C’est bien sûr à chacun de déterminer s’il recourt à ce prêt, car c’est une analyse à faire au cas par cas. Voici néanmoins quelques questions qui vont pouvoir alimenter votre réflexion.
1) un prêt, pour quoi faire ? Si vous avez seulement les yeux qui brillent devant cet argent qui tombe du ciel, sans savoir quoi en faire, il ne faut pas le prendre. Il faut avoir un plan précis, qui inclut bien sûr une projection sur la façon dont cet argent servira à dégager de la valeur d’une part, et pourra être remboursé aisément d’autre part.
2) Quel est le niveau de risque de ce que vous envisagez ? Quelle est la probabilité que votre entreprise soit plus fragile avec le prêt (et ce que vous envisagez de faire avec) que sans ? Pouvoir "tenter des trucs" avec de l’argent emprunté, ça ne finit pas toujours bien. Et, tout simplement : maintenir l’activité grâce au prêt de trésorerie, si la demande n’est pas là, ça va seulement vous faire des stocks de produits finis et du déficit à la fin de l’année. L’absence de prêt peut avoir l’avantage de vous forcer à couper un maximum de charges, donc couper aussi la production, ce qui est peut-être la meilleure chose à faire si la demande n’est pas là (réflexion à adapter au cas par cas, bien sûr).
3) L’utilisation pressentie est-elle compatible avec votre image publique ? Pourrez-vous le supporter, lorsque la presse locale / mediapart /les réseaux sociaux / un syndicat / Le JT / les ragots locaux ou n’importe quel autre média exposera de partout "untel a utilisé le prêt coronavirus à tel usage" ? Tout finit par se savoir. Attention au risque d’image, qui peut aller jusqu’à perdre des clients ou avoir des difficultés à recruter.
Il est évident qu’il y aura des abus, et il est évident qu’il y aura des dénonciations et des scandales publics.
Alors, êtes-vous droit dans vos bottes ? Pourrez-vous le rester ? Pensez-vous pouvoir convaincre de votre bonne foi si le projecteur de l’attention médiatique se dirige vers vous ?
4) un prêt, à quelles conditions ? L’Etat fait rarement un cadeau sans contrepartie. Or, ces conditions ne sont pas forcément connues à l’avance. On l’a vu avec le report des échéances fiscales et sociales : Bruno Le Maire a annoncé le 12 mars le report des échéances "par un simple mail". Vers le 27 mars, il ajoute "en fait, les entreprises qui ont demandé le report des échéances n’ont pas le droit de verser de dividendes, sinon elles devront payer les échéances avec pénalités de retard". Voilà comment on ajoute, 15 jours plus tard, une condition a posteriori. Ca vous donne un avant-goût. Attendez-vous à ce que le préfet ou le centre des impôts vous dise un jour "dites, vu que vous avez bénéficié du prêt, voilà ce qu’on attend de vous…".