@LeZig : à mon avis les 2 effets co-existent :
a) il y a bien plus de riches aux USA qu’en France (si on définit la notion de riche par un même seuil monétaire de patrimoine net)
b) les ultra-riches sont bien plus riches aux USA qu’en France (si l’on regarde leur richesse cumulée, en pourcentage de la richesse totale)
Malheureusement l’étude SCF de la Fed (en tout cas les fichiers Excel que j’ai regardés) ne fournit pas des données par centiles, mais par déciles (ou groupements de déciles) de revenus et de patrimoines nets. (Cela dit, je vois que certaines analyses par la Fed, par exemple celle-ci, se focalisent sur le top 1%, donc j’imagine qu’il y a des données plus détaillées que celles qui sont publiées.)
Pour vérifier l’hypothèse (a), je regarde la médiane du 10e décile des patrimoines nets, c’est-à-dire le 95e centile : elle est à 2,6M$, à comparer avec un 95e centile des patrimoines nets à 803k€ en France en 2015. Soit un rapport d’environ 2,7 entre la richesse du 95e centile américain et du 95e centile français.
La moyenne du 10e décile des patrimoines nets est à 5,7M$ aux USA et à 1,1M€ en France, soit un rapport de 4,4 entre la richesse moyenne du 10e décile américain et du 10e décile français.
Cette disproportion entre les rapports des moyennes et des médianes des 10e déciles américain et français suggère que le 10e décile américain est beaucoup plus "inégalitaire" que le 10e décile français, c’est-à-dire que la disproportion des patrimoines nets entre les ultra-riches (le top 1%, disons) et les riches (le reste du 1er décile) est bien plus importante aux USA qu’en France (l’hypothèse (b)).
C’est évidemment confirmé par l’observation du patrimoine moyen du top 1% : 29M$ aux USA contre 4M€ en France (soit un ratio de 6,1 !).
Le dernier centile des patrimoines nets est typiquement le plus "inégalitaire", entre les quasi-prolétaires (je plaisante) en bas du centile (patrimoine net de 1,8M€ en France) et les vrais riches tout en haut de la pyramide. Une façon objective de mesurer ce caractère inégalitaire serait de faire le ratio entre la moyenne du top 1% et son seuil inférieur : en France ce ratio est de 4/1,8 = 2,2. Malheureusement je n’ai pas les données pour faire ce calcul aux USA (29/x = ?), mais intuitivement je dirais qu’il est bien plus élevé.
Pour vérifier l’hypothèse (a), on peut aussi regarder le World Wealth Report annuel publié par CapGemini, établi selon une autre méthodologie, mais qui a l’avantage de permettre une comparaison internationale directe. Ce rapport dénombre 5909k "HNWI" aux USA et 702k en France (HNWI = high net worth individuals = patrimoine "investissable", hors résidence principale et collections > 1M$). Soit 1,8% de la population américaine et 1,0% de la population française. Pour comparaison les HNWI représentent : 2,7% de la population au Japon (ce qui me surprend et m’impressionne beaucoup), 1,7% en Allemagne, 0,1% en Chine (on voit l’immensité du potentiel de rattrapage), 0,9% au Royaume-Uni, 5,1% en Suisse, 1,0% au Canada, 0,5% en Italie (un calcul en pourcentage des ménages plutôt qu’en pourcentage de la population serait plus précis). Les HNWI représentent une population mondiale de 19,6 millions de personnes en 2019.
Les ultra-HNWI (patrimoine "investissable" > 30 millions $) représentent une population mondiale de 183k personnes, mais l’étude n’en fournit pas une répartition géographique.