Ma petite contribution sur les taux, du point de vue des investisseurs institutionnels. Marché différent donc car ils sont essentiellement présents sur le bureau / le commerce et la logistique, mais parfois aussi sur le résidentiel.
Depuis fin décembre, les taux auxquels ces investisseurs peuvent emprunter ont globalement triplé. Depuis 2019 et jusque fin 2021, un prêt classique pour un actif dit « Core » (un immeuble de bureau bien situé loué long-terme), à 5 ou 7ans (durées standard de financement sur ce marché) était d’environ 1-1.2% (soit un taux de base de 0% + une marge de, disons 1.2%).
Aujourd’hui, pour ce même actif, la marge est identique ou légèrement supérieure. En revanche, le taux fixe à 5ans, qui est le taux auquel emprunte la banque et qui est répercuté au client est passé de 0% (en fait il était négatif, mais la banque garde souvent le taux négatif pour elle) à 2.5%. Soit un coût total du crédit de 2.5% + 1.2% = 3.7%.
Résultat ? Eh bien le marché reste stable, en revanche le nombre de transactions chute, car le taux de rentabilité d’un immeuble core en région parisienne est entre 2.5% et 4% à la louche. Autant s’endetter à 1.2% fait sens, autant à 3.7% beaucoup moins.
Donc on arrive dans une situation où :
- les investisseurs qui cherchent des rentabilités élevées nécessitant un effet de levier ne sont plus acheteurs car emprunter n’est plus intéressant, et
- les seuls acheteurs sont ceux qui ont des objectifs de rendement plus modestes et peuvent se permettre d’investir entièrement en fonds propres. Typiquement, c’est le cas des SCPIs qui continuent à beaucoup collecter et sont « obligées » d’acheter des immeubles, même cher, car elles ont un rendement à servir à leurs souscripteurs.
- conclusion, les prix ne baissent pas ou peu mais le marché se fige. Certains vendeurs trouvent preneurs ponctuellement, les autre attendent leur tour en refusant, jusqu’ici, d’ajuster leur prix.
Dur à dire dans quelle mesure cette situation va se répercuter sur l’immobilier résidentiel pour les particuliers, mais la plupart des institutionnels s’attendent aujourd’hui à une correction.
Dernière modification par Sheeplooser (04/07/2022 23h37)