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3 #1 05/01/2024 12h07
Je crée cette file pour expliquer comment se déroule une procédure contentieuse devant le CPH avec votre employeur au fond, en mettant de côté la procédure de référé qui est un peu différente et assez restrictive dans les faits.
Vous étiez salarié et votre relation de travail vient de se terminer dans des conditions qui vous restent en travers de la gorge ? C’est le cas typique (même si les saisines pendant que le contrat de travail court existent à la marge).
Vous avez la possibilité de saisir seul le conseil de prud’hommes de votre lieu de résidence, de votre lieu de travail ou du ressort de l’établissement de votre ex employeur. Dans la pratique, le Droit social étant une matière souvent compliquée, vous aurez tout intérêt à vous faire représenter soit par un syndicat via un défenseur syndical, soit par un avocat, spécialiste en droit du travail de préférence, que vous trouverez si vous ne savez pas où vous adresser via le site du barreau de votre département.
Si vos moyens financiers sont restreints, vous pourriez être aide financièrement : aide juridictionnelle totale ou partielle pouvant être accordée. A noter que dans le cas d’une totale, vous ne pourrez obtenir d’article 700 si vous gagnez votre procès (participation au remboursement des frais engendrés pour votre procédure).
Sitôt la saisine déposée, vous serez convoqué rapidement avec la partie adverse au BCO : bureau de conciliation et orientation. Ce dernier est composé d’un greffier et de deux conseillers, un employeur et un salarié. A ce stade, l’audience n’est pas publique et vous exposerez brièvement vos griefs auxquels votre ex employeur aura la faculté de répondre brièvement la encore dans une forme assez libre. L’objectif est de tenter d’engager un dialogue entre les parties amenant soit une conciliation le jour même consignée par PV mettant fin à la procédure, soit qu’un dialogue hors audience se noue pour un accord ensuite validé ou un abandon de la procédure.
Moins de 1 dossier sur 10 trouve a ce stade sa clôture définitive.
La plupart du temps, le bureau constate la non conciliation et renvoie vers le bureau de jugement à une date ultérieure avec un calendrier de procédure : à noter également que la plupart des avocats ne viennent pas pour concilier et ne s’en cachent guère en disant même je n’ai pas mandat pour cela…mais viennent juste chercher un calendrier de procédure.
Plus rarement, selon la nature du dossier, le bureau peut ordonner des mesures d’urgence, comme la communication avec astreinte de documents de fin de contrat non donnés par exemple.
Quand le dossier arrive en bureau de jugement, quelques mois plus tard, l’audience redevient publique. Vous serez convoqué comme nombre de dossiers pour une audience de mise en état : en clair, les avocats des parties seuls y viennent et négocient des délais supplémentaires en se répondant par écritures interposées à leurs conclusions. Le ping pong peut durer des mois, à savoir…Quand le bureau constate que plus rien ne semble justifier de report comme de nouvelles pièces à venir nécessitant de nouveaux développements, une date d’audience de jugement est alors fixée : à ce stade, il redevient important pour vous de venir en personne soutenir votre dossier, plus précisément pour répondre aux éventuelles questions des conseillers après les plaidoiries.
Le jour du procès, le demandeur par son conseil expose son dossier à 4 conseillers, conseil toujours paritaire moitié employeurs et moitié salariés. Un greffier est bien sûr présent également.
Le défenseur répond à son tour par une lecture résumée de ses conclusions. Le principe du contradictoire étant que seuls les éléments régulièrement échangés dans les conclusions écrites échangées entre les parties au préalable sont développés (personne ne sort de nouveau truc le jour même de son chapeau …)
A l’issue de l’audience, la présidence indique la clôture des débats et la date de mise à disposition du jugement.
