1 6 #1 03/12/2024 16h00
- AloneInKyoto
- Membre (2021)
Top 20 Année 2024
Top 50 Année 2023
Top 50 Année 2022
Top 5 Monétaire
Top 10 Invest. Exotiques
Top 50 Crypto-actifs - Réputation : 223
J’ouvre cette file pour compléter un message déposé il y a quelques temps et pour partager un point d’étape qui pourra intéresser la communauté des IH.
C’est quoi le problème ?
La CIPAV est la principale caisse de retraite et de prévoyance des professions libérales. Les architectes, ingénieurs conseils, experts, et de nombreux autres travailleurs non salariés y sont automatiquement affiliés pour leur retraite de base et leur retraite complémentaire.
Depuis 2009 et la création du régime de l’auto-entreprise c’est également la CIPAV qui a assuré la gestion de la retraite des micro-entrepreneurs (ex "auto-entrepreneurs") exerçant une activité libérale. C’est notamment elle qui a déterminé le nombre de points affectés annuellement à chaque cotisant ainsi que le décompte des trimestres validés.
Problème : jusqu’en 2022 inclus la caisse n’a pas respecté les textes de loi concernant le calcul et l’attribution du nombre de points à ses affiliés exerçant en micro-entreprise. Elle a interprété très librement les règlements existants pour inventer ses propres règles de calcul, ce qui a résulté en une division par 2 à 4 des points distribués.
La CIPAV a par ailleurs cumulé de nombreuses irrégularités de gestion au fil des années, comme l’a rapporté la Cour des Comptes qui a enquêté à plusieurs reprises. Les conclusions sont accablantes. Je ne les détaille pas davantage ici, on les trouvera en ligne sans difficulté.
Qui est concerné par la minimisation des droits ?
Tous les micro-entrepreneurs rattachés à la CIPAV pour leur régime de retraite et ayant exercé une activité libérale entre 2009 et fin 2022 sont concernés. Nous serions ainsi plus de 300 000 à voir nos droits à la retraite réduits par la faute de la caisse.
Une précision : les micro-entrepreneurs ayant débuté leur activité à compter de 2018 ne sont pas impactés. En effet, à partir de cette date, les nouveaux micro-entrepreneurs libéraux ont été rattachés au régime général, et non à la CIPAV.
Comment vérifier qu’on est concerné ?
Il est possible de télécharger un relevé de carrière depuis le site public info-retraite.fr après avoir préalablement créé un espace en ligne si pas déjà fait. On y trouvera le détail régime par régime avec le nombre de trimestres cotisés et le volume de points attribués, à la fois pour la retraite de base et la retraite complémentaire. Un exemple ci-dessous :
Est-ce que ça vaut le coup ?
Ça dépend de la situation de chacun. Plus on a passé de temps affilié à la CIPAV et plus le nombre de points manquants est important. C’est encore plus vrai si on a encaissé des CA élevés. À l’inverse, si on a eu une activité secondaire à faible CA ou qu’on a été affilié à la caisse pendant une courte durée, les points à récupérer sont probablement peu nombreux.
La période concernée court de 2009 à 2022. Le décret qui définit le nombre de points à attribuer selon le CA encaissé par le cotisant est applicable jusqu’à la fin de l’année 2022. À compter de début 2023 la loi a été changée pour modifier le mode de calcul.
Comment faire pour rectifier les points ?
La caisse ne reconnait pas son erreur et ne rectifie malheureusement pas d’elle-même les points sur simple demande. Il est nécessaire de lancer une action en justice pour faire valoir ses droits.
La juridiction compétente est le pôle social du tribunal judiciaire (ex TASS) dont dépend le cotisant. Au moins un cabinet d’avocats s’est spécialisé dans une procédure "sérielle" à bas coût. Il n’existe en effet pas de contentieux de masse en matière d’affaires sociales, ce qui oblige chaque cotisant à lancer individuellement sa propre action. Plusieurs centaines de micro-entrepreneurs libéraux ont déjà fait appel à ses services, dont votre serviteur à deux reprises.
