Il n’y a pas toujours une corrélation négative entre les taux courts et les cours des REITs.
Il est tout à fait vrai que les années passées, de baisse continue des taux, ont été très favorables : compression des cap rates et augmentation des NAV, accès à des financements bon marché, des opportunités à saisir à la pelle au sortir de la crise de 2009 etc. Le contexte n’est plus le même (encore qu’on pourrait dire que le marché européen ressemble beaucoup au marché US de 2011 et regorge donc d’actifs à saisir – raison pour laquelle de plus en plus de REITS US viennent investir de ce coté de l’Atlantique) et il faut ajuster son optique d’investissement en conséquence.
Certaines des questions à se poser sont :
- quel est le comportement historique factuel (et non fantasmé) des REITs en période de remontée des taux sur ces 20 dernières années ? Comme vous le voyez ci-dessous, sur 16 périodes de remontées des taux depuis 1995, 12 ont amené les REITs à des total return positifs. Le marché est plus difficile depuis mi-2013 et le taper tantrum mais de manière générale, en se basant sur VNQ, le total return est positif. On voit cependant se creuser l’écart de performance entre les types de REITs…
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- Des données intéressantes d’un point de vue historique : remontons jusqu’en 1971 (mais, encore une fois, les REITs d’alors ne sont pas directement comparables à ceux de 2015) :
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On en retiendra surtout qu’en cas d’augmentation massive de l’inflation et des taux courts (de 4% en 1977 à 19% en 1981) les REITs ont été positivement corrélés aux taux courts : 110% de gains sur cette période, dividendes inclus. On oublie souvent que les REITs sont aussi des hedges précieux en cas d’inflation forte…
- quelle serait la raison de la remontée des taux ? Une forte inflation ? Il y a alors des REITs dont les baux sont parfaitement adaptés : les baux courts, indexés directement sur l’inflation profiteraient pleinement de ce scénario. Les REITs résidentiels, industriels, investis dans l’hôtellerie ou le self-storage sont à privilégier. A contrario, les REITs triple net ou healthcare en pâtiraient du fait de leurs baux très longs et aux revalorisations souvent capées (vers 2-3%/an). Ce que je veux mettre en avant c’est qu’il faut distinguer entre les types d’actifs et les types de baux, tous ne réagissent pas de la même façon dans un contexte donné.
- le marché actuel est assez largement un marché de substitution : comme l’obligataire ne rapporte plus grand’ chose (enfin, potentiellement si, mais il faut sortir des sentiers battus et/ou prendre un risque de crédit/duration) les investisseurs se reportent mécaniquement sur tout ce qui rapporte du rendement. Ils pourraient délaisser les REITs dès que les taux longs seraient à nouveau attractifs. Historiquement, le rendement des REITs se comparent aux obligations corporate BAA. Il s’agit de surveiller le marché obligataire, même si le spread n’est pas constant dans le temps :
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- On oublie trop souvent que les REITs ne sont pas un produit de taux mais bien des entreprises ! Leurs dividendes ne sont que le reflet de leur performance opérationnelle : les loyers encaissés, l’optimisation des G&A, la gestion active de leur patrimoine (achat, vente, repositionnement, développement, de plus en plus de participations directes dans les opérations sous-jacentes depuis le RIDEA act de 2007 etc.) sont bien plus importants que le simple niveau des taux courts. C’est, in fine, la croissance du GDP, le niveau du chômage et l’état de l’offre/demande de biens disponibles sur le marché qui va déterminer l’évolution de la performance opérationnelle, donc du FFO, donc du dividende et in fine du prix des actions des REITs.
A titre d’illustration : la dernière période de remontée des taux courts US, de 1 à 5 % :
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La capacité des REITs à augmenter leurs dividendes est cruciale pour les années qui viennent. Ce sera probablement moins le cas au Canada qu’aux USA. Au Canada, je surveillerai vraiment le bilan (ratio LTV, maturité de la dette vs. baux, % d’unencumbered assets etc). Les REITs canadiens dans leur ensemble ont maintenu un dividende relativement inchangé depuis la crise de 2009 mais ont substantiellement amélioré la qualité de leurs bilans. Le marché y est beaucoup moins favorable qu’aux USA actuellement (Alberta sous pression à cause du pétrole bas, le départ de Target du Canada a impacté tout le secteur retail, les bureaux sont sous pression du fait de l’arrivée de nouvelles constructions sur le marché etc). Riocan se traite à 15 x les FFO versus 18 x pour O. En comparaison globale : 17 x les FFO pour les REITs US pour 12.7 x les FFO au Canada. Mais n’est-ce pas le moment de se demander ce qu’il en sera dans 3-5 ans ? Une idée à explorer : un $CAD faible attirera mécaniquement des investissements industriels US au Canada…
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Il y a une petite décote sur NAV sur ces 2 marchés pris dans leur ensemble (les US ci-dessous, à titre d’illustration ; Brookfield estime actuellement à 8% la décote sur NAV du marché canadien) :
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Cette moyenne cache évidemment des situations individuelles disparates que l’investisseur avisé voudra investiguer.