Retour en Grâce de Coface ?
(Et ça rime en plus)
Hier, Coface a publié ses résultats annuels. Les quelques points à retenir sont les suivants :
- Le chiffre d’affaire annuel a augmenté de 4.6% à taux de change et périmètre constants.
- L’augmentation du chiffre d’affaire est tirée par l’assurance-crédit et principalement par l’effet volume (i.e. l’augmentation du chiffre d’affaire assuré), plutôt que l’effet prix (les taux appliqués aux assurés continuent à baisser).
- Le taux de rétention reste très élevé (91.1%) tandis que la production nouvelle est en deçà des années antérieures (116 millions de primes nouvelles vs. 130-140 million les années précédentes).
- Le ratio sinistres sur primes reste très bas et bien géré, puisqu’il s’élève à 41.7%, principalement tiré par les bonis de liquidation (diminuant le loss ratio de 34 points).
- Le ratio combiné, tiré par l’amélioration du ratio sinistres su primes, s’établit à 79.6% après réassurance, vs. 86.6% un an plus tôt.
- Le traité de réassurance proportionnelle est maintenu avec un taux de cession de 26%.
- Le résultat financier est un peu moins bon que prévu, principalement en raison d’un impact relatif aux impairments. Le taux de rendement moyen a baissé de 0.1 points pour atteindre 1.7%. En même temps, vue l’activité de Coface, c’est compliqué d’augmenter la duration du portefeuille pour aller grappiller quelques bps.
En termes d’allocation du capital, l’équipe dirigeante proposera en AG de redistribuer 100% du résultat net de la façon suivante : 60% (au moins) en dividende et le reste en rachat d’actions. La société devra d’ailleurs relancer un programme de rachat d’actions, puisque le seuil de celui de Novembre 2018 a déjà été atteint.
En termes d’allocation, ça serait donc 73 millions redistribués sous forme de dividende et 50 million sous forme de rachat d’actions. En termes de dividende par action, cella nous donnerait donc 0.474€ soit un taux de rendement d’environ 5.7% au cours actuel (8.2€ par action).
Par ailleurs, Coface est en discussion avec le régulateur pour faire valider son modèle interne partiel. En d’autres termes, cela permettrait à l’assureur de gagner quelques points de solvabilité, soit pour augmenter son exposition aux risques (et donc augmenter à priori ses revenus) soit pour relâcher à ses actionnaires du capital non-utilisé. Je mets tout ça au conditionnel, car l’ACPR est seul juge de la robustesse du modèle proposé. D’ailleurs, si elle ne juge pas le modèle assez robuste, elle peut soit le rejeter soit demander à ce que l’assureur considère une charge supplémentaire (un risk add-on), ce qui détériorerait le ratio de Solvabilité.
Et 2019 alors ?
Pour 2019, Coface a déjà annoncé continuer son plan Fit To Win, qui vise grosso modo, à faire mieux avec moins, i.e. réduction des coûts et des charges de personnels pour améliorer le ratio combiné.
La validation du modèle interne partiel sera un autre gros sujet, ainsi que la mise en place des nouvelles normes comptables IFRS17, qui va demander à la compagnie de faire quelques investissements pour la mise en place.
Restent quelques inconnues, qui pourront s’avérer être de bonnes nouvelles ou non. Côté oiseau de mauvais augures, la croissance économique. Je ne parle pas simplement d’un potentiel effet gilet jaune sur la croissance française et les défaillances d’entreprises, mais au niveau mondial. En fonction des différentes guerres économiques, récessions, le chiffre d’affaires et le résultat opérationnel de Coface pourraient se dégrader.
Deuxième point de questionnement : la croissance du chiffre d’affaires. Actuellement elle est tirée par le chiffre d’affaires des assurés (les primes perçues par Coface sont basées sur le chiffre d’affaire des assurés. S’il augmente, mécaniquement, les primes de Coface augmentent) alors que l’effet prix (le taux appliqué au chiffre d’affaires) est négatif. Le marché va sûrement vouloir que Coface trouve des relais de croissance. Si la croissance est nulle ou atone, attention au retour du désamour.
Côté positif, le dividende est couvert, les traités de réassurance ont été renouvelés à un prix moindre qu’auparavant et l’assureur va continuer à faire des efforts pour gérer les coûts. La grande inconnue est que va faire Natixis, en tant qu’actionnaire principal ?
- Hypothèse 1 : rien du tout. C’est une machine à cash, qui crache chaque année un dividende qui se voudra à l’avenir régulier ou croissant.
- Hypothèse 2 : racheter la société, puisque c’est la société semble décotée.
- Hypothèse 3 : vendre la société à un assureur en mal d’acquisitions et/ou de diversification.
A mon sens, l’hypothèse 2 a peu de sens, puisque Natixis avait cédé une partie de sa participation, lors de l’offre publique. Mais certaines sociétés ne sont pas connues pour leur bon sens et on pourrait s’attendre à un revirement de situation au gré d’un changement d’humeur. L’hypothèse 3 serait une bonne supposition mais se heurte à deux problèmes : le prix et l’acheteur. Il faut trouver un acquéreur (AXA par exemple ?) et se mettre d’accord sur le prix. Quoi qu’il en soit, on reste dans la fiction pure et pour l’instant, l’hypothèse 1 pour 2019 est celle qui prédomine.
Et maintenant, nous, petits porteurs ?
A l’heure actuelle, je garde mes titres, je suis plutôt satisfait des résultats. Acheter Coface, ce n’est pas s’attendre à une croissance des primes à deux chiffres. Acheter Coface, c’est attendre une résorption de la décote. Si mes souvenirs sont bons (à vérifier, j’ai parfois la mémoire vacillante), Allianz a racheté Euler Hermes pour plus de 1.5x la book value. A l’heure actuelle, pour Coface, nous sommes plutôt aux alentours de 0.7-0.8 mais avec un RoE moindre (12% vs 7-8% si je ne m’abuse). Dans le cas d’une amélioration de la rentabilité des fonds propres, la décote devrait se réduire. Mais bon, n’étant ni marabout ni cartomancien, cela reste de l’ordre de l’hypothétique. A chacun de voir midi à ses portes et de faire ses devoirs plus ou moins convenablement.
Déontologie : je détiens une position acheteuse/vendeuse sur une ou plusieurs société(s) listée(s) dans ce message.