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1    #926 15/05/2021 14h04

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@Korben
Je ne vois pas dans cette file un intervenant utilisant le mot "vieux" de manière péjorative.
Il me parait étrange que chacun doive adapter son vocabulaire parce qu’une personne semble considérer ce mot commun comme dégradant.

N’y voyez pas d’attaque, juste une incompréhension,
Un jeune bien conscient qu’il deviendra vieux.

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#927 15/05/2021 14h05

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INTJ

@Korben : Quand on parle(ait) de la "ménagère de moins de 50 ans" il s’agissait de la maîtresse de maison et non pas d’une femme de ménage (technicienne de surface… ?). Comme cette catégorie socio-professionnelle déjà menacée économiquement a été impitoyablement moquée et méprisée jusqu’à ce qu’elle soit désormais en voie d’extinction dans notre belle République, on parle désormais de "FRDA-50" : femme responsable des achats de moins de 50 ans.

C’est vrai que dans notre société souffrant d’un jeunisme imbécile, "vieux" est devenu une insulte au lieu d’un simple constat. Visiblement l’élément de langage favorisé actuellement est "nos anciens", qui donne un côté "dos argenté" et photos sépia à la chose.

J’aimais bien la simplicité de Daniel Guichard, pourtant.


✯ Mangia bene, caca forte, e non aver paura della morte.

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#928 15/05/2021 14h29

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Le Chat dans sa sagesse :

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#929 15/05/2021 14h49

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rasmussen a écrit :

"GoodbyLenine a écrit :

Ce n’est pas parce que plus de monde est conscient de qui possède ou contrôle les médias, ou s’en plaint, que la situation est différente d’avant !

Tout de même différente d’il y a 20 ans, maintenant que même Le Monde et Mediapart appartiennent à Xavier Niel.

Je n’ai guère le temps de réagir en détail à vos propos (et je constate que d’autres l’ont déjà fait sur pas mal de points, même si je ne suis pas vraiment d’accord avec pas mal de ces "réactions").

Mais là vous relayez une fake news, et écrivez juste une contre-vérité. Vous devriez vous renseigner un minimum sur "à qui appartient Mediapart" (ici par exemple) pour réaliser que ce n’est nullement à X.Niel (même si certains utilisent encore parfois le fait que XN avait apporté une fraction très minoritaires des fonds lors de la création du journal, pour tenter de le décrédibiliser, ou juste discréditer tous les médias ou alimenter des thèses complotistes).


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#930 15/05/2021 15h06

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Je suis assez surpris de voir la démocratie moderne comme facteur déflationniste.

C’est au contraire pour éviter  des dépenses publiques excessives (et créatrices d’inflation) par des politiciens démocratiquement élus que, si j’ai bien compris, des économistes comme Milton Friedman ont défendu l’indépendance des banques centrales.

La démocratie peut parfaitement amener au pouvoir des politiciens adeptes de la MMT (dont on peut supposer les préconisations inflationnistes) tout comme les transferts monétaires directs récemment expérimentés aux USA semblent avoir un effet inflationniste au moins transitoire.

Ça mérite selon moi explication, je ne vois vraiment pas ce que vous voulez dire.

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#931 15/05/2021 15h26

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Même une présence très minoritaire, la participation à une levée de fonds de 200k suffisent à éveiller mes soupçons. Mais qu’importe Mediapart ? Le Monde est une prise autrement intéressante.
Dans ma région TOUTE la "presse" (j’appelle plutôt ça un produit publicitaire) appartient au Crédit Mutuel, ce n’était pas le cas pendant mon enfance.

Mais j’aurais mieux fait de laisser cela de côté et en rester à mon principal propos : "le vieillissement est déflationniste", que rabâchent les médias et économistes en présentant cela comme un axiome mathématique, alors qu’il s’agit d’une coïncidence qui peut survenir lorsque de nombreux autres facteurs sont réunis. Ces facteurs ne sont pas des lois mathématiques, ils dépendent des décisions prises, par exemple pour autoriser ou empêcher les dragons âgés de dormir sur leur tas d’or. Le mien (petit tas d’or) me servira à faire de la déflation, par exemple en achetant des parcelles de forêt pour les rendre à l’état sauvage (d’où une baisse de leur prix futur). C’est une question de conviction, pas une question d’âge.