Dans les coulisses, la formation du conseil se revoit ensuite pour délibérer les dossiers de l’audience : parfois plusieurs séances sont nécessaire selon la complexité du dossier à trancher. La décision doit reprendre chacune des demandes soulevées par les deux parties sans rien omettre : si un seul point ne dégage pas de majorité au vote dans le conseil, le dossier est mis en départage, ce qui se traduit par une réouverture des débats avec le meme conseil auquel un magistrat professionnel se joint en cinquième membre, ce sera donc lui qui aura la décision finale quelques mois après votre audience de procès.
A noter que les dates de mise à disposition des jugements peuvent être prorogées, parfois plusieurs fois, fonction du retard pris en interne.
Quand la décision est prise, le président du jour ou un de ses assesseurs rédige le jugement puis le transmet au greffe qui le remet en forme au besoin avant de le faire signer par le président d’audience.
Le jugement notifié, les parties ont la possibilité d’interjeter appel auprès de la cour d’appel du ressort de la première instance dans un délai de deux mois : vous êtes alors parti pour un second cycle d’échanges épistolaires sur le fond et la critique du premier jugement suivi d’un procès à la cour d’appel au minimum un an plus tard.
Une fois l’appel rendu, il reste une voie de recours plus étroite, la cassation : celle ci ne juge que le droit et son respect du texte et si elle casse renvoie ensuite vers une autre cour d’Appel. A noter que seuls quelques avocats (vous devrez sans doute en changer…) ont le droit de pourvoir en cassation.
Ce résume n’explicite bien sûr pas tout, son but est de décrypter grossièrement le chemin le plus classique d’un dossier de litige, ce que les avocats ne font pas toujours au premier contact pour prévenir leur client du parfois long chemin qui les attend.
Mots-clés : cph, délibere, litige, procedure, procès, social
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2 #2 05/01/2024 13h10
- Flavius
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A ce message je voudrais rajouter quelques pratiques que j’ai pu constater, de la part d’employeurs du secteur bancaire, qui peuvent éclairer celles et ceux qui songent à saisir le CPH.
Mes (nombreuses) expériences datent un peu, elles sont tirées d’une époque avant la réforme Macron qui plafonne les indemnités extra-légales. Avant cette époque, aller aux prudhommes pouvait aussi sembler être une "option quasi gratuite" pour de nombreux salariés du secteur bancaire licenciés dans l’après crise financière. D’un côté le coût d’un avocat pour toute la procédure était d’environ 5000 euros, et la durée , entre un et trois ans avec l’appel parfois systématique des banques. Mais d’un autre côté, la quasi certitude d’avoir le "tarif syndical" soit 6 mois d’indemnités pour des salariés gagnant parfois très bien leur vie.
Je n’ai vu qu’une seule fois une employée (indélicate) n’obtenir "que" 5 000 euros, soit même pas 1 mois d’indemnités; le mode de la distribution étant 6 mois, et parfois 1 à 2 ans de salaire brut dans les cas les plus choquants.
Il me semble que les établissements bancaires préfèrent -essentiellement pour le risque de réputation- une négociation avec en tête les repères ci-dessus. Mais d’autres préfèrent un système plus stressant: une offre avec un chiffre écrit sur une enveloppe, valable 5 minutes sinon pas de négociation.
La réforme Macron avait pour but de limiter les saisines quasi systématiques dans ces professions, compte tenu de l’engorgement des tribunaux. Il me semble que seules les situations de discrimination justifieraient de casser le plafond légal de nos jours.
C’est le risque de réputation qui pousse une banque à négocier.
Point important: en première instance ce sont des syndicalistes qui jugent, et mon expérience est qu’il n’y a pas vraiment d’étude approfondie du dossier mais davantage des pratiques, des tarifs pour des dossiers souvent expédiés (6 mois pour le secteur bancaire). Mais en deuxième instance il s’agit de magistrats plus à même de comprendre et de juger les spécificités juridiques d’un dossier. Mais difficile d’avoir un jugement avant 3 ans post saisine des prudhommes.
