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Licenciement pour inaptitude : procédure et implications pour le salarié

Licenciement pour inaptitude : procédure, implications et conseils

Cette discussion porte sur la procédure de licenciement pour inaptitude dans le secteur privé, ses implications pour le salarié et les points de vigilance à observer. Les membres échangent sur le déroulement de la procédure, du premier arrêt maladie jusqu'au licenciement, en soulignant l'importance du rôle du médecin du travail et de la médecine de prévention.

Un premier intervenant détaille les étapes : la période d'arrêt maladie, les visites de pré-reprise et de reprise, l'avis d'inaptitude (avec les nuances liées à l'origine professionnelle ou non de l'inaptitude et la question du reclassement), l'entretien préalable au licenciement et enfin le licenciement lui-même. Il souligne l'importance de l'accompagnement d'un avocat pour défendre ses droits, notamment concernant le calcul des indemnités et la recherche de reclassement par l'employeur. Le calcul des indemnités et la preuve de la recherche de reclassement sont présentés comme des points cruciaux. L'intervenant mentionne également la possibilité de contester le licenciement devant le Conseil des Prud'hommes (CPH).

Un second intervenant, présenté comme un médecin du travail, apporte des précisions et des corrections. Il insiste sur la formulation juridique précise du licenciement, qui doit être pour « impossibilité de reclassement suite à une inaptitude », et non pas pour « inaptitude » tout court. Il clarifie le rôle du médecin du travail dans la procédure, précisant qu'il ne statue pas sur l'origine professionnelle de l'inaptitude, rôle qui incombe à la CPAM. Il détaille également les différents types de visites médicales et le délai d'un mois imparti à l'employeur pour effectuer les démarches de reclassement, après quoi le salaire doit être repris.

La discussion met en lumière les difficultés et les subtilités de la procédure de licenciement pour inaptitude, soulignant les risques pour le salarié de se retrouver sans protection juridique adéquate. Le délai de recherche de reclassement et le rôle de la CPAM dans la reconnaissance de l'origine professionnelle de l'inaptitude sont des points importants mis en avant. Les informations contradictoires entre les deux intervenants soulignent la complexité de la législation et l'intérêt d'un accompagnement juridique.

Enfin, les participants mettent l'accent sur l'importance d'une bonne compréhension des procédures légales et des droits du salarié, incitant à l'accompagnement par un professionnel du droit face à cette situation complexe. L'interprétation juridique des décisions de justice est également abordée, illustrant les nuances et les subtilités du droit du travail en matière de licenciement pour inaptitude.


1    #1 02/01/2025 10h56

Membre (2018)
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ESTJ

Inspiré de longs échanges MP avec un forumeur souhaitant rester discret sur sa problématique,  je vous partage donc ici le déroulé procédural du licenciement pour inaptitude et ses variantes ainsi que quelques constats personnels sur le sujet qui ne valent pas vérité absolue bien sûr.

De mon observation, un salarié peut demeurer souvent jusque 2 ans en arrêt maladie avant que son cas commence à intéresser la cpam. À l’approche de cette échéance, la question qui revient est de savoir si le malade est alors considéré comme consolidé ou non dans cet état. Si la réponse est oui et que son poste ne semble pas compatible avec son état de santé, les échanges entre sécu et médecine du travail amèneront la question de vous déclarer inapte.

Comme salarié, vous pouvez demander une visite de pré reprise dont l’idée est que vous échangiez avec le médecin du travail sur votre vision de la suite de votre parcours. Il prendra alors possiblement des notes pour suggérer un aménagement de poste a votre employeur, mais ce peut-être aussi l’occasion de tenter un temps partiel thérapeutique pour voir si un retour en poste est possible. Ce peut-être un mi temps, mais pas forcément, avec une part indemnisée par la sécu et une autre payée en temps de travail effectif par l’employeur.

