Bonjour AleaJactaEst,
Je connais ce dossier sans doute bcp moins bien que vous, mais tout ce que j’y vois suggère une sérieuse crise de liquidité :
1) substitution de financements en blanc par des financements collatéralisés : remplacement de toutes les facilités en blanc (1,795 milliard $) par une ligne de crédit collatéralisée (plus petite) de 1,185 milliard $, avec maturité en juillet 2023, et collatéralisée par les meilleurs malls de CBL. J’ai tendance à interpréter négativement la réduction de ces lignes de financement : un signe que les banques ne voulaient pas s’engager davantage et/ou qu’il n’y avait pas assez de collatéral disponible.
2) réduction des actifs disponibles (unencumbered) : avec la collatéralisation de tous les financements, il y a moins d’actifs disponibles pour des ventes, alors que les ventes d’actifs avaient apporté 100 millions $ en 2018
Moody’s (22 février 2019) a écrit :
A majority of CBL’s higher quality assets, including its tier 1 and tier 2 malls, are encumbered and/or pledged as collateral to the facility, reducing the company’s financial flexibility. (…)
The B1 senior unsecured debt is one notch below the corporate family rating, which reflects the substantial secured debt in CBL’s capital structure and the fact that most of its assets are mortgaged or pledged to the senior secured credit facility.
3) renchérissement des financements collatéralisés : 2 prêts collatéralisés de 3 ans (extensibles au maximum jusqu’en 2025) de 57 et 58 millions $ ont été renouvelés au prix d’une augmentation de 25 points de base du taux
4) incapacité à racheter des actions ou préférentielles supposément "peu chères" :
Stephen Lebovitz (CEO), 1er mai 2019 a écrit :
We realize that there are numerous creative uses for cash across our capital structure and our equity and bond prices remain extremely attractive for buyback. However, we believe that maintaining maximum liquidity to operate our business and fund redevelopment should remain our priority.
5) rapprochement dangereux des seuils de covenants de la dette senior : après la mise en place de la ligne de crédit collatéralisée, le ratio dette collatéralisée sur total actifs est de 35% pour une limite de 40% : cela limite fortement la flexibilité de CBL en cas de chocs sur sa liquidité
6) risque de dévalorisation des actifs, réduisant la capacité de refinancement : il faudrait creuser les conditions des financements collatéralisés pour savoir si les banques pourraient demander des actifs supplémentaires en cas de dépréciation des actifs fournis en garantie
7) suspension du dividende : perso je parierais qu’elle durera plus de 2 trimestres, et en tout cas il semble y avoir une grosse incertitude sur le niveau du dividende après la période de suspension
8) la communication de l’entreprise, qui aborde toujours en premier la situation de liquidité. Evidemment, cette situation de liquidité critique, bien comprise par le management de CBL, explique pourquoi il n’y a jamais d’achats d’insiders…
Bref, si le risque d’une faillite à court terme (avant 2023) a été réduit par la mise en place de la facilité collatéralisée, la marge de manoeuvre de CBL, en termes de liquidité, n’a cessé de se réduire. Cela signifie que CBL a une flexibilité très réduite pour restructurer son business, et une faible résilience à des chocs (par exemple en cas de ralentissement économique US).
Avant d’entrer sur les actions ou les préférentielles, il faut donc à mon sens bien comprendre ces problèmes de liquidité, qui transforment CBL en pari "tout ou rien", fortement risqué. Perso, je reste bien à l’écart : je suis peu sélectif sur mon stock-picking, mais des problèmes de liquidité sont un de mes critères éliminatoires, auquel je ne fais aucune exception.
Dernière modification par Scipion8 (05/05/2019 16h33)