Je reviens sur une de mes "marottes" : la surévaluation du marché US.
Comme je l’ai expliqué à plusieurs reprises sur ce fil, le Per de Shiller me semble le meilleur indicateur pour juger de la valorisation générale d’un marché d’action. En lissant les bénéfices dans le temps et en tenant compte de l’inflation, il permet d’investir à contre-cycle. Ainsi, en mars 2009, le per instantané du S&P500 était stratosphérique (largement au-dessus de 100) en raison de l’effondrement des résultats des sociétés mais le per de Shiller était particulièrement bas, donnant par là même un signal d’achat sur ce qui s’avérera être le meilleur moment pour acquérir des actions pour toute une génération d’investisseur.
Quand je lis ou écoute plusieurs investisseurs éclairés/analystes traiter de la valorisation du marché US sur base du S&P 500, ils arguent que le per de shiller n’est pas si élevé que cela, ce qui n’est pas vraiment faux. Il s’établit aujourd’hui autour de 30 alors que la moyenne depuis début 2010 se situe à 27,75. Une petite dizaine de pourcents de surévaluation, on a vu bien pire …
Ce dont ils ne tiennent pas compte, c’est du fait que les taux d’intérêt à long terme se situe largement au-dessus de leur moyenne sur la même période : 4,2 % aujourd’hui contre une moyenne de 2,3 % depuis 2010.
Aujourd’hui, la prime de risque du PER de Shiller du S&P500 est donc négative de 0,8 % contre une moyenne de + 1,30 % depuis 2010. Si les taux à 10 ans se maintiennent au niveau actuel, il faudrait donc une baisse de +/- 40 % du S&P500 pour revenir à la moyenne des 12 dernières années ! A moins que les taux LT ne baissent entrainant alors une hausse du cours des obligations. C’est ce raisonnement qui me fait penser qu’un investissement en obligation US représente un rapport "rendement/risque" aujourd’hui plus favorable qu’un investissement dans le S&P500.
Mais d’autres observateurs du marché arguent du fait que si la valorisation du S&P500 est élevée, c’est surtout à cause des "ANTMAMA" (ènième nouvel acronyme aux GAFA pour désigner Apple, Microsoft, Nvidia, Google, Tesla, Meta et Amazon) et que le reste du S&P500 est valorisé raisonnablement …
Etudions donc les PER de Shiller par secteur.
L’écrasante majorité des secteurs du S&P500 cote largement au-dessus de leur Per de Shiller des 12 dernières années : non seulement la tech mais aussi la consommation cyclique, la pharma, l’énergie, l’industrie et les utilities. 6 des 10 grands secteurs de l’indice américain sont surévalués dans une période de taux d’intérêts qui ne devrait pas être favorable aux surévaluation. Si on examine les secteurs sous-évalués, on trouve les banques (peut-être le secteur qui présente le plus d’incertitude à l’heure actuelle), l’immobilier (hyper sensible aux taux long) et les communications (mais qui, en 2010, sortait d’une période de "bulle" et trainait un per de shiller artificiellemet gonflé à l’hélium).
Bref, il me semble particulièrement difficile d’attribuer à la hauteur de la prime de risque actuel le fait que la hausse du S&P500 a été portée par une poignée d’actions … L’essentiel des sociétés qui le compose sont aujourd’hui surévaluée.