Si la tendance du rdv conclut à plutôt vous rendre inapte, vous serez alors convoqué à une visite de reprise qui sera cette fois organisée par l’employeur. À l’issue de celle-ci, une seconde visite sera organisée deux semaines plus tard, ce temps étant mis à profit pour que le médecin se rende dans l’entreprise afin de remettre à jour sa fiche si pas fait récemment, mais surtout échanger avec votre Rh sur les potentiels aménagements de poste ou changement de poste possibles afin que votre état de santé soit compatible avec ce dernier.
Au second rdv médical, si rien ne se profile, vous serez déclaré inapte.

L’avis papier qui vous est remis à cette occasion est une pièce essentielle où chaque mot a son importance : il peut dispenser l’employeur de recherche de reclassement, il peut aussi stipuler si l’inaptitude est d’origine pro ou non pro. J’utilise « peut » car bien que le formalisme de ce document soit essentiel pour la suite de votre dossier et ses impératifs largement communiqués aux médecines du travail, certains médecins traitent encore cela par dessus la jambe, au détriment de vos droits et plongeant l’employeur dans un flou artistique à suivre pour gérer votre dossier.

À noter qu’il existe également une procédure d’avis inaptitude rendu en une visite, dite de danger immédiat : comprendre que le salarié se pointe au rdv en déclarant si vous me renvoyez la bas, je me flingue ….ce qui peut aussi être une façon de forcer le destin après une rupture conventionnelle refusée par l’employeur …

Une fois déclaré inapte, si le médecin n’a pas déclaré inapte à tout poste dans l’entreprise et dispense de reclassement interne et externe,  l’employeur doit mettre en œuvre un process pour vous reclasser : il va échanger des mails qu’il conservera dans votre dossier afin de pouvoir prouver au besoin qu’il a fait des recherches en ce sens. En même temps, il va consulter le CSE, dont l’avis ne sert pas à grand chose dans les faits, mais c’est à faire. Dans la foulée, il va vous convoquer par AR avec 5 jours ouvrés de délai à première présentation du courrier à un entretien préalable au licenciement : à cette occasion, il vous informera de ses  démarches.
À noter que du jour de l’avis inaptitude, vous ne serez plus paye : la reprise du salaire interviendra après 30 jours si vous n’êtes pas encore licencié, et dans la pratique, ce délai  est très dur à tenir et on voit souvent des employeurs s’asseoir sur la reprise du salaire quand ils vont licencier. Quand on est employeur habitué à ces situations, on a souvent une boucle mail de reclassement bateau ou chacun répond après étude approfondie de votre cv très intéressant, non merci…(étant entendu que la politesse se rend entre membres de la boucle bien sûr). Il m’est arrive ainsi de m’écrire à moi même et de me répondre bien sûr sur une autre de mes sociétés pour justifier de l’interne ! (Quand l’absurde débute…les français parlent aux français …)

Difficulté supplémentaire si vous êtes salarié protégé : élu, DS, conseiller du salarié…. Votre employeur devra impérativement obtenir l’autorisation préalable de l’inspecteur du travail de vous licencier, celui ci devant diliger une enquête ou il entend séparément les deux parties afin de verifier que ce projet n’a aucun rapport avec votre mandat. À coup sûr, si vous êtes dans ce cas, votre licenciement sera bien après les 30 jours et donc reprise du salaire à faire…

Après l’entretien, vous serez licencié et sans préavis.

Si votre aptitude est d’origine pro, case cochée sur le formulaire d’inaptitude, ou si par des écrits antérieurs, votre employeur ne peut ignorer que ce licenciement est consécutif à une origine pro, votre indemnité de licenciement devra être doublée, source de litiges ultérieurs quand pas fait.

À noter que vous pouvez alors postuler et reprendre exactement le même poste dans une autre boîte et être reconnu apte à ce poste lors de la visite médicale d’embauche : raison, c’est justement car cela n’est pas la même boîte …lors de tentatives de reclassement externe, à quelques années d’intervalle, j’ai ainsi vu des salariés spécialistes de cette procédure qui faisaient ainsi plusieurs boites de la même ville, rapidement se mettait ensuite en AM, avant d’être mis inapte à nouveau, de quoi meubler une carrière en faisant tourner le compteur ancienneté sans trop d’heures effectives …
J’ai voulu mettre en cause la médecine du travail (même praticien en prime) pour ce qui me semblait relever d’une complicité active dans cela, mais j’en ai été découragé par mes conseils car perdu d’avance sur cet item, mais cela m’a motivé pour les ennuyer autrement en retour avec un résultat plus probant (mise en cause du calcul de cotisations dues) ce que je n’aurais pas initie sans cette antériorité antagoniste.

