Perso j’ai tendance à décomposer mentalement (mais aussi en pratique) mon patrimoine, selon son usage de destination, un peu comme Faith avec sa séparation Corp / Life (mais de façon moins structurée que lui). Tant que je travaille, mon portefeuille boursier est consacré essentiellement à la capitalisation, et je serais très réticent à devoir vendre pour financer des projets de vie (une exception étant les dividendes sur les actions françaises de mon CTO, que j’utilise pour payer mes frais fixes en France, ce qui me facilite la vie car mes revenus professionnels sont en USD).
Je veux pouvoir gérer mon portefeuille boursier avec pour seules boussoles la recherche de performance et la gestion du risque, si possible sans devoir prendre des décisions de vente liées à des contraintes personnelles. D’où ma préférence pour des liquidités de précaution importantes (livrets / PEL pour des besoins ponctuels du type maladie / voyages etc., fonds € pour des achats immobiliers).
De même, selon ce principe de séparation, je n’envisagerais jamais de liquider mes fonds € pour profiter d’éventuelles opportunités en bourse. Si vraiment je voulais augmenter ponctuellement mon exposition à la bourse (au-delà de ma capacité d’épargne), je préfèrerais utiliser la marge (avec le risque qui va avec), plutôt que de liquider mes fonds €.
Je pense qu’au moins en phase de capitalisation, vouloir former un portefeuille boursier selon des contraintes de vie (e.g. recherche de dividendes, ventes pour financer des dépenses etc.) risque de conduire à des choix de stock-picking sous-optimaux en termes de risque et de performance. En phase de rente, c’est différent bien sûr, mais à ce moment-là j’intégrerais sans doute des obligations (y compris à haut rendement) dans ma stratégie patrimoniale, afin d’avoir des rentrées de cash régulières.
Pour finir, je pense que le besoin de liquidités de précaution dépend de multiples critères personnels :
a) gestion passive ou active du portefeuille boursier : certains ont une gestion active, et font régulièrement varier la part de liquidités dans leur portefeuille. Perso, au contraire, (1) je préfère une gestion passive (je déteste vendre, sauf OPA/OPR), (2) je déteste encore plus vendre quand j’y suis obligé, (3) je veux être investi à 100% en permanence, et (4) je suis très réticent face au coût fiscal et à la complexité fiscale découlant des ventes.
b) aversion au risque de marché : certains peuvent gérer correctement, sur un plan psychologique, un krach boursier avec une baisse des indices de 50% ou 60%, même avec une très forte exposition aux actions ; d’autres (et c’est mon cas) préfèrent, dans l’éventualité d’un tel scénario, avoir le confort psychologique d’avoir une bonne partie de leur épargne en fonds €. C’est parce que j’ai ce confort psychologique que je suis prêt à encaisser des chocs en bourse et que je veux être à 100% investi sur cette partie de mon patrimoine (= je ne joue pas sur une part de liquidités).
c) stabilité personnelle : en couple, on doit composer et être prêt à répondre aux demandes du partenaire. Par exemple en ce moment, je subis une grosse pression de ma compagne pour m’installer à Bruxelles (son lieu de travail) : avoir 300k€ en fonds € pour un possible achat immobilier là-bas simplifie au-moins l’aspect financier de ce dilemme.
d) stabilité professionnelle : à lire certains, j’ai l’impression qu’ils ont une garantie absolue sur la stabilité de leur emploi (y compris géographique) et qu’ils savent que jusqu’à la fin des temps ils seront dans leur région actuelle, dans leur RP actuelle, avec leur partenaire actuel, leur emploi actuel, et leur salaire actuel (ou mieux). J’envie bcp cette stabilité, mais perso la vie m’a plutôt enseigné que tout cela est fragile et qu’il vaut mieux se préparer financièrement à différents scénarios de vie (positifs ou négatifs).
Ces divers facteurs me conduisent, dans l’optique d’un projet familial, à préférer un niveau élevé en fonds € (330k€ actuellement, soit 17% de mon patrimoine, et je préfèrerais 500k€) et en pures liquidités de précaution (PEL et livrets, 93k€ soit 5%). Au-delà, ça ne me gêne pas d’être fortement exposé aux actions. Mais c’est à chacun, selon sa situation et ses préférences personnelles, à trouver son équilibre et la bonne composition pour son patrimoine.