4 #1 13/01/2017 14h28
- Lazard
- Membre (2014)
- Réputation : 73
Introduction
Avec l’étude du cas Aeropostale Inc, je vais développer quelques arguments pour défendre la thèse qu’en ce qui concerne les mauvais business, les rachats d’actions systématiques comme stratégie d’allocation du capital, amènent souvent à léser les actionnaires long terme.
Qu’est-ce qu’un mauvais business ?
Un mauvais business c’est :
-soit un business qui est en situation de désavantage concurrentiel (le supermarché local contre Walmart par exemple)
-soit un business qui se trouve dans une industrie structurellement très difficile au niveau concurrentiel (compagnies aériennes…) ou sans avenir (vente/location de DVD…)
Les mauvais business sont souvent caractérisés par l’absence de pricing power, une clientèle volatile et des revenus incertains (à défaut d’être caractérisés par une rentabilité supérieure à la moyenne car à court et moyen terme, la rentabilité d’un mauvais business peut tout à fait être exceptionnelle)
Pourquoi les rachats d’actions peuvent-t-ils être mauvais ?
Le rachat d’action est équivalent à un réinvestissement dans le business puisque peu importe le prix payé par action, c’est un pari sur la prospérité future de l’entreprise. Hors, pour un acteur lambda d’un mauvais business, à long terme l’issue est certaine, la faillite (ou a minima une rentabilité très faible ou négative). Par exemple, la quasi-totalité des compagnies aériennes US, ont déjà fait faillite au moins une fois.
Pour les mauvais business, les rachats d’actions c’est continuer de mettre à risque le capital des actionnaires. C’est même pire que d’autres stratégies de type croissance organique ou deleveraging qui ont le mérite d’améliorer sensiblement la situation de l’entreprise.
Le cas d’Aeropostale
Aeropostale Inc
(en millions $) CFO FCF Rachat d’actions
2012 145 47,5 41
2011 129 56 100
2010 264 164 257
2009 334,5 280,5 174
2008 202 119 7
2007 171 89 266
2006 177,5 132,5 91,5
2005 144 86 44,5
2004 137 90 46
TOTAL (en milliard) 1,7 milliards 1 milliard 1 milliard
Aeropostale, malgré sa présence dans une industrie terriblement difficile (cf Teen Apparel Retail : une industrie extrêmement difficile) et l’absence d’avantage concurrentiel, a fait beaucoup de bénéfices entre 2004 et 2012. Les free-cash-flow cumulés s’élèvent à 1 milliard sur la période. Tout comme les rachats d’actions. Autrement dit, sur cette période particulièrement prospère, Aeropostale à utiliser 100% de ses FCF pour racheter ses actions.
Finalement, Aeropostale a fait faillite en 2016 , les actionnaires long terme vont ainsi perdre 100% de leur investissement alors qu’ils auraient pu se partager plus d’1 milliard de dividendes cumulés entre 2004-2012.
Qu’aurait-t-il fallu faire alors ?
Selon moi, il n’existe que deux bonnes solutions :
-verser un maximum de dividendes (que l’actionnaire pourra ré-allouer dans un business moins difficile) avec les bénéfices, la trésorerie disponible et même les actifs non-opérationnels.
-investir dans un business plus sûr (par exemple l’entreprise Book-a-Million Inc, avant d’être rachetée, était dans un business difficile avec des perspectives incertaines et avait intelligemment choisit d’investir en parallèle dans un business moins risqué d’immobilier locatif)
Des exceptions ?
Si le marché sous-évalue nettement la valeur de liquidation de l’entreprise, et particulièrement si l’entreprise a l’intention d’être vendue ou liquidée, cette politique peut être sensée, même pour un mauvais business.
Conclusion
Pour un bon business, lorsque le prix de l’action sous-évalue l’entreprise, le rachat d’actions est hautement relutif pour l’actionnaire long-terme. En revanche, pour les mauvais business, ce genre de politique peut s’avérer être catastrophique comme le cas Aeropostale le démontre.
Mots-clés : aeropostale, bad business, rachat d'actions
Hors ligne