Une fois licencié, vous avez aussi la faculté de contester le licenciement devant le CPH en vous faisant assister d’un avocat pour maximiser vos chances de succès : le plus souvent, la recherche de reclassement est un sujet cassé gueule pour l’employeur selon sa taille : si vous êtes un groupe, c’est encore pire, et il me semble personnellement alors raisonnable de dire que sans un poste voire deux proposés et refusés par le salarié que le débat sera compliqué pour lui.

Au delà du déroulé procédural, je conseille de se faire accompagner d’un avocat si un jour vous rentrez dans ce schéma car même si vous êtes l’employé du mois tous les mois depuis des années, quand votre employeur aura compris que le citron pressé que vous êtes ne lui sortira plus de jus, la musique change parfois même sans que vous en soyez conscient  ….

Entre le premier arrêt de travail et votre licenciement, il existe des notions de complément de salaire obligatoire employeur, parfois renforcées par des contrats de prévoyance financés par l’employeur et parfois les salariés également dans le cadre d’accords : difficiles à éplucher pour ne pas dire souvent illisibles ou incompréhensibles, c’est un autre exemple de la valeur ajoutée qu’un avocat vous apportera dans votre dossier afin de vérifier que vous soyez bien remplis de vos droits.

Édit //

Pour exemple de l’absurde, une décision récente sur ce thème reprise d’un post Link de Lorene do Casal dont je recommande les travaux :

arrêt du 4 décembre dernier (Cass. soc du 4 décembre 2024, n°23-15.337) qui autorise un salarié à demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail faute pour son employeur de lui avoir donné du travail après l’avis d’inaptitude.

on vient ici condamner un employeur pour ne pas avoir donné de travail à un salarié inapte alors même qu’il lui cherchait un poste de reclassement.
si le salarié est inapte, l’employeur ne peut lui demander de reprendre son poste.
Or, si l’employeur recherche un poste de reclassement, c’est qu’il ne l’a pas trouvé.
Or, s’il ne l’a pas trouvé, quel poste lui donner ? Quelles tâches doit-il donner à son salarié, vu que par principe, il n’a toujours pas trouvé ce qui serait compatible avec son inaptitude…

Si on s’en tient au droit, certes, l’obligation essentielle de l’employeur est de lui fournir du travail. Ici, il le payait à rien faire  et c’était le problème.

Sauf que s’il lui avait demandé de faire quelque, c’est autre chose qu’on aurait pu lui reprocher :
Ne pas respecter son obligation de santé/sécurité ;
Lui imposer une modification unilatérale de son contrat de travail.

Alors, finalement on se retrouve avec un employeur 4 fois perdant :
- Il a perdu du temps ➡️ recherche de reclassement
- Il a perdu de la productivité ➡️ salarié inoccupé
- Il a perdu de l’argent ➡️ versement des salaires + condamnation
- Il a perdu le salarié ➡️ le contrat est rompu par la résiliation judiciaire

Dernière modification par serenitis (02/01/2025 11h57)

Mots-clés : inaptitude, non professionnelle, professionnelle, reclassement, sécurité sociale


Profiter de ne rien foutre….

