses possibilités de plus-value à terme (terme = quand il cèdera sa participation, ou empochera régulièrement des revenus issus du capital investi), et de minimiser ses pertes si ça se passe mal
* Operating : selon les cas et les pratiques de l’investisseur, il peut être amené à continuer à consommer de l’énergie une fois le deal réalisé, dans l’optique d’aider la cible à croitre, et donc d’aider sa participation à fructifier
=> Concernant la cible
Elle doit chercher en même temps à :
* obtenir le maximum d’argent pour le minimum de capital cédé (le bien le plus précieux)
* garder le contrôle de la destinée de l’entreprise, et ne pas devenir un salarié des investisseurs (motivation profonde de l’entrepreneur : la liberté)
* choisir des investisseurs qui pourront aider l’entreprise à se développer, au-delà de l’argent collecté
* consommer le moins de temps possible pour conclure l’investissement, car son core business est le projet, et non de lever des fonds. Et quand on fait l’un, on ne fait pas l’autre.
En investissement direct, l’information est symétrique : ce qui est dit par l’un est connu par l’autre, et réciproquement. Une partie de l’information peut être manquante, mais la due diligence lorsqu’elle est bien faite permet de lever le voile sur les omissions et fausses promesses de la cible. Et l’avocat de la cible est généralement capable de comprendre les intentions de l’investisseur, à la lecture de la term sheet (et/ou du pacte d’associés proposé).
> Investissement intermédié
On prend les mêmes, et on ajoute un intermédiaire : club deal, club de business angels, plateforme de crowdfunding, SCPI, FPCI, etc.
L’intermédiaire compte comme client, soit la cible, soit l’investisseur, soit plus rarement les deux à la fois.
Il décharge l’investisseur d’une grande partie du travail d’investissement. En général Dealflow, Due diligence et Closing. Très rarement l’Operating.
=> Concernant l’intermédiaire
Le modèle économique de l’intermédiaire fonctionne généralement comme cela :
* il perçoit une prime chaque fois qu’un investisseur lui confie ses sous (souscription client / LP - limited partner)
* il perçoit parfois une prime quand une cible lui confie un mandat de recherche d’investisseurs
* il perçoit une commission quand il réalise un investissement
* il perçoit des frais de gestion dans la vie de l’investissement (gestion du portefeuille, création et fonctionnement d’un véhicule d’investissement ad hoc de type SPV, arbitrages, etc.)
* et la plupart du temps, il négocie une prime de performance (carried interest) qu’il perçoit quelques années plus tard, quand l’investissement est débouclé et qu’il s’avère fructueux (plus-value)
Comme on peut le voir, l’intermédiaire a d’autres priorités que celles de l’investisseur et de la cible :
* il a intérêt à maximiser les fonds qu’il lève, et à les consommer au maximum (d’autant qu’il y a des minima légaux à respecter)
* il a des revenus de souscription et de gestion certains à 100%, même si les investissements sont pourris
* il n’a pas particulièrement intérêt à négocier les investissements au plus bas
* une fois le deal réalisé, il peut passer au deal suivant
Sa priorité est de lever à max, dépenser à max, et y consacrer le moins de temps et d’énergie possible pour abaisser ses propres frais de structure.
Mais les intermédiaires ont aussi intérêt à maximiser leur carried interest, qui représentent des montants colossaux quand les investissements font d’énormes multiples. Simplement cela nécessite plus de talent, plus de temps, et plus de risque.
> Comment séparer le bon grain de l’ivraie ?
Durant mes 30 ans d’expérience d’investisseur, j’ai appris à distinguer 2 catégories d’intermédiaires :
* ceux qui privilégient les revenus faibles, mais certains, à court terme
* ceux qui privilégient les revenus hypothétiques, mais aléatoires, à long terme
Les premiers sont, au démarrage, les amis des cibles. Ils investissent vite et beaucoup. Les investisseurs devraient les fuir. Et je pense avec l’expérience que les cibles devraient s’en méfier car au-delà de l’investissement initial, les conditions des deals sont souvent très défavorables à la sortie (actions de préférence, gouvernance, liquidité forcée, etc.).
Les seconds sont les amis des investisseurs. Et même si c’est contruitif, les cibles devraient y être très attentifs car elles pourront bénéficier d’un appui plus profond.
Alors, comment les reconnaître ? => skin in the game
Regardez si l’intermédiaire investit lui même. Lorsqu’il ne le fait pas, ou qu’il investit des clopinettes (moins de 5% du deal), il y a de fortes chances qu’il soit dans la 1ère catégorie. S’il investit lui même, en plus des investisseurs, un montant substantiel, vous avez la quasi-certitude de l’alignement d’intérêts entre intermédiaire et investisseurs. S’il pousse un deal pourri, il en pâtit lui même. Donc il ne le fait pas.
Le seuil de 5% est bien sur à relativiser selon la taille du fonds. L’important est que sur chaque cible investie, l’intermédiaire mise lui même une partie de sa chemise.
Preneur de vos avis sur le sujet. Et qu’avez-vous à ajouter à cette vision des choses ?
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Track record : j’ai 30 ans d’expérience d’investissement en actions, obligations, FCPI, SCPI, crowdfunding, investissement direct, bourse, assurance-vie, club de BA, etc. J’ai également fondé 5 entreprises, et cédé l’une d’elles. Actuellement, je dirige une société d’investissement en VC, dont je ne fais pas la promotion car notre processus de membership fonctionne en cooptation et que nous ne recherchons pas de nouveaux membres en ce moment.
Mots-clés : capital risque, crowdfunding, fonds d'investissement, venture capital
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