La procédure est simple : il faut d’abord contacter la caisse par écrit pour demander un relevé de points, puis envoyer un courrier de réclamation indiquant que les données ne sont pas conformes à ce qu’on est en droit d’attendre compte tenu du niveau de CA. Soit la caisse reste muette, soit elle confirme sa position. Dans les deux cas l’avocat peut alors saisir le pôle social en démontrant que le cotisant n’est pas gratifié du nombre correct de points.
À partir de là et à ma connaissance il y a trois possibilités :
• le pôle social accepte la requête du cotisant, condamne la caisse, qui ne fait pas appel de la décision : elle s’exécute et rectifie le nombre de points
• le pôle social accepte la requête, condamne la caisse, mais celle-ci fait appel : il y a une étape supplémentaire dans la procédure auprès de la cour d’appel (mon cas dans une première action lancée il y a quelques années, même si finalement la caisse n’a pas fait ce qu’il faut dans les délais, ce qui a suspendu l’appel)
• le pôle social n’accepte pas la requête et confirme que la caisse est dans ses droits (c’est rare mais ça arrive) : c’est au cotisant de faire appel de la décision, ce qui entraine là aussi une phase supplémentaire auprès de la cour d’appel
À ce jour et d’après le cabinet, toutes les cours d’appel ayant eu à statuer sur l’affaire, soit 16 sur 16, ont tranché en faveur du cotisant en condamnant la CIPAV à rectifier les points. La démonstration semble donc solide et s’appuie notamment sur une décision d’un dossier équivalent monté jusqu’en cour de cassation en 2017.
Ça rapporte quoi ?
D’après le cabinet, les points de retraite complémentaire sont multipliés par 2 à 4 selon les situations individuelles et les calculs d’apothicaire de la caisse. Concernant la retraite de base, on peut espérer les multiplier par 1,3 à 1,5, mais seulement les années à faible CA du fait d’un mécanisme de plafonnement.
La première décision (favorable) m’a fait passer de ~200 points de retraite complémentaire à ~600.
La deuxième action (toujours en cours) me ferait passer de ~1100 points de retraite complémentaire à ~2200 et de ~3700 points de retraite de base à ~4000. C’est environ 400 € de pension supplémentaire chaque mois en retenant les valeurs actuelles des points.
Attention cependant, c’est probablement proche du maximum que l’on peut obtenir : je suis micro-entrepreneur à titre principal depuis 2013 et mon CA a été élevé plusieurs années.
Combien ça coute ?
À aujourd’hui j’ai payé 600 euros de ma poche pour les deux actions + quelques frais de courriers en recommandé.
L’avocat a perçu 1500 euros de frais de justice dits "article 700" qui ont été attribués par le pôle social dans le cadre de la première affaire. Ces frais ont été réglés par la caisse et versés directement au cabinet (c’était dans son mandat).
Si j’avais perçu des dommages-intérêts pour préjudice l’avocat en aurait gardé le tiers (c’est aussi dans son mandat) mais ça n’a pas été le cas jusqu’à présent.
Alors super, par contre je n’ai pas du tout envie de faire le beau/la belle dans un tribunal…
Le cabinet s’occupe de tout, y compris de représenter le cotisant lors des audiences en présentiel quand il y en a. Il n’y a qu’à suivre les différentes étapes transmises au fur et à mesure par mail. C’est objectivement très simple, le plus difficile est d’attendre (j’en suis à 18 mois pour la seconde action, la justice française est lente).
Je suis proche de la retraite, ou je suis déjà à la retraite : ça fonctionne aussi ?
D’après ce que j’ai compris le cabinet a développé une procédure un peu différente, peut-être parce que l’enchainement des étapes n’est pas exactement le même. Je n’ai pas les détails, n’étant pas dans cette situation. Le mieux est de prendre contact pour en savoir davantage.
Mots-clés : auto-entrepreneur, base, bnc, cipav, complémentaire, micro-entrepreneur, pension, profession libérale, retraite
Être célèbre sur internet c'est comme être riche au Monopoly
Hors ligne