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3    #2 02/01/2025 16h19

Membre (2015)
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Médecin du travail j’aimerais apporter quelques précisions sur ce qui a été écrit ci dessus

La description de l’inaptitude concerne les salariés du privé

Attention à la formulation il s’agit d’un licenciement pour impossibilité de reclassement suite à une inaptitude
Licenciement pour inaptitude revient à dire licenciement pour état de santé ce qui est illégal juridiquement
C’est très subtil mais très risqué pour un employeur de ne pas respecter la bonne formulation

Un salarié en arrêt maladie peut l’être pour une pathologie professionnelle (accident du travail ou maladie professionnelle) ou pour maladie non professionnelle
Administrativement en maladie non professionnelle, les indemnités journalières d’arrêt maladie durent 3 ans maximum – à l’issue (voire avant)  le médecin conseil de la CPAM statue : l’état de santé permet de reprendre un  emploi et il peut interrompre les IJ ou son état de santé ne permet pas de reprise dans l’emploi - il peut basculer le salarié en invalidité 1er ou 2eme catégorie

Dans le cadre d’un arrêt maladie d’origine professionnelle la temporalité des 3 ans n’existent pas même si dans les faits la plupart des salariés sont le plus souvent consolidés dans cette intervalle de temps – Consolidé veut dire que les soins à apporter ne permettent pas ou plus d’améliorer l’état de santé et qu’il reste des séquelles indemnisables ou pas en fonction du % incapacité permanente partielle obtenu (IPP) 

Les recommandations actuelles sont qu’un salarié en arrêt depuis 2 mois peut demander une visite de pré reprise auprès de son médecin du travail – Initiative qui peut également être proposée par le médecin traitant ou le service médical de la Caisse d’assurance maladie
Le salarié est libre de faire cette démarche ou pas
En fonction de l’état de santé au moment de la visite, le médecin du travail :
-    peut proposer des aménagements de poste pour favoriser le retour dans le poste de travail  et remettre un courrier de pré reprise que le salarié transmet à son employeur
-    peut demander à réaliser une étude de poste pour pouvoir statuer lors de la visite de reprise
-    peut conseiller au salarié de poursuivre les soins et de revenir plus tard quand l’état sera stabilisé
-    peut orienter le salarié dans les dispositifs de maintien dans l’emploi (demande RQTH, essai encadré, CRPE = convention de rééducation professionnelle en entreprise … )

Depuis 2017 le formalisme d’une inaptitude est de la faire en 1 seule visite dans la mesure où elle a été préparé en amont (visite de pré reprise , étude de poste – FE à jour – entretien avec l’employeur )
Il arrive encore que l’inaptitude soit déclarée en 2 examens à 15 jours d’intervalle maximum mais ce n’est plus la règle – On rencontre cette situation lorsqu’un salarié ne s’est pas manifesté pendant son arrêt de travail ou qu’il est « sorti » de la surveillance du Service médical de la CPAM 

Le médecin du travail utilise une fiche de visite réglementaire pour déclarer un salarié inapte
Inaptitude déclarée lors d’une visite de reprise le plus souvent (mais il peut s’agir aussi d’une autre visite comme visite d’embauche ou périodique)  – A aucun moment cette fiche ne permet de désigner l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude
Ce n’est pas de la responsabilité du médecin du travail de déclarer l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude – Il s’agit d’une décision de la CPAM de reconnaitre ou non l’accident du travail ou la maladie professionnelle
Néanmoins dans le cadre d’une origine professionnelle reconnue par la CPAM, le médecin remet au salarié un document intitulé ITT (indemnité temporaire d’inaptitude)

La procédure d’inaptitude pour danger immédiat n’existe plus

L’inaptitude à tout poste n’existe pas juridiquement
Encore une fois la fiche de visite « inaptitude » est réglementaire
Le médecin du travail peut utiliser une mention express qui autorise l’employeur à ne pas faire de recherche de reclassement
Il peut également établir les capacités restantes du salarié permettant d’orienter l’employeur dans ses recherches de reclassement
En résumé le salarié peut être licencié pour impossibilité de reclassement car
-    Le médecin du travail  a utilisé une mention express
-    Le salarié a refusé la proposition de reclassement
-    L’employeur a fait des recherches de reclassement mais n’a pas de possibilité de reclassement (il doit pouvoir démontrer qu’il a fait des recherches)

L’employeur dispose d’un mois à partir de la date d’inaptitude pour effectuer l’ensemble des démarches
Au-delà de ce mois, les salaires doivent être repris sans que cela exonère l’employeur de poursuivre les démarches

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