#1 25/01/2016 14h04
- james29
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J’adore la série Mad Men qui décrit tellement bien l’environnement des années 60 à travers la vie du charismatique directeur de la création Donald Draper de l’agence de publicité new-yorkaise Sterling Cooper. Un jour, Sterling Cooper perd un client, et Don Draper a dit à son sous-directeur des budgets Pete Campbell: "the day you sign a client is the day you start losing them". Cette phrase emblématique s’applique parfaitement à Publicis aujourd’hui, surtout quand le groupe vient de perdre ses contrats (douloureusement) avec P&G et l’Oréal.
La fonction d’une agence de publicité est d’acheter les espaces publicitaires et d’y placer ses créations pour ses clients (au passage, s’y ajoute une partie de créativité, ça sert à ça un directeur de la création). L’environnement aujourd’hui est plus difficile qu’il y a 10 ans: les clients peuvent aller directement vers les companies de TV/diffusion et/ou Facebook (ou d’autres réseaux sociaux) pour placer leurs publicités qui se font en interne. L’évolution de l’internet a également contribué au virage numérique des agences de publicité (sur ce, je vous propose de lire le livre On m’avait dit que c’était impossible de JB Rudelle, fondateur de Criteo).
Une remarque anodine toutefois: la fusion d’Omnicom-Publicis tombait à l’eau qui marque le début de la chute du cours de l’action de Publicis. Omnicom dont le chiffre d’affaire est presque le double de celui de Publicis proposait une fusion à part égale 50/50. Omnicom côte aujourd’hui $17B en bourse soit environ €16B donc comparé à €11B pour Publicis. Qu’est-ce qui a changé depuis 5 mois ? 2 pertes de contrats et un changement de la narration boursière.
Juste après l’échec de sa fusion avec Omnicom, Publicis finalise son acquisition en numéraire de Sapient une agence de publicité numérique pour $3.7B. Le groupe est en discussion pour acheter 30% de Cheil Worldwide. Vous ne connaissez pas Cheil Worldwide ? Le plus gros actionnaire de Cheil Worldwide est Samsung Electronics et ce dernier dépense $14B chaque année pour les pubs de ses portables jusqu’à ses électroniques grand public. L’acquisition d’une part de Cheil permettra à Publicis de renforcer ses alliances avec Samsung et d’augmenter son exposition à l’Asie (actuellement à 11% du CA): 30% du CA de Cheil se situe en Chine, là où WPP a le "first mover advantage".
Évidemment une acquisition ne résout pas tous les problèmes. Le principal problème de Publicis est la rétention de clients. Il doit d’abord défendre son contrat avec Fox qui dépense $1.6B de publicité aux USA. Puis ensuite conquérir les contrats de Sony (actuellement détenu par InterPublic) et/ou de VW (détenu par WPP). Son CEO Maurice Lévy est conscient du problème de Publicis, comme il annonce le cost-cutting dans les rapports financiers.
Fondamentalement, le bilan de Publicis est très solide: pas de dette nette, position de trésorerie positive (+€1B). Le business est générateur de cash (FCF de €900M en moyenne chaque année, TTM>€1B). Le ROE est satisfaisant, tournant autour de 14-15%. l’EBITDA TTM est de €1500M. Publicis vaut €11B en bourse au prix d’autour de 52 par action.
EV = €10B, soit un ratio EV/EBITDA de 6.7 et un ratio EV/FCF de 11.2. Le forward PER est de 10x. P/B de 1.8x.
Le perspective est terne: la prévision de EPS (earnings per share) est plate pour 2016-2017. L’environnement est certes difficile (ça n’a jamais été facile, il me semble) mais l’entreprise est solide.
Si on le compare par exemple à son ex-amant Omnicom: P/B = 6.9x, EV/EBITDA 8.52x, EV/FCF = 11.6x, ROE 25%. Ou WPP: P/B 2.6x, EV/EBITDA 9.26x, EV/FCF 15.88x, ROE 14%.
Publicis est donc plus comparable à WPP en terme d’opérations avec toutefois avec un décote de valuation d’environ 30%. Si ce décote se referme, les actifs de Publicis seront ré-évalué et sa valeur boursière pourra atteindre €14.3B soit 67.6 euros par action (upside +30%).
À court-terme, du à la susceptibilité du marché par rapport à ses perspectives financiers, Publicis pourrait bien descendre encore plus bas mais à plus long terme, l’entreprise est un vrai pari à fort potentiel gagnant.
Disclaimer: je ne possède actuellement aucune action de Publicis et je n’ai aucune relation commerciale avec ce dernier. Je pourrai acheter/vendre des actions de Publicis sans notification antérieure.
Message édité par l’équipe de modération (25/01/2016 14h38) :
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The four most expensive words in the English language are "this time it's different ." - Sir John Templeton
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