Et bien sûr, seules les pièces matérielles font foi, oubliez toute émotion dans ces procédures aussi lentes que glaciales…
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1 #3 05/01/2024 14h32
Concernant les conseillers en première instance, ils sont bien nommés par les syndicats salariés et employeurs. Pour autant, une formation initiale est désormais obligatoire et chaque collège propose ensuite de la formation continue aux conseillers, de très bon niveau par ailleurs (prof de fac et avocats spécialisés). Si les lonesome cow boys existent encore, ils restent le plus souvent très vite mis en minorité et à l’index quand le reste de la formation est de bon niveau, il y a une forme d’éthique commune inhérente à la fonction.
Concernant les appels, il me semble que le taux de confirmation de la première instance au national est en gros de 50% : une chance sur deux…. Si les deux cours sont distinctes, elles se parlent pour autant notamment sur les bonnes pratiques des cas types : quand la communication est bonne, le taux de confirmation en appel dépasse 90%, mais ce genre de stats n’a rien d’officielle ….
Pour le déplafonnement du barème Macron, il est vrai qu’a la suite de la réforme nombre de dossiers ont fleuri avec du harcèlement discrimination fort peu solide dans les faits…dans le but de faire déplafonner : à double tranchant car souvent l’analyse ne tient pas et c’est le reste du sérieux du dossier qui peut être traité par dessus la jambe. Mon impression personnelle est plutôt à un retour à la normalité sur cet item. Quelques dossiers dans la presse ont fait écho de décisions s’affranchissant du barème au titre de la souveraineté du conseil : cela fait moins de bruit ensuite, mais à ma connaissance tous ont bien sûr été infirmés ensuite.
Concernant la mauvaise publicité pour un employeur, je constate que seules les décisions de cour appel et cassation sont consultables sur pappers justice : en gros, la première instance n’étant pas publiée, un employeur voulant reste masqué aurait tout intérêt à ne pas faire appel d’un dossier puant ou à le négocier en amont. J’ai aussi entendu parler (sans jamais en être témoin direct) de renégociation entre avocats d’une décision de première instance plutôt que de partir en appel….
Dans la partie « entre avocats » couverte par leur secret pro, c’est un autre monde et fort possible qu’une offre soit valable 10 minutes ou une semaine …c’est de la négociation… à noter que le CPH peut homologuer aussi des transactions entre parties qui referment le litige et toute possibilité de recours ultérieur en toute discrétion …
Concernant la procédure « tout bénéfice » pour le salarié, que j’appelle moi la roue de la fortune…c’est assez vrai avec deux bémols : au delà d’être débouté de tout, un demandeur de mauvaise foi manifeste peut aussi se voir condamner à indemniser son ex employeur d’un article 700, mais aussi même si plus rare, d’une amende civile pour procédure abusive. Cela existe, il faut en être conscient !
La procédure est orale en théorie et je vous rejoins que dans la pratique ce sont pourtant les écrits qui comptent (les pièces du dossier) dans la prise de décision.
Sur l’ambiance générale, tout depend des protagonistes : certains avocats savent mieux que d’autres créer de l’empathie dans leurs plaidoiries, ce qui ne change pas pour autant le process de décision sur le fond, le plus souvent très factuellement.
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#4 06/01/2024 06h42
- durand18
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serenitis a écrit :
Dans la partie « entre avocats » couverte par leur secret pro, c’est un autre monde et fort possible qu’une offre soit valable 10 minutes ou une semaine …c’est de la négociation… à noter que le CPH peut homologuer aussi des transactions entre parties qui referment le litige et toute possibilité de recours ultérieur en toute discrétion …
Je veux bien croire qu’il existe des pratiques de cowboy dans certaines entreprises (ce qu’évoquait Flavius) mais je n’ai jamais vu une offre valable 10 minutes entre avocats … rien que matériellement c’est quasi impossible et dans tous les cas une aberration en termes de responsabilité professionnelle et de déontologie.
Il n’y a peut être qu’en audience de BCO où des conseillers peuvent inviter une partie à réfléchir quelques minutes à une offre sortie du chapeau …
Pour le reste merci pour le thread, perso j’ai une sainte horreur du CPH à chaque fois on a l’impression de jouer à la roulette russe ! Mais bon je ne suis pas spécialiste …
Désolé mais des taux de réformation en appel de 50% que vous évoquez c’est absolument énorme.