Dernière modification par rasmussen (15/05/2021 15h48)


« Celui qui croit en une croissance exponentielle dans un monde fini est fou, ou économiste. »

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2    #932 15/05/2021 15h56

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De bien belles convictions et j’espère que vous nous ferez partager vos achats de parcelles de forêt.

Et je changerai illico mon pseudo en "Dragon âgé sylvestre".


"Il ne faut pas voir les héros de la coulisse. Quand ils coïncident un moment avec leur légende c'est déjà beaucoup."

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3    #933 15/05/2021 16h55

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ISTP

GoodbyLenine a écrit :

Notons qu’en général, les fonctionnaires en activité ne sont guère impactés négativement par l’inflation (encore que  dans certains pays…).

Pitié arrêtons les clichés et le bashing des fonctionnaires….

"Vers un nouveau gel du point d’indice des fonctionnaires en 2022  par Bastien Scordia :

Dans une circulaire relative à la préparation du budget 2022, la direction du Budget demande aux ministères de retenir l’hypothèse d’une valeur stable du point d’indice pour l’année prochaine. Le gouvernement tente de temporiser en soulignant qu’aucune décision n’est prise. Ce point d’indice est gelé depuis le début du quinquennat."Source CFDT

"Regain de l’inflation et absence de revalorisation

Cette diminution du salaire dans la fonction publique d’Etat s’explique essentiellement par une hausse des prix plus importante en 2018 (+1,9% après +1% en 2017) mais également par "l’absence de revalorisation du point d’indice, après deux augmentations sucessives de 0,6%, en juillet 2016 puis en février 2017", souligne l’institut de la statistique. Avant d’ajouter que la baisse du nombre de contrats aidés (-42%) contribue "positivement à l’évolution du salaire net".

Dans le détail, les fonctionnaires de la catégorie A ont vu leur salaire net moyen baisser de 1,4%, à 2988 euros par mois. Les enseignants, qui représentent la moitié des effectifs des fonctionnaires de la FPE, perçoivent quant à eux 2739 euros par mois en moyenne (-1,5%). Du côté de la catégorie B, le salaire net moyen est de 2456 euros (-2%). Les fonctionnaires de la police et de l’administration pénitentiaire qui constituent plus d’un tiers de cette catégorie, touchent en moyenne 2515 par mois (-1,8%). Enfin, le salaire des fonctionnaires de la catégorie C baisse de 1,4%, à 1997 euros par mois." Source BFM

Je tiens également à préciser que ces salaires sont ultra gonflés. Je suis moi même enseignant (categorie A et concours à Bac+5) et je touche 1800 euros net avec ma seule prime incluse. Future retraite de 950 euros à 62 ans…. Marre que l’on me fasse passer pour un privilégié alors que c’est totalement faux.

GoodbyLenine a écrit :

Le développement technologique permet de disposer de beaucoup plus, pour un prix qui bien souvent n’augmente guère, voire diminue. Il a donc un impact deflationiste.
Ainsi, un smartphone, qu’il soit de haut, de milieu, ou de bas de gamme, coûte beaucoup moins cher que tous les appareils qu’il remplace (téléphone mobile, appareil photo, baladeur, radio, écran vidéo, console de jeu, navigateur GPS (ou pile de cartes routières), réveil, montre, scanner, et j’en oublie beaucoup). Mais bien sur, si rasmussen n’a jamais utilisé la plupart de ces appareils (qui pesaient leur poids, et utilisaient pas mal de matières premières), il ne s’en rend même pas compte.

Le développement technologique favorise surtout l’obsolescence programmée que ce soit par une usure physique (batterie, casse pièce) ou bien une désuétude de l’appareil (puissance ou mémoire insuffisante pour les mises à jours ou les nouvelles applications, programmation malicieuse pour stopper l’appareil ou le ralentir…).

