Je m’étais résolu à m’abstenir au sujet de cette boite mais je vais faire une exception juste pour une fois.
J’ai été déçu dans un premier temps pour la faible croissance (15-16%), puis avec le transcript j’ai pu comprendre que les chiffres n’étaient pas si mauvais, juste une sous-estimation du besoin d’investir dans du recrutement (OPEX) pour stabiliser le staff et financer la future croissance.
Voici ma compréhension vulgarisé du business :
2019 : Annonce de la volonté à devenir EBITDA positif : nécessité de ralentir la croissance pour rester sur des CAC abordable (limiter le churn rate), et même si le business est à BFR négatif, cela ne finance pas intégralement la croissance et nécessite de puiser dans le cash.
2020 : je crois que l’objectif d’EBITDA est atteint, maintenant on a l’objectif du FCF positif ou P/L positif.
L’effet d’échelle n’était pas encore optimal, l’entreprise rogne sur ses effectifs (couplé à l’effet COVID), puisque je crois qu’elle était dans les 150 employés puis à 115 environ quand ils ont atteint l’objectif, probablement de l’attrition naturel non renouvelé. Bref ils restent discipliner pour atteindre l’objectif, mais au péril de se retrouver en sous effectif, jugeant qu’une fois l’objectif atteint, ils pourront boucher les trous.
De ce fait, les SGA hors CAC (CAC que je considère être le marketing principalement), se retrouvent au plus bas niveau depuis un bon moment.
2021 : L’année du FCF positif, l’objectif étant atteint, ils recrutent enfin (voir leur site) pour compléter leur effectif et investissent également dans les plateformes FR et GER (comme ils l’ont fait pour la partie ESP), étant donné qu’ils veulent qu’une base déjà solide de titres (traduction/doublage/sous-titre) avant de commencer à lancer leur dépense de marketing, ils investissent donc pas mal en amont à coup de OPEX (dégradant les indicateurs à court terme) pour la future croissance sur les nouveaux marchés.
Ainsi, on se retrouve depuis début 2021, à des SGA hors CAC entre 8M et 9M, notamment le passage du Q2 au Q3 qui a augmenté le CA de 1M à tout cassé pour une augmentation des SGA hors CAC de 0.8M, soit 80% du CA additionnel a été passé dans les SGA hors CAC, ce qui est beaucoup par rapport aux trimestres précédent.
Au final, ce qui fait que l’entreprise ne peut pas investir beaucoup dans les CAC, c’est cette augmentation des OPEX hors CAC depuis ce début d’année. Que je suppose être l’effet "stabilisation des effectifs" comme le disait le CFO.
De ce fait, je suppose que la croissance augmentera de manière plus drastique une fois que l’entreprise sera correctement staffé et pourra investir les $$ en excédent dans les CAC.
Pour info, pour 1M investi en CAC, cela donne environ 14-15k abonnés. Donc si l’entreprise dispose d’une poignée de million à investir dans les CAC, cela pourrait devenir très intéressant. Je pensais que 2021 serait l’année pour cela, mais j’ai sous-estimé ce besoin de restabiliser les effectifs et préparer la future croissance. Ce sera plutôt pour 2022 je suppose.
La nouvelle intéressante c’est surtout le churnrate. Au final, on se rend compte que le churn (la principale inquiétude du dossier à l’époque) doit être interprété par le principe des cohortes, chaque cohortes a sa propre "durée" de vie, elle dispose d’un churn important pour les 6 premiers mois environ et passé ce cap, les abonnés restent relativement sticky sur la durée. Ainsi on peut constater que le churnrate diminue de trimestre en trimestre, ce qui est une bonne nouvelle.
Elle perd sensiblement le même nombre d’abonnés par trimestre, alors que la base d’abonnés grandit dans la durée.
En 2019, on était à environ à 17% de churn par trimestre, alors qu’en 2021, on est plutôt à 11.2%, ce qui est très encourageant. La preuve, ils investissent ces derniers trimestres un montant équivalent de CAC, et la base abonnés continue à grossir. Ce qui fait que mécaniquement le % CAC sur CA continue à diminuer, ils visent un objectif dans les 35% à l’avenir. Ainsi s’ils parviennent à stabiliser leur SGA hors CAC (ils avaient annoncé une croissance de 1 pour 10 par rapport à la croissance du CA une fois atteint le bon niveau de staff), cela permettrait de dérouler la puissance du business model basé sur l’effet d’échelle. Et là, cela pourrait devenir bien juteux.
En parallèle, l’entreprise dispose d’actif caché, déjà ils investissent 20% de leur CA dans la création/acquisition de contenu, qui pourrait se monétiser de manière intéressante un jour. Ils ont leur base abonnés, qui a également une valeur sur le marché mais à la limite on s’en fiche. Et il y a les 10% de la participation dans la start up technologique suédoise, où ils ont l’air pressés à partager des informations. Pour le moment, ils sont sous une clause de NDA de 5 ans qui court depuis S2 2016, ainsi on peut s’atteindre que d’ici début 2022, on pourrait avoir des infos intéressante. On sait que les différents audit de l’entreprise n’ont enregistré aucune dépréciation de cet actif depuis son entrée dans le bilan (mais il est difficile d’en tirer des conclusions). J’ai lu des spéculations sur la potentielle valo de ce genre de participation, personnellement j’en ai aucune idée mais cela pourrait être un petit catalyseur.