Et rien que le taux d’appel prouve bien que les décisions sont difficilement acceptées par les parties :
Le nombre d’affaires nouvelles a été divisé par 2,5 depuis 2008. Pourtant, la durée de traitement demeure « excessive » : 16,3 mois en moyenne en 2021, quand ce délai n’était que 9,9 mois en 2009. Le taux d’appel est de 60 % sur les jugements au fond, bien plus important que pour les autres contentieux civils. Également rendue par des juges non professionnels, le taux d’appel dans les tribunaux de commerce n’est que de 15 %.
La Cour des comptes critique les réformes des prud?hommes - Social | Dalloz Actualité
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#5 06/01/2024 10h34
- Spotlight
- Membre (2020)
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Quelques réflexions personnelles (avocat, uniquement d’employeurs), sans prétendre à l’exhaustivité, notamment sur la recherche d’une issue amiable
En pratique, j’ai bien 50% de mes dossiers qui se règlent de manière amiable, dont une bonne partie avant même que le CPH ne soit saisi. Pourquoi ? On est en capacité de procéder à une analyse de risque assez fine, et de proposer un chiffrage précis à nos clients (à l’exception des questions ayant trait aux heures supplémentaires). On peut donc régler un dossier rapidement, à un prix convenu, tout en s’évitant des décisions "surprenantes" de CPH. Bref, c’est de la gestion de risques.
Les échanges entre avocats sont confidentiels, et facilitent beaucoup de choses. En revanche, les propositions valables 10min, jamais vues. En pratique, et notamment pour des questions de responsabilité, toute proposition adverse est répercutée par écrit à son client, et on n’accepte jamais une proposition/ne formule une contre-proposition qu’avec l’accord écrit de son client. Ce qui peut prendre du temps.
Beaucoup de discussions ont lieu avant l’audience de conciliation, et, avant celle-ci, on sait (très souvent) si on va ou non concilier. Personnellement, sauf à de très rares exceptions (lorsque le salarié n’a pas d’avocat, et qu’on n’a donc pas pu discuter de manière confidentielle au préalable), je ne négocie jamais lors de l’audience de conciliation, je préfère le faire en "off". L’audience est donc purement formelle : soit pour homologuer un accord (déjà négocié en amont), soit pour prendre un calendrier de procédure.
On peut même trouver un accord entre avocats avant que le CPH ne soit saisi, et décider de le saisir afin d’homologuer notre accord, puisque cette homologation bénéficie d’un régime social favorable (sur les questions de la rupture du contrat).
serenitis a écrit :
A noter que seuls quelques avocats (vous devrez sans doute en changer…) ont le droit de pourvoir en cassation.
C’est même une certitude, ce seront des avocats différents !
"L'expérience est une lanterne que l'on porte sur le dos et qui n'éclaire jamais que le chemin parcouru" - Confucius
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#6 06/01/2024 11h30
Avis tout personnel sur le taux d’appel bien supérieur au CPH qu’au TC : le TC juge des litiges entre "pro", et cela change tout à mon sens en terme d’acceptation de ce jugement. Le pro (le plus souvent) reste globalement plus rationnel dans sa gestion du risque final que le "salarié" qui est lui plutôt dans l’émotion en lien avec mon job, ma vie..que dans le droit si je puis le résumer ainsi.
Leur public bien différent me semble la première cause de cet écart.
A noter par ailleurs que le cumul des deux mandats sont interdits pour un conseiller : il faut quitter l’un pour rejoindre l’autre…
Autre facteur (amha) engendrant un taux d’appel important : la qualité ou non qualité de la rédaction du Jugement. Il me semble qu’une décision contrariante pour une partie, si elle est solidement argumentée dans sa rédaction finale, brise un peu l’émotionnel et permet de se recentrer sur le Droit. Par la même, l’avocat de la partie appelante aura davantage de difficultés pour rédiger une critique sérieuse du premier Jugement…
Je signale aussi que les décisions rendues en première instance avec une valeur de moins de 4 ke ne sont pas susceptibles d’appel, ce qui a pu causer quelques abus..
