Les propriétés des entiers naturels et des réels ne sont plus étudiées, mais restent employées de façon inconsciente. Comme on ne précise pas les axiomes fondamentaux qui définissent N, on ne démontre pas le raisonnement par récurrence : on l’admet en 2013. On étudie les congruences en 2013, mais plus les anneaux Z/nZ. On travaille l’arithmétique, mais mystérieusement en 2013 on étudie les pgcd mais pas les ppcm.
On n’étudie plus les propriétés de R. En 1971, c’était je pense une mauvaise idée d’introduire les nombres complexes avec des matrices carrées de similitudes, et la présentation en 2013 est plus simple et directe. Par contre les linéarisations de polynômes trigonométriques ont disparu du programme. On n’étudie plus les racines n-ièmes d’un nombre complexe, et l’on ne cherche pas les racines d’un polynôme du second degré à coefficients complexes : en 2013 on se borne à étudier des polynômes du second degré à coefficients réels.
Pour la continuité, les limites et la dérivation des fonctions, on ne donne pas de définitions rigoureuses en 2013, donc on supprime beaucoup de démonstrations qui s’appuyaient sur ces définitions, comme on le faisait en 1971. Le nouvel élève devra admettre beaucoup de résultats et se contenter de vérifications graphiques. Il devra faire confiance à son professeur et à son manuel sans mesurer par lui-même la validité des énoncés qu’on lui propose, puisqu’on ne l’incite plus à le faire. Dérivée de la composée d’une fonction, d’une fonction réciproque d’une fonction dérivable strictement monotone : on n’en parle plus, en tout cas pas de façon générale.
L’étude des fonctions vectorielles de R dans un espace vectoriel euclidien a complètement disparu, on n’étudie plus aucune courbe paramétrée, et la cinématique du point est passée à la trappe. Il n’y aura donc aucune interdisciplinarité avec les sciences physique à ce niveau, mais il faut dire que le programme de sciences physique a été grandement allégé en parallèle.
Les sommes de Riemann ont disparu et l’on ne donne plus de définition rigoureuse de l’intégrale d’une fonction numérique sur un intervalle réel borné. En 2013, on présente l’intégrale essentiellement comme une aire sous la courbe, et l’on admet la suite. L’intégration par parties a été supprimée des programmes.
Les applications de l’intégration à la mécanique et à la physique a disparu : plus de calculs de volumes, de masses, de moments d’inertie, de vitesses et de distances parcourues, d’intensité et de quantité d’électricité, de puissance et d’énergie. Tout cela passe à la trappe.
Au niveau des fonctions d’une variable réelle, on étudie toujours les fonctions xn si n est un entier positif, mais plus si n est un rationnel. Sait-on seulement d’ailleurs encore ce qu’est un rationnel ? Heureusement, on parle encore de suites arithmétiques et géométriques, des fonctions circulaires (sauf la tangente dont on ne veut plus entendre parler, la laissant pour l’université). Le logarithme népérien et l’exponentielle sont toujours au programme, même si la présentation que l’on propose en 2013 est étonnante et compliquée. On ne parle plus, par contre, des fonctions logarithmes ou exponentielles en base a, ce n’est plus à la mode bien que le logarithme décimal soit utilisé dans d’autres sciences.
En 2013, on n’utilise plus la règle à calculs, et heureusement, mais plutôt l’ordinateur et les logiciels de tous genres, ce qui représente une évolution normale des enseignements.
Mais pourquoi s’interdire d’étudier des équations différentielles simples du premier et second degré comme on le faisait en 1971 ? Pour s’interdire d’utiliser des outils performants qui éclairent d’autres sciences ?
En géométrie, la terminale S 2013 fait table rase : plus d’études de transformations, d’isométries, de similitudes. Un élève commencera sa première année de licence en ignorant complètement ce qu’est une translation ou une rotation. Evidemment, on ne parle plus de structures algébriques, on préfère rester dans le flou et ne pas savoir exactement dans quel espace on travail. En restant très approximatif, on peut donc éviter de définir ce qu’est un espace vectoriel, ne plus parler du B A BA d’algèbre linéaire concernant les applications linéaires, les images, les noyaux. Plus d’homothéties aussi. Plus de barycentres, et plus de fonction scalaire (ou vectorielle) de Leibniz. Plus de symétries ni de projections, dans le plan ou dans l’espace. Plus d’applications affines, et plus de définition rigoureuse de l’orientation d’un plan. En 2013, on peut cependant encore parler de produit scalaire dans l’espace, celui du plan ayant été étudié en première. On peut aussi parler d’équations cartésiennes de plan (mais étonnamment pas de représentations paramétriques d’un plan) et de représentations paramétriques de droites dans l’espace (mais curieusement pas d’équations cartésiennes de droites dans l’espace). Mais on a supprimé l’étude des rotations de l’espace, des vissages et des applications orthogonales en général, on ne sait pas orienter l’espace, et l’on n’apprend plus ce qu’est le produit vectoriel.
En géométrie plane, et en 2013, on reste pratiquement au niveau du collège puisque les expressions complexes des similitudes ont disparues (avec les similitudes), que l’on ne parle plus du groupe des similitudes (puisqu’on ne sait pas ce qu’est une structure de groupe), que l’on n’étudie plus les coniques (donc les ellipses, les hyperboles et les paraboles conserveront tous leurs mystères), ce qui supprime beaucoup de problèmes qui étaient traités analytiquement.
Les probabilités sont enseignées différemment en 2013 : on utilise la machine pour faire de nombreuses simulations, mais on ne dispose plus de définitions précises. L’étude des variables aléatoires réelles d’un couple ou d’un produit a disparu. On ne parle plus de dénombrements, ni de coefficients binomiaux dans ce contexte, mais on insiste sur les arbres de probabilité.
Conclusion : le programme de terminale C de 1971 comportait 185 lignes sur le bulletin officiel. On en a supprimé environ 104 lignes pour aboutir au programme de terminale S de 2013, soit une perte de 56%. En 1971, un élève de terminale scientifique suivait 9 heures de cours hebdomadaire, mais plus que 8 heures en 2013. Mais attention, l’élève de 2013 a moins d’entraînement en sciences derrière lui puisqu’il n’a bénéficié que de 4h de mathématiques par semaine en première S, au lieu de 6 heures en 1971, et de 4h de maths en seconde au lieu de 5h en seconde C en 1971. Il ne faut donc pas s’étonner à ce qu’il soit bien moins entraîné et savant qu’un élève qui suivait les anciens horaires et les anciens programmes.