DrMinimal a écrit :
Il s’agit d’une surface rectangulaire de plain-pied de 80 mètres carrés, avec côté rue une ouverture type « vitrine », une deuxième ouverture « porte » (mais il n’y a ni vitrine, ni porte : uniquement des rideaux métalliques), et au fond une large fenêtre sans accès extérieur. Il n’y a ni cuisine, ni toilettes, ni lumières, ni prises électriques : juste les arrivées, évacuations d’eau et un compteur électrique. Brut de chez brut, tout est à faire.
Ce qui signifie que ce local commercial n’a jamais été utilisé, n’a jamais été loué ni vendu. En effet, à ma connaissance, les locaux commerciaux sont toujours livrés bruts. C’est le premier propriétaire ou premier preneur qui fait tout l’aménagement, y compris porte, vitrine, électricité, plomberie. Mais pas seulement les travaux les plus indispensables : un commerce doit être "rutilant", donc ça fait un paquet de travaux d’aménagement et décoration (ce sont souvent des menuisiers qui se sont convertis dans l’aménagement), y compris peintures, revêtements de sol, faux-plafonds, un éclairage bien brillant… Sans oublier tout ce qui est mise aux normes ERP. C’est un budget énorme, donc un frein énorme. Sur un immeuble neuf, malgré le fait qu’il y a tout à faire, ça se vend quand même… parce que c’est neuf, il y a l’attrait de la nouveauté. Tout le monde rêve d’avoir la supérette ou le salon de coiffure au pied de l’immeuble tout neuf où des cadres aisés vont venir dépenser leurs sous juste avant de rentrer chez eux (enfin ça c’est l’image d’épinal).
Or, l’immeuble existe depuis combien de temps ? Comment se fait-ce que personne n’ait été intéressé pour utiliser ce local ? Je pense que cette vacance locative aussi longue que l’existence de l’immeuble vous donne une petite idée de l’ampleur du problème !
Notez quand même qu’on peut faire plein de choses autre que des commerces dans un local commercial : paramédical (kiné par exemple), un dojo, une mosquée, des bureaux (un expert-comptable, un architecte…), une association… Il ne faut pas se limiter aux commerces.
Pour moi, votre problématique est :
- loyer bas et rue peu commerçante : ça attire les tocards, les desesperados, les commerçants pauvres. Un emplacement peu commerçant, ça peut vouloir dire un CA 2 ou 3 fois moindre que le même commerce bien placé. Il faut une sacrée ristourne sur le loyer pour motiver quelqu’un à venir ; et il faut que ce quelqu’un soit très pauvre pour envisager de venir ainsi sur un mauvais emplacement.
- tout l’aménagement à faire : ça voudrait dire au contraire un preneur "riche", c’est à dire un commerçant qui a les moyens de mettre 50 k€ dans un aménagement intérieur complet, y compris portes et vitrines qui représentent déjà un sacré budget. Les tocards susceptibles d’être locataires n’auraient jamais le budget de l’aménagement, donc ils partiront en courant dès qu’ils verront l’état de votre local. De toute façon, ou trouve des optimistes pour prendre un local avec tout à aménager dans le neuf ; l’attrait de la nouveauté comme dit plus haut. Mais là, qui est prêt à tout à aménager dans l’ancien ? Vous cumulez les défauts du neuf et les défauts de l’ancien !
- or, votre local, dans l’état actuel, il vaudrait combien, c’est ça qu’il faudrait savoir… Regardez les petites annonces, regardez DVF, et essayez d’établir la valeur de votre local, en tenant compte de son état "tout à aménager" et en tenant compte de l’ancienneté de l’immeuble. Il vaut probablement moins de 100 k€. Pourquoi un preneur riche voudrait-il mettre 50 k€ dans un local qui ne lui appartient pas, donc qu’il risque de perdre dès que le bailleur voudra reprendre le local, alors qu’avec 150 k€ (100 k€ achat et 50 k€ travaux), il serait chez lui ? Donc un riche commerçant ne sera pas locataire, il sera propriétaire. Il n’y a que les grands groupes, les chaînes, qui ont souvent une politique d’être locataires alors qu’il pourraient être propriétaires. Un commerçant indépendant, s’il a les moyens, préférera acheter, en tout cas dans les zones où l’immobilier est bon marché comme ça semble être le cas chez vous.
- au final : si le commerçant est riche, pourquoi diable s’embêterait-il à venir dans une rue peu commerçante, pour payer moins cher de loyer ?
Donc, votre local est dans un désert de demande : rue trop peu commerçante, travaux trop importants nécessaires qui vont faire fuir les candidats pauvres susceptibles de venir ; les candidats riches préfèrent acheter que louer.
Ca, c’était le diagnostic avant COVID.
Après COVID, l’offre de commerces vides va exploser tandis que la demande va rester faible (et cette demande sera encore plus qu’avant composée de tocards qui ne tiendront pas un an avant de faire faillite). Donc, après Covid, la situation est bien pire.
Je pense que Philippe30 a un optimisme qui vient du fait qu’il possède des locaux commerciaux de bonnes qualité, bien placés. Or, avec l’essor du e-commerce, le nombre de commerces baisse. Les emplacements premium sont toujours recherchés. Mais les emplacements n°2, ils sont progressivement dégradés en emplacement n°Z, le dernier de la liste. Le genre d’emplacement qui soit reste vacant, soit trouve un kebak-tacos qui veut bien louer 200 € par mois (et de toute façon il ne paiera pas). Je l’avais déjà écrit, je le répète : avec l’essor du e-commerce, la demande baisse, l’offre est donc pléthorique. Les commerces d’emplacement premium vont se maintenir (rue très commerçante du centre ville, ou bien zone commerciale type hypermarché-Darty-Ikea-complexe 12 cinémas, avec plein de parkings) ; et encore. Des galeries marchandes qui ferment, ça existe !
Mais les emplacements non-premium, ils sont condamnés à plus ou moins court terme.
A votre place, je ferais directement les démarches pour le passer en logement. Attention aux autorisations nécessaires. Attention aux pièces aveugles.
Dernière modification par Bernard2K (03/05/2020 10h19)