Concernant le taux de réforme en appel : si la formation initiale via ENSM est désormais obligatoire, il reste nombre de "vieux" conseillers, il est possible de faire 5 mandats consécutifs soit entre 15 et 20 ans dans le même CPH…et comme partout, la qualité n’y est pas du tout linéaire…
A titre purement personnel et non réprésentatif, j’ai observé une corrélation entre de gros taux d’appel d’une section et le turn over des conseillers dans la même section : le sentiment latent de mauvaise justice rendue laissant des traces …
Si le délibéré est bien sûr protégé du secret, cela n’empêche pas d’observer sur la durée.
Dit autrement un lonesome cowboy peut causer bien des dégâts plutôt invisibles pour le justiciable.
Concernant la négociation entre parties, l’avis de Spotlight est instructif, même si sa confraternité lui occulte que pour négocier il faut être deux ^^ : combien d’avocats font trainer l’instance davantage dans l’intérêt de leur facture finale que celui de leur client sur des dossiers pourtant faciles à démêler qui auraient eu tout intérêt soit à concilier, soit à être abandonnés en cours de route au vu du fiasco assuré ?
Autre mauvaise pratique de la profession, si on dénonce souvent les lenteurs de la Justice, ils en sont les premiers responsables ! Demande de délais sans cause réelle, partie adverse qui ne s’y oppose pas..courrier au greffe… quand ce n’est pas juste pour attendre que leur facture en cours soit bien réglée par leur client avant d’aller plaider… si le conseil s’agace, il peut radier…mais l’avocat réinscrira l’affaire donc cela ne sert pas à grand chose dans les faits.
L’an dernier, j’ai eu écho d’un dossier ouvert sous la présidence Sarkozy, non encore sorti de la première instance, cela reste tout à fait exceptionnel avec ses raisons propres, mais ca existe !
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#7 06/01/2024 14h12
- Spotlight
- Membre (2020)
Top 20 Entreprendre - Réputation : 68
serenitis a écrit :
Concernant la négociation entre parties, l’avis de Spotlight est instructif, même si sa confraternité lui occulte que pour négocier il faut être deux ^^ : combien d’avocats font trainer l’instance davantage dans l’intérêt de leur facture finale que celui de leur client sur des dossiers pourtant faciles à démêler qui auraient eu tout intérêt soit à concilier, soit à être abandonnés en cours de route au vu du fiasco assuré ?
Je le dis souvent : "pour négocier, c’est comme pour jouer au tennis, il faut être deux !"
Je ne dis pas que ça n’existe pas (vous n’êtes pas le premier à en faire état), mais je suis toujours surpris de ce genre de pratiques :
- les avocats de salariés sont (souvent) rémunérés au résultat : un dossier clôturé (et donc facturé) rapidement, c’est toujours très intéressant ;
- les négociations et conclusions d’accords peuvent être très bien valorisées par les avocats d’employeurs. Les entreprises cherchent bien souvent de la prévisibilité et de la stabilité (régler un litige à un montant convenu, avec éventuellement un échéancier de règlement négocié, de manière non-publique, etc …).
Et, pour l’avoir vécu, en tant qu’avocat se prendre une (très) mauvaise décision est toujours difficile à gérer vis-à-vis du client. Donc si un dossier mérité d’être négocié, toutes les parties ont intérêt à au moins envisager cette voie.
serenitis a écrit :
Autre mauvaise pratique de la profession, si on dénonce souvent les lenteurs de la Justice, ils en sont les premiers responsables ! Demande de délais sans cause réelle, partie adverse qui ne s’y oppose pas..courrier au greffe… quand ce n’est pas juste pour attendre que leur facture en cours soit bien réglée par leur client avant d’aller plaider… si le conseil s’agace, il peut radier…mais l’avocat réinscrira l’affaire donc cela ne sert pas à grand chose dans les faits.