Le taux de renouvellement d’un mobile est de 20 mois. C’est un exemple de la surconsommation et de l’obsolescence avec la course effrénée pour avoir la dernière technologie.
taux renouvellement mobile

Cette consommation favorise également les abonnements à des services en tout genre qui en s’ajoutant viennent grever le budget.

On voit bien que la notion de prix n’est qu’un aspect des dépenses car celles ci sont beaucoup plus fréquentes qu’avant. Cela coute donc plus cher au final.

GoodbyLenine a écrit :

Pour les voitures aussi, il y a un monde entre celles de (par exemple) 1980 et maintenant. Il suffit d’aller rouler dans une vieille Trabant à Berlin, ou dans ma vieille "seconde voiture" qui a 23 ans, pour s’en rendre compte. Et n’oubliez pas ce qu’il advenait de ces anciennes autos suite à un choc conséquent (les autos récentes ont sauvé beaucoup de vies !)

Les voitures devraient couter moins chers mais c’est tout le contraire qui se produit. Pourquoi ?
- Avec l’excuse de la technologie on affuble les voitures de gadgets (automatisme, capteurs et radars en tout genre, webcam…) pour gonfler le prix. Le pire, c’est que ces appareillages ne coutent quasiment rien à produire.
- On met en avant les crédits et le leasing pour abonner le consommateur à vie. Les gens deviennent ainsi de plus en plus locataires de leurs biens et sont poussés à changer régulièrement pour avoir le dernier modèle.

Je pense que l’on nous pousse à vivre au dessus de nos moyens. Mais est ce une cause du à cette société de consommation et le fonctionnement du système capitaliste ou bien une conséquence de nos bas salaires ?


PARRAINAGE : IBKR, SAXO, DEGIRO, BOURSORAMA - MESSAGE

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2    #934 15/05/2021 17h29

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Je ne souhaite, ni continuer un débat sur l’évolution de la rémunération des fonctionnaires (dont je ne crois guère que le pouvoir d’achat ait fondu significativement, mais chacun peut croire ce qu’il veut, et j’accepte que ce sujet soit "sensible" pour certains) ou sur les méfaits de la société de consommation (où chacun garde quand même le droit de ne pas acheter tout et n’importe quoi, et d’en changer sans cesse en cédant aux sirènes des vendeurs, parfois en tentant de défausser ses responsabilités sur d’autres ou sur "le système") (et sachant qu’il existe des nostalgiques (minoritaires) d’avant 1989 en Allemagne (et Europe) de l’Est).

Pour l’impact de la technologie, en particulier sur l’évolution des prix (et des caractéristiques) des voitures, je vous renvoie à  https://www.largus.fr/actualite-automob … 33394.html et https://www.vendezvotrevoiture.fr/magaz … mentation/ qui éclairent un peu le débat avec des données concrètes.

Désolé, Scipion8, d’avoir contribué au développement de ces échanges largement hors-sujet ici.


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Favoris 1    8    #935 23/05/2021 18h52

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Bonjour à tous,

Pas de souci pour la dérive de la discussion : c’est assez inévitable quand on commence à parler de macroéconomie. Inévitablement, des aspects politiques, philosophiques, s’invitent dans la discussion.

Je réponds sur plusieurs points - étant entendu que je n’exprime que mon opinion personnelle et que je ne prétends ni à la vérité scientifique (je suis un opérationnel, pas un académique) ni à la neutralité politique (je suis adepte d’un libéralisme raisonné, dans la tradition française - enfin… la tradition philosophique, plus que la pratique politique en France…). J’essaie d’être clair mais en restant technique, en laissant le soin au lecteur de zapper ce qui paraît trop complexe pour se diriger vers les questions plus simples.

1) Risque inflationniste aux USA vs Europe : @TyrionLannister : Effectivement, j’ai une appréciation très différente du risque inflationniste aux USA et en zone euro, même si je pense que dans les 2 cas il ne se concrétisera pas (dans le sens où la Fed comme la BCE sauront prendre les mesures nécessaires pour empêcher toute inflation excessive).

Des facteurs qui me semblent conