Pour répondre à ce commentaire :
Patrick a écrit :
Et que pensez vous d’Amazon eu égard a l’évolution de votre stategie?
C’est bien l’anti action value par excellence. Un PER de 77 il n’y a pas si longtemps, aucun dividende,
Et pourtant une croissance hallucinante, une organisation pour tuer toute la concurrence.
Ne pas en avoir , c’est une évidence pour qui fait une analyse rationnelle. Mais est ce bien sérieux tout de même? On en parle très peu sur le forum…
Au départ, Amazon était un détaillant en ligne qui ne gagnait pas d’argent, voire en perdait. On peut d’ailleurs s’interroger sur la concurrence déloyale induite par le fait de perdre de l’argent pour croître à tout prix, tandis que les petits acteurs ne peuvent se le permettre.
Aujourd’hui, Amazon est avant tout 1) une entreprise technologique avec AWS, 2) une plateforme eCommerce qui prend des commissions substantielle sur la vente de produits tiers (50% des produits vendus sur Amazon seraient des produits tiers) et 3) un optimiseur fiscal.
1) AWS est la pépite du groupe, rentable et en croissance, et est archi-dominant, devant le cloud de Microsoft et loin devant le cloud d’Alphabet.
2) La plateforme eCommerce a construit une position quasi-monopolistique, et de nombreuses personnes achètent uniquement sur Amazon, et sont plus fidèles à Amazon qu’à un produit ou à une marque.
Je l’ai vérifié avec le confinement, puisqu’une partie des produits de notre TPE sont vendus sur Amazon et sur notre boutique en ligne. La suspension des ventes sur Amazon n’a entraîné aucun report sur notre boutique en ligne. J’ai aussi constaté que mettre des produits 10% plus chers sur Amazon, ne créé pas non plus de report sur notre boutique : les gens pensent que sur Amazon c’est moins cher, et qu’il n’y a pas besoin de comparer.
Fort des statistiques de ventes des produits tiers, Amazon est également capable de repérer les produits qui se vendent bien, d’estimer leur marge, et de se positionner ensuite comme vendeur de produits équivalents.
Initialement déficitaire, la plateforme prend maintenant une commission conséquente (18%) sur chaque vente des vendeurs tiers, et peut donc aussi vendre en compte propre les produits les plus rentables.
3) Amazon optimise complètement sa fiscalité, pour le dire poliment. La fameuse taxe GAFA dont il était question un temps n’a toujours pas été appliquée, puisque D. Trump a menacé de taxer les vins français. De la même façon, quand en France des frais de port avaient été imposés à Amazon pour éviter une concurrence frontale avec les libraires, Amazon a mis en œuvre des frais de port de… 0,01 euro !
Pour autant, si Amazon veut ouvrir un entrepôt ou de nouveaux bureaux, tous les acteurs locaux se battent pour les avoir…
Nous avons donc une entreprise très difficile à réguler, mais que l’on n’hésite pas non plus à courtiser, preuve de sa puissance !
Conclusion
Le moat d’Amazon est énorme. Probablement le moat le plus gros avec Alphabet (qui chaque année vole un peu plus de contenus des sites Web en toute impunité, et impose de fait d’acheter de la publicité sur Google Adwords pour conserver de la visibilité).
Son prix est à l’avenant, avec un PER 2020 prévisionnel dépassant les 100 !
Le principal risque est législatif. On devrait imposer à l’entreprise une scission entre AWS et la plateforme de vente en ligne, même si à ce stade, cela ne changerait probablement plus grand chose, puisque les deux divisions sont leaders sur leur marché. De toute façon, il est peu probable que cela soit mis en œuvre, étant donné que les USA protègent en réalité leur GAFA, puisqu’ils contribuent à leur puissance géopolitique.
A titre personnel, je n’investirai de toute façon jamais sur Amazon, pour des raisons éthiques. Il y énormément d’hypocrisie derrière cette société. Je tiens également en assez piètre estime Jeff Bezos, riche à crever, mais qui continue à payer au lance-pierres les personnes qui travaillent dans ses centres-logistiques.