Plusieurs sociétés déjà évoquées sur ce forum, où certaines ont même leur propre file, ont un point commun: une forte, parfois énorme décote du cours sur ANR, ce qui incite évidemment à l’achat, sauf que la rentabilité nette (RoE, return on equity) est faible, ce qui justifie la décote et risque de la faire perdurer longtemps, rendant l’achat probablement peu judicieux.
Cette file ici se propose de recenser ces sociétés et de discuter brièvement leur situation.
Donc à vos plumes!
Je commence par quelques exemples:
- les 13 CRCAM (caisses régionales du Crédit Agricole), où la décote cours sur ANR atteint jusqu’à 70%. Autrement dit, le cours est parfois inférieur au tiers de l’actif net.
Mais le RoE, 3% à 4%/an est pathétiquement faible par rapport aux "bonnes" banques de la Zone Euro, où il tourne entre 8 et 10%/an et des Etats-Unis, où il dépasse, parfois fortement, les 10% par an.
Ce RoE est inhérent au modèle économique des CRCAM et au contexte de longue date en France, donc ne va pas changer de sitôt: leur activité principale est le crédit immobilier aux particuliers et aux entreprises, à taux trop bas, ce qui est catastrophique pour leur RoE.
La forte concurrence en France (des dizaines de banques en France, dans 8 groupes bancaires français différents, plus quelques étrangers) interdit au taux pratiqué de décoller. On le voit en ce S1 2020, où malgré la forte hausse des taux euro de marché, les taux des crédits immobiliers ont augmenté bien plus faiblement.
Dernier point négatif: absence de droit de vote, ce qui justifie une décote supplémentaire de 15 à 20% et impossibilité d’un changement de contrôle qui améliorerait la situation.
Point un peu positif: le dividende, même s’il est très faible par rapport à l’ANR, représente un rendement pas minable quand on le calcule par rapport au cours, car ce dernier est très décoté par rapport à l’ANR.
- Emperor International Holding à Hong Kong et Acanthe Développement à Paris, qui détiennent chacune des immeubles rapportant en brut 2% dans la première ville et 3% dans la seconde, car l’immobilier y est cher et la rentabilité locative très faible. En net après frais de gestion, c’est bien pire, car le management a la main assez lourde et les économies d’échelle sont faibles (foncières de petite taille).
Circonstances aggravantes: L’immobilier à Hong Kong, très cher, baisse depuis trois ans (mais sans s’effondrer) et la reprise en main par la Chine est un facteur négatif sur l’avenir économique de la ville.Emperor s’endette à 3 ou 4% par an, donc bien plus que la rentabilité nette de ses actifs, ce qui tue sa rentabilité nette après frais financier. Et la liquidité est faible et impossibilité d’un changement de contrôle (actionnaire principal détient 75% du capital) qui améliorerait la situation.
Idem pour Acanthe, où l’actionnaire principal à plus de 50% a une réputation sulfureuse depuis 20 ans, même s’il n’a pas lésé les minoritaires depuis 5 ans (il se serait assagi avec l’âge?). De plus, la rentabilité locative récurrente (loyers nets moins frais de gestion) est même durablement (légèrement) négative ! Seule la hausse régulière de la valeur des actifs permet d’afficher des résultats positifs. Mais on est probablement arrivé à la fin de ce cycle de hausse.
Circonstances favorables: la décote d’Emperor est colossale (ANR égal à 8 fois le cours).
Et Acanthe n’a quasiment pas de dette, ce qui supprime tout risque de liquidité et l’actionnaire semble être dans une démarche de liquidation. Il vend ses actifs un par un (mais il prend son temps à le faire …). Il lui reste 4 actifs à vendre, 3 à Paris et un à Bruxelles. S’il distribue ensuite vite le cash aux actionnaires, alors happy end pour les minoritaires. Le mauvais scénario est que la situation ne bouge pas et que les ventes s’arrêtent, laissant durablement la société avec sa faible rentabilité positive voire négative.
Mais bon, sur le très long terme, l’immobilier haut de gamme parisien d’Acanthe va conserver sa valeur et protéger de l’inflation, sauf appauvrissement durable de la France.
- Compagnie Lebon: holding où la décote est élevée et le RoE faible. La reprise de l’hôtellerie, principale activité, va-t-elle durablement améliorer la rentabilité nette et alors réduire la décote? J’ai quelques doutes …
- Tayninh: filiale "coquille vide" de la foncière URW. La décote n’est pas énorme (25 à 30%) MAIS il est très tentant en apparence d’acheter ce titre, car l’actif est du cash donc sans risque, prêté à la maison mère. Comme les taux euro court terme sont nuls ou négatifs depuis dix ans, le RoE est (faiblement) négatif sur cette période. Bref, l’attente de l’actionnaire minoritaire est inconfortable, entre des pertes (certes faibles) année après année, le risque d’être laminé par l’inflation, une liquidité quasi nulle (donc pas moyen de sortir si on achète) et URW qui semble se satisfaire de la situation actuelle qui a commencé il y a 15 ans, car elle veut garder en réserve, pour encore très longtemps peut-être, une coquille vide cotée.
Personnellement, pour les raisons ci-dessus, j’aurais tendance aujourd’hui à vouloir investir, pour de petits montants, dans Acanthe et Emperor, mais pas les CRCAM, Lebon ou Tayninh. Mais mon opinion peut changer à tout moment s’il y a des faits nouveaux. Sachant que je ne suis actuellement actionnaire d’acune de ces sociétés.
J’ai encore d’autres noms déjà évoqués sur ce forum, mais c’est à vous de compléter.
Message édité par l’équipe de modération (18/05/2022 12h01) :
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Dernière modification par aleph1 (18/05/2022 11h40)