On parle beaucoup de comment la remontée des taux d’intérêts des obligations "high grade" va impacter les rendements des fonds euros des assurances-vies. Je me suis donc amusé à faire un petit calcul grossier pour essayer d’estimer l’impact de ces remontées de taux sur la capacité des AV à augmenter le rendement des fonds euros.
Ce calcul se base sur les données d’entrée suivantes:
- TME Taux Moyen Emprunt d’Etat (Source Banque de France)
- Historique des rendement des AV (1,9% pour 2022 est une estimation à confirmer)
- Historique des rendements des actions (MSCI World) et immobilier (rendement+PV SCPI)
- Encours et collecte nette fonds € (Source ACPR, à partir de 2010)
- PPB Provision pour Participation aux Bénéfices (Source MoneyVox, manque 2022)
Pour comparaison (pas utilisé dans le calcul):
- Taux livret A
- Taux inflation
Entre 2000 et 2010, n’ayant pas trouvé les données, j’estime un encours qui augmente régulièrement de 3% par an. Cela n’a de toute façon pas beaucoup d’impact sur le calcul (calcul plus précis à partir de 2010).
On calcule en premier le montant investi (col D, Md€) - c’est l’estimation du montant du portefeuille obligataire qui arrive à échéance, ajusté de la collecte nette (col C). En gros c’est le montant sur l’année que l’assureur doit placer sur des fonds obligataires. On prend l’hypothèse qu’il est placé au TME de l’année en cours. Pour les années inférieures à 2010 c’est une estimation basée sur 10% de l’encours de l’année N-10, ajusté de la collecte nette. Pour les années après 2010, c’est la moyenne sur 5 ans des montants investis sur les années N-8 à N-12, ajusté de la collecte nette de l’année en cours. Bien évidemment l’assureur utilise une échelle obligataire, on utilise donc le TME de l’année en cours comme base pour estimer le rendement moyen. La courbe des taux aura un impact, mais encore une fois cela ne doit pas beaucoup influencer le calcul. Je suppose que la duration moyenne de l’échelle obligataire est de 10 ans.
On en déduit le rendement théorique obligataire (col I, %). Il est calculé comme la moyenne des TME des 10 années précédentes, pondéré par la colonne D (montant investi). Le rendement global (col J, %) est composé de 90% du rendement obligataire, de 5% des 3 dernières années du MSCI et de 5% du rendement total (loyers+revalorisation) des SCPI. Je suppose une répartition moyenne et stable dans le temps de 90% d’obligations, de 5% d’actions et de 5% d’immobilier (les sources que j’ai trouvé sont assez variables sur la composition).
Ce rendement théorique global est ensuite comparé au rendement réel (col E et K, %). En vert le rendement théorique est supérieur au rendement servi par l’assureur: l’assureur se fait une marge et peut augmenter sa PPB. En rouge le rendement théorique est inférieur: l’assureur doit "taper dans la caisse". On en estime après 2022 l’impact sur le PPB (col L et M, %), en prenant ce delta -0.5% de "frais de gestion". On constate qu’historiquement les assureurs ont du bien vivre, vu la différence entre le théorique et le rendement! (je prend en compte la PPB).
Le calcul est paramétrisé par les cellules jaunes, et est déterminé par les projections suivantes sur les prochaines années:
- Collecte nette et rendement réel servi sur les fond € des AV
- TME (rendement obligataire moyen)
- Rendements actions et immobilier (impossible à déterminer, je prend une moyenne conservatrice).
La copie d’écran correspond à un scénario "moyen":
- Décollecte pendant 2 ans, suivi d’une collecte nette
- Rendement de 3% en 2024, puis baisse lente
- TME au max à 3.5% en 2024, puis en décrue
On peut faire plein de scénario différents: optimiste ou pessimiste, comment les taux évoluent, comme la collecte évolue etc… Chaque scénario a un impact différent sur le rendement obligataire estimé, et in-fine la capacité des AV à "servir du rendement" pour concurrencer les taux sans risque. Paradoxalement, les taux élevés sont une mauvaise nouvelles dans tous les cas.
De ce que je constate dans ce calcul, quelque-soit les scénarios, c’est la lenteur de la remontée des rendements théoriques, et surtout l’incapacité des AV à servir un rendement au delà de 3% dans les 5 prochaines années sans solder la PPB très rapidement. Il est intéressant également de voir l’impact de la collecte/décollecte nette sur cette évolution (assez limitée en réalité).
Ce calcul est bien évidemment une moyenne "globale" et une approximation (par manque de données plus précise), et qu’il faudrait l’adapter assureur par assureur. Je suis preneur de vos retours et remarques, notamment sur la méthodologie et les calculs.