3 #1 04/03/2014 22h13
- AndreK
- Membre (2012)
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Je lance cette file pour partager quelques informations dont je n’ai trouvé qu’une petite partie sur le net et l’essentiel auprès de mon notaire.
J’illustre avec la situation de mon couple mais elle est classique et vous pouvez généraliser sans problème. Elle s’applique au droit français.
Que les experts pardonnent et corrigent mes approximations juridiques et terminologiques ; je corrigerai le post au besoin.
Nous sommes un couple avec des enfants mineurs et sommes mariés sous le régime français de la communauté d’acquêts (dans notre cas les acquêts constituent l’intégralité du patrimoine).
Nous comptons à moyen terme tirer l’essentiel de nos revenus de notre capital (et pour une petite partie par la pension de retraite "légale" lorsque nous aurons atteint cet âge lointain).
Dans cette situation la problématique est qu’au décès du premier conjoint (appelons-le A), le survivant (B), suite à la succession, peut perdre la maîtrise d’une partie du patrimoine et une partie de la rente générée.
Rappel : le conjoint B récupère sa part du patrimoine (50%) et soit (cas 1) l’usufruit d’un quart du patrimoine de A (le reste étant attribué en pleine propriété aux autres héritiers), soit (cas 2) 100% de l’usufruit du patrimoine de A (selon une loi assez récente). Le choix entre les cas 1 & 2 étant fait par le conjoint B lors de la liquidation de la succession.
Dans le cas 1, B ne reçoit plus qu’une partie de la rente avant décès.
Dans le cas 2, il en reçoit l’intégralité.
Dans les deux cas, il ne peut librement administrer, vendre ou consommer la nue-propriété des biens (portefeuille financier, immobilier, liquidités) dont il a l’usufruit (je simplifie grandement, l’idée est qu’il doit veiller à la bonne conservation du bien).
La résidence principale constitue un cas particulier : le conjoint B bénéficie d’un droit d’habitation, mais le perd s’il change de résidence (je crois que c’est plus subtil que ça, mais ce n’est pas l’objet du post).
Il est donc dans l’intérêt du conjoint survivant (mais pas des autres héritiers) de disposer de l’ensemble du patrimoine en pleine propriété pour garantir ses revenus.
Au moins 2 solutions sont possibles :
- adopter le régime matrimonial de la communauté universelle : soit lors du mariage ou soit par modification du régime. Inconvénients : pas adapté à toutes les situations professionnelles (un conjoint est chef d’entreprise par ex.), coûts notariés élevés (basés sur la valeur du patrimoine), moins souple dans le partage du patrimoine que la solution suivante ;
- inclure une clause de préciput (terminologie exacte : aménagement du régime matrimonial par introduction d’une clause préciputaire) : un acte notarié est établi indiquant que le conjoint survivant peut disposer de tel ou tel bien ou tel montant au 1er décès et hors succession. Si un bien appartenant en bien propre à l’un des conjoints est inclus dans la clause, sa valeur rentre dans le calcul des frais. La rédaction de la clause est souple. Dans notre cas elle est la suivante :
acte notarié a écrit :
§Préciput en faveur du survivant des époux : En cas de dissolution de la communauté par le décès de l’un des époux, et seulement dans ce cas, le survivant d’eux aura le droit de prélever sur la communauté, par préciput, avant tout partage, tel que prévu par les articles 1515 et suivant du code civil, à son choix exclusif, la totalité ou une partie des biens suivants ou des biens qui leur seraient subrogés.
Le survivant peut ainsi disposer de l’ensemble du patrimoine (pour chaque bien il choisi la pleine propriété ou l’usufruit ou la nue propriété) ou renoncer à une partie et la laisser aux autres héritiers. D’autres clauses précisent des situations comme l’incapacité ou la réversion d’usufruit.
Dans les 2 solutions aucun droit de succession ne sera à régler, mais des frais de 2.5% du montant transmis seront quand même à payer. Par contre lors de son décès l’abattement sur la succession (i.e. 100k€/enfant aujourd’hui) ne s’appliquera que pour lui et pas pour le conjoint précédemment décédé ; si le capital n’a pas été consommé les droits de succession seront donc plus élevés que dans le cas où on reste dans le régime légal.
Les frais d’établissement d’une clause de préciput sont barêmés et, hors inclusion d’un bien propre, se montent à ~800€ aujourd’hui (frais de publication inclus).
Jusqu’ici tout est simple et le coût raisonnable, mais la présence d’enfants mineurs complique l’opération. Ainsi dans cette situation l’aménagement du régime matrimonial doit être homologué par un juge aux affaires familiales (qui vérifie que les droits des enfants ne sont pas lésés). Il faut donc faire appel à un avocat (spécialisé dans le droit de la famille) afin de présenter une requête au TGI de son domicile.
Pour les enfants majeurs, une lettre recommandée suffit.
La procédure est standard, les arguments présentés au juge rôdés. Le coût est variable selon l’avocat : par chez nous il est entre 1200€ TTC et 1500€ TTC.
Dans notre cas nous aurions pu attendre la majorité de notre dernier enfant pour engager cette procédure, mais cela nous fait attendre encore 8 ans, pendant lesquels un malheur peut arriver.
L’opération se monte donc à ~2000€, son gain immédiat est nul, mais simplifiera la vie lorsque l’inéluctable surviendra.
J’amenderai ce message en terme de frais et délais lorsque la procédure sera achevée (pour notre tribunal, on nous annonce 6 mois).
Un conseil : prenez avis auprès de votre notaire (c’est gratuit) et si vous vous sentez concernés, pour réduire les frais et délais, engager les démarches nécessaires avant qu’un enfant n’arrive ou après qu’il soit parti.
Et vous, quels sont vos choix pour la protection du conjoint (y compris non marié) ?
Edit :
Au terme de toutes les procédures, les délais et coûts définitifs sont les suivants :
- aménagement "simple" (sans enfants mineurs ni bien propre à intégrer) : frais notariés = ~700€, délai = 1 mois
- aménagement en présence d’enfants mineurs : frais notariés = ~950€, frais d’avocat = ~1200€, délai jusqu’au jugement d’homologation = 11 mois (+ 3 mois pour la signature des derniers actes auprès du notaire ; mais c’est bien la date du jugement qui officialise l’acte).
NB : le délai jusqu’au jugement est probablement compressible ; il est dû à une situation particulière de notre tribunal.
NB2 : il ne faut pas hésiter à relancer le notaire et l’avocat, ils ont tendance à prendre leur temps.
Dernière modification par AndreK (06/05/2015 21h39)
Mots-clés : mineur, préciput, régime matrimonial, succession
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