3 22 #376 11/10/2019 18h37
- Scipion8
- Membre (2017)
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Je ne suis pas vraiment adepte des dividendes, pour 3 raisons :
a) je suis en phase de capitalisation
b) je n’aime pas particulièrement payer des impôts (donc je préfère les enveloppes capitalisantes)
c) je pense que se focaliser sur les dividendes est un biais destructeur de performance, et qu’il faut raisonner en termes de total return
Cela dit :
d) je pense qu’une entreprise qui verse, sans excès, des dividendes croissants est le plus souvent une entreprise saine (donc le versement de dividendes croissants n’est pas un signal insignifiant)
e) à côté d’enveloppes essentiellement capitalisantes destinées à la croissance de mon patrimoine, j’aime avoir une enveloppe distribuante, pour des raisons pratiques (par exemple les dividendes € de mon CTO France me servent à payer mes frais fixes en €, me permettant d’épargner l’essentiel de mon salaire en $)
f) et surtout, comme tout le monde, j’aime recevoir des dividendes ;-)
Je présente donc une approche axée sur les dividendes, dans l’univers des valeurs françaises (et quelques belges), avec différentes variantes. Pour cela j’utilise mon screener maison, qui couvre toutes (a priori) les valeurs françaises de capitalisation > 170 millions € : 267 valeurs au total.
Je procède par étapes : des filtrages successifs, un peu comme dans un processus de distillation.
1) Distribution des valeurs selon leur dividend yield (on m’excusera cet anglicisme, plus précis que le terme "rendement", qui selon moi devrait plutôt refléter la performance totale = total return)
Sur nos 267 valeurs, 53 ne distribuent pas de dividendes cette année. Je les exclus de la suite de l’analyse. 70 distribuent un dividende faible (<2%), 98 un dividende moyen (entre 2% et 5%), 46 un dividende élevé (>5%).
2) Visualisation des valeurs selon leur dividend yield et la croissance annuelle moyenne du dividende
Je compile l’historique des dividendes sur les 6 dernières années (2014-2019) (il s’agit des années de paiement des dividendes : par exemple les dividendes 2019 correspondent à l’exercice 2018).
Précision importante : j’inclus les dividendes exceptionnels dans mon historique des dividendes (cela explique certaines variations très importantes).
Ensuite je calcule la croissance annuelle moyenne du dividende sur la période 2014-2019 par la moyenne arithmétique des croissances annuelles du dividende (et non par une moyenne géométrique, qui rendrait mes résultats très sensibles aux dividendes des années 2014 et 2019).
Enfin, je mets en rapport cette croissance annuelle moyenne du dividende et le dividend yield, pour chaque valeur. La taille des bulles reflète la capitalisation.
3) Filtrage par les années de paiement du dividende
Nous ciblons des entreprises qui payent des dividendes de façon régulière, et non des entreprises qui vont alterner des phases avec dividendes et des phases sans dividendes (il y en a pas mal dans notre univers, notamment dans les secteurs cycliques).
Notre premier filtrage va donc consister à regarder le nombre d’années, sur les 6 de notre période de référence (2014-2019) pendant lesquelles chaque entreprise a payé un dividende (quel que soit son montant, quelle que soit son évolution).
Nombre d’années de paiement d’un dividende sur la période 2014-2019
Cette méthode de filtrage est peu sélective : 177 entreprises ont payé un dividende chaque année en 2014-2019 (les boules vert foncé), soit 66% de notre univers de valeurs.
4) Filtrage par la régularité de la croissance du dividende
Nous préférons les entreprises qui augmentent leur dividende chaque année, plutôt que des entreprises qui font des "pauses" (parfois prévues, souvent non) dans la croissance de leur dividende.
Notre 2e filtrage consiste ainsi à compter le nombre d’années d’augmentation du dividende sur la période 2014-2019 :
- chaque augmentation annuelle du dividende rapporte 1 point
- chaque année de stabilité du dividende rapporte 0 point
- chaque baisse annuelle du dividende coûte 1 point
Ainsi, une entreprise qui a augmenté son dividende chaque année sur la période 2014-2019 aura un score de +5. A contrario EDF (la vilaine boule noire sur le graphique), qui a réussi à baisser 4 fois son dividende sans jamais l’augmenter, a un score de -4.
Nombre net d’augmentations annuelles du dividende sur la période 2014-2019
Ce 2e filtrage est beaucoup plus sélectif que le premier : seules 41 entreprises (15% de notre univers) ont réussi à augmenter leur dividende chaque année. Un adepte du DGI (Dividend Growth Investment) se focalisera sur les boules vertes (scores +5 et +4), voire éventuellement sur les boules bleues (+3 et +2), s’il accepte des pauses (ou une fluctuation) dans la croissance du dividende.