Jirka est plutôt du genre à jouer l’incubateur de business (un peu comme les gros mastodontes de la tech comme Alphabet, Amazon, Alibaba etc. où ils peuvent investir des $$ pre-tax en OPEX pour tenter des innovations, ce qui est encore une des allocations les plus optimal en terme de capitaux car les buybacks ou capex sont investis en $$ post-tax). J’ai pu constater 2 filiales intéressante où ils recrutaient des chercheurs et commerciaux, genre une biotech et l’autre je ne sais pas trop comment la définir car il s’agit de vendre des appareils pour mesurer l’état de santé on va dire.
Ce que je peux imaginer d’ici quelques années, c’est une croissance beaucoup plus importante (pour moi 30% me semble largement atteignable à la vue du business model reste la question de la pertinence du TAM), le marché n’apprécie pas trop l’entreprise, est ce par un manque de compréhension du business ou alors une défiance par rapport au management par rapport aux changement d’objectif de croissance, ou alors le fait d’avoir sécuriser du cash à travers l’AK (pour rappel, le management a pas mal participé là dedans), ou tout simplement le contenu que propose GAIA est beaucoup trop hétéroclite pour la grande majorité des gens de la sphère financière. L’impression qu’on est dans une combinaison des 3.
En tout cas, un cours bas sera relutif à MT car ils ont l’air décidé à employer du buyback après que le business pourra autofinancer tranquillement leur 20% de CA en capex. Le short interest a drastiquement chuté depuis que l’entreprise est devenu profitable et accumule du cash à chaque trimestre (gestion très savvy à l’époque où les taux sont bas pour emprunter à moindre cout)
Pour moi, l’entreprise est clairement sous évalué et incompris (même si j’ai fait de nombreuses erreurs d’estimation, notamment sur le point d’inflexion où ils pourront investir massivement dans les CAC). Je continue à renforcer car je reste convaincu du futur potentiel que le marché ne semble pas bien comprendre (ou alors c’est encore moi qui me fait des illusions, mais l’avenir nous le dira d’ici quelques années). Les sceptiques concernant le contenu de GAIA pourraient continuer à se questionner sur l’étendue de la TAM (total adressed market).
Il y a toujours des risques qu’ils sont en train de corriger : comme le risque de "deplatform" (à l’ère de la cancel culture) c’est pour cela qu’ils construisent leur propre indépendance technologique, ou de risque que leur meilleur contributeurs/host puissent quitter la plateforme et passer à leur compte (une erreur qu’ils avaient fait il y a quelques années) où aujourd’hui ils arrivent à beaucoup mieux diversifier, les couts marketing qui peuvent exploser (CF Q4 2020 et qu’ils sont en train de corriger via leur propre programme d’ambassadeur).
Bref globalement, y’a des chantiers intéressants, à voir comment cela se traduira dans la durée, il faut surveiller chaque publications et s’assurer qu’on est bien dans les rails.
Il y a aussi le short interest qui a été divisé par 3 depuis que l’entreprise est passé FCF positif, vu que le bilan ne se dégrade plus, le churn étant limité, le downside est maintenant devenu une croissance molle et lente plutôt qu’une faillite ou autre AK à cours très dilutif.
Petite nouvelle hier : leur programme ambassadeur vient de recruter une célébrité, je ne m’attendais pas à ce genre de calibre quand ils parlaient de vouloir devenir de plus en plus indépendant des plateformes de publicité traditionnelles. Demi Lovato (je ne connais pas personnellement) est quand même une personnalité dans le top 25 de Instagram en terme de followers, soit dans les 120M abonnés, ce qui est vraiment énorme. Mais bon, on verra si cela se traduira par la conversion d’une partie de son audience dans la durée. Mais en tout cas, s’ils travaillent à trouver des ambassadeurs à plusieurs millions de followers, cela pourrait devenir très intéressant.
Voici un tableau qui résume les éléments de ces 3 dernières années, je vous épargne les années suivantes car chacun peut faire ses propres projections.
Il y a beaucoup à dire sur cette entreprise, je dirai que sa compréhension n’est pas des plus facile en premier lieu.
Il est clairement vrai que l’entreprise ne fait absolu pas rêver à travers un screener comme sur Zonebourse. De plus, l’esprit humain a souvent tendance à projeter le futur à travers la continuité du passé et présent, et je trouve que faire l’exercice à travers un screener sans avoir suivi l’ensemble des transcripts de ces 3-4 dernières années, cela pourrait être un exercice difficile (déjà qu’à titre perso, je m’y suis repris à plusieurs fois alors que j’ai étudié cette boite pendant plusieurs dizaines d’heures).
Déontologie : je détiens une position acheteuse/vendeuse sur une ou plusieurs société(s) listée(s) dans ce message.
Dernière modification par Zera (03/11/2021 17h28)