L’an dernier, j’ai eu écho d’un dossier ouvert sous la présidence Sarkozy, non encore sorti de la première instance, cela reste tout à fait exceptionnel avec ses raisons propres, mais ca existe !
Là encore, je ne dis pas que ça n’existe pas, mais ça peut être "stratégique".
Le règlement amiable d’un litige permet au salarié d’obtenir relativement rapidement une somme d’argent ; on peut "l’inciter" à entrer en négociation en faisant, dans la mesure du possible, retarder les choses.
Ou, autre hypothèse : un salarié a constaté une irrégularité dans son entreprise, et engage une procédure devant le CPH. Moi, employeur, je n’ai pas intérêt à le reconnaître parce que cela créera un précédent vis-à-vis des autres salariés, qui me réclameront la même chose.
Ma stratégie sera :
- de modifier la pratique de l’entreprise, pour l’avenir ;
- et de faire durer le contentieux le plus longtemps possible avec le salarié qui a initié la procédure, pour dissuader les autres salariés d’également engager un recours, afin de purger les délais de prescription.
Chaque dossier est différent, mais ça fait parties des "armes" procédurales à envisager.
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#8 06/01/2024 17h10
Spotlight,
Il me semble que votre métier en est en fait deux assez différents entre avocat employeur et avocat salarié, même job mais deux logiques très différentes.
L’avocat employeur travaille une relation de longue haleine avec son client qui lui confiera d’autres dossiers sur la durée, et parfois en préventif sur des accords d’entreprise ou du risque social.
L’avocat du salarié, sauf exception, ce sera un one shot…donc relation bien différente, d’autant qu’entre l’aide juridictionnelle et les participations des assurances …son client (dans 95% des cas demandeur) ne sera que très partiellement le payeur. Si on ajoute que pour beaucoup leurs prescripteurs sont les centrales syndicales, ils soigneront plutôt souvent leurs relations avec ces dernières (formation de défenseur à prix préférentiel etc..) qui construiront leur clientèle sur la durée.
C’est ainsi à mon sens une des raisons du n’importe quoi qu’on croise parfois : demande non étayée, mauvais calculs dans le préjudice, oubli flagrant d’autres demandes pourtant légitimes à lecture du dossier, contre argumentation molle et demandes tous azimuts qui ne tiennent pas 10 secondes l’analyse pour faire plaisir au client qui lui ne comprend pas grand chose au truc.
Humour de conseiller : quand on nous martèle, vous verrez dans les pièces….ben souvent y a rien quand on les étudie ensuite…
Humour bis : plus le dossier est épais, plus il est hors sujet : 10 cm étant souvent un red flag !
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#9 06/01/2024 17h30
- Flavius
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Sur les pratiques de cow-boy évoquées, je précise le contexte.
J’ai pu en être témoin d’une façon ou d’une autre dans deux banques, l’une française l’autre étrangère. C’est arrivé à de nombreuses personnes dans le secteur. Des licenciements individuels ou en série.
C’est au moment de l’annonce du licenciement, donc avant la procédure de prudhommes.
Il n’y a donc pas de conseil présent; le RH montre un chiffre et informe que l’offre est valable 10 mn; si elle n’est pas retenue il n’y aura pas de négociation avec l’avocat que prendra le salarié licencié. Le chiffre griffonné est jeté à la poubelle et "see you in court". La banque ne se prive pas d’informer qu’elle fera systématiquement appel et que la procédure durera donc des années Il y a donc une pression énorme au moment où le salarié est en situation de choc émotionnel. Le salarié sort de la pièce avec un chiffre modique ou une longue procédure à venir…
Inutile de vous dire que j’ai vu des comportements déplacés de tous les côtés, mais je suis heureux de n’avoir jamais été directement impliqué dans ce genre de pratiques méprisables.
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