5) Combinaison des 2 filtres paiement du dividende & croissance du dividende
On peut maintenant associer nos 2 filtres en ajoutant les 2 scores :
- le nombre d’années de paiement d’un dividende sur la période 2014-2019 (max. 6)
- le nombre d’augmentations annuelles du dividende sur cette période (max. 5)
Seules 38 entreprises (14% de notre univers) ont un score parfait de 11/11. 32 valeurs ont un score honorable de 10/11.
Score combiné paiement & croissance du dividende sur la période 2014-2019
6) Ajout de filtres variés pour définir des short lists selon différentes approches d’investissement
Pour cette dernière étape, nous allons être élitistes : nous n’allons considérer que les entreprises avec un score parfait de 11/11, soit seulement 38 valeurs (les boules vert foncé sur le dernier graphique ci-dessus). (Mais il y a aussi de jolies valeurs avec un score honorable de 10/11…)
a) Approche de maximisation de la rente immédiate
Pour cette première approche, nous visons la maximisation de notre rente annuelle immédiate pour un investissement de X k€. Nous allons donc retenir les valeurs avec les dividend yields les plus élevés sur notre échantillon réduit de 38 valeurs.
Top 10 rente immédiate
On trouve un mélange intéressant de foncières, de financières et de valeurs matures (mais pas trop…). Assez surpris de retrouver Imerys ici (je n’aime pas). Cette approche de maximisation de la rente immédiate est dangereuse si elle est appliquée aveuglément (-> sélection adverse de valeurs matures ou déclinantes dont le maintien du dividende est incertain), mais l’utilisation préalable de 2 filtres ici devrait au moins atténuer ce risque.
b) Approche DGI (dividend growth investing)
Pour cette 2e approche, nous sélectionnons les entreprises (de notre échantillon "élitiste") qui ont le plus augmenté leur dividende en 2014-2019.
Top 10 DGI
Hormis Iliad que je n’aime pas, il me semble que c’est une short list intéressante, néanmoins fortement pondérée en valeurs cycliques, qui ont largement bénéficié du contexte économique jusqu’en 2017, mais ont pas mal souffert depuis.
c) Approche value & dividendes
Pour cette 3e approche, nous sélectionnons les valeurs optiquement "les moins chères", celles avec les ratios de valorisation les moins élevés : nous utilisons ici le ratio VE/EBITDA. Cette approche est "aveugle" aux potentiels de croissance différents selon les entreprises et les secteurs, mais ce problème habituel des approches value (risque de sélection adverse) est ici atténué par l’utilisation préalable de 2 filtres dividendes.
Top 10 value & dividendes
Une liste intéressante mêlant valeurs cycliques (Faurecia, Plastic Omnium…) et valeurs mal-aimées du marché, pour des raisons idiosyncratiques (Iliad) ou sectorielles (Publicis, Imerys).
d) Approche croissance & dividendes
Pour cette 4e déclinaison, nous sélectionnons les valeurs (parmi les 38) ayant le plus potentiel de croissance future, sur la période 2018-2021, selon le consensus des analystes (il s’agit de la projection de la croissance annuelle moyenne sur 2018-2021).
Top 10 croissance & dividendes
On retrouve pour l’essentiel des valeurs magnifiques. Juste quelques petites réserves de mon côté sur Plastic Omnium (cyclique, mais pas chère actuellement) et Publicis (gros doutes sur le secteur).
e) Approche momentum long & dividendes
Pour cette dernière variante, nous sélectionnons les valeurs (parmi les 38) qui ont eu le meilleur total return (croissance du cours + dividendes accumulés) sur la période 2014-2019 (jusqu’au 30 juin 2019).
Je sais que les adeptes du momentum préfèrent calculer le momentum sur des fenêtres bien plus courtes, mais je suis un investisseur de long-terme (avec un horizon de 10, 20, 30 ans) et buy & hold donc le momentum de court-terme ne me semble pas pertinent pour moi. En revanche, cela m’intéresse de cibler des valeurs qui ont démontré sur la période récente une capacité à battre régulièrement les indices.
Top 12 momentum long & dividendes
Là encore, une liste de valeurs superbes. A mon sens c’est la meilleure liste, sans aucun cheval boîteux. J’ai élargi la liste de 10 à 12 valeurs pour montrer ma "chouchoute" LVMH : soyez l’actionnaire de référence d’une entreprise qui augmente chaque année, et quelles que soient les modes du moment, son chiffre d’affaires de 10% et ses profits / son dividende de 15%, et vous finirez par devenir l’homme le plus riche du monde. A mon sens c’est aussi la valeur idéale dans une optique de construction de rente sur le long-terme, pour nous autres apprentis ou candidats rentiers.
Ma conclusion générale :
a) même si l’on n’est pas un adepte des dividendes, la prise en compte de filtres sur les dividendes peut sans doute améliorer la qualité du stock-picking
b) l’utilisation combinée de filtres momentum long, croissance, voire value peut aider l’investisseur focalisé sur les dividendes, notamment pour éliminer des valeurs (trop) matures voire déclinantes, et éviter la myopie habituelle du dividend yield
Dernière modification par Scipion8 (11/10/2019 18h54)
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