Maître, je vous remercie pour vos explications. J’ai bien compris votre logique.
Mais il y a deux logiques qui s’affrontent et il me semble que les deux sont entendables.
Raisonnons par l’absurde. je modifie un peu mon exemple précédent. Liquidités dans la succession : 120 000 €. Droits à payer par Enfant (par exemple sur la partie immobilière de la succession : 120 000 €. La veuve a 70 ans et a encore 20 ans à vivre.
Cas 1) Le défunt a testé : "les liquidités, à mon enfant". Donc, l’enfant reçoit 120000 €, paie les droits de mutation avec, doit de plus payer 30 % (supposons qu’elles sont dans cette tranche) de droits de mutation sur ces liquidités (120000 x 30 % = 36000 €), il ne lui reste rien des liquidités de la succession et il doit piocher 36000 € dans son épargne. Bilan des liquidités disponibles après l’opération : Maman 0, Enfant -36000 €.
Cas 2) le défunt a testé : "des liquidités, l’usufruit à ma femme, la NP à mon enfant". Donc, la veuve reçoit 120000 € (en franchise de droits), et décide de les garder. L’enfant doit sortir 120000 € d’épargne pour payer les droits de mutation. Bilan des liquidités disponibles après l’opération : Maman 120000, Enfant -120000. Créance de restitution 120000 €.
Cas 3) Idem cas 2) sauf que la veuve décide d’utiliser les liquidités pour payer les droits de mutation de l’enfant. Bilan des liquidités disponibles après l’opération : Maman 0, Enfant 0. Créance de restitution réduite d’autant = zéro.
Pour les 20 ans à venir, dans le cas 2, la veuve a 120000 € de liquidités dont elle a jouissance et qu’elle peut notamment faire fructifier. Tandis que l’enfant n’a plus ses 120000 € d’épargne qu’il ne peut donc plus faire fructifier.
Dans le cas 3), au contraire, la veuve n’a plus de liquidités. Elle ne peut pas en disposer, elle ne peut pas les faire fructifier. Dire que, dans le cas 3), la veuve ne s’est pas appauvrie par rapport au cas 2, ça me semble faux. En fait, cas 3 = cas 1 = il n’y a pas d’usufruit. Avantage du cas 3 : Enfant n’a pas eu à payer les droits de mutation sur les liquidités (36000 €) contrairement au cas 1.
Dire que 120000 € aujourd’hui c’est pareil que 120 000 € dans 20 ans, c’est dire que l’usufruit n’a pas de valeur. Or, l’usufruit a de la valeur. En payant les droits de mutation de Enfant, la veuve a renoncé à la valeur de cet usufruit. Et on voit aussi que la veuve a évité à Enfant de payer les droits de mutation sur les liquidités elles-mêmes.
Autre façon de raisonner sur le même sujet : plusieurs intervenants de ce fil disent : "c’est comme un prêt". Justement. Raisonnons sur le cas suivant (indépendamment de toute succession) : Maman de 70 ans prête 120000€ à Enfant. Ils font un contrat SSP : prêt in fine, taux zéro, remboursement de la totalité de la somme dans 20 ans. Maman meurt au bout de 20 ans moins un jour. Enfant n’a jamais eu à rembourser. Les Impôts vont l’interpréter comme une donation. Un tel cas a déjà été jugé. Il a été jugé qu’un prêt, sans volonté de rembourser du vivant du prêteur, c’est une donation à la date où le prêt a été consenti. Pourtant la somme prêtée était bien équilibrée par une créance de même montant, n’est-ce pas ? Pourquoi est-ce que la même logique n’est pas appliquée au quasi-usufruit ? je ne sais pas.
J’entends bien que les impôts acceptent cela, et que c’est avantageux pour les enfants qui en bénéficient. Tant mieux pour les contribuables qui bénéficient de cette tolérance. Néanmoins, je ne pense pas que ça soit aussi logique que ce vous dites. Je pense qu’en pratique, il y a bien un abandon d’usufruit. Je pense qu’en pratique, en payant les droits de mutation des enfants, le parent survivant dispose de moins de liquidités, et notamment ne peut pas les faire fructifier et en consommer les fruits, donc il s’appauvrit. Et que l’enfant économise sur les droits de mutation qu’il devrait payer s’il percevait lui-même ces liquidités. Mais bon, si ça passe comme ça, tant mieux.
Dernière modification par Bernard2K (09/02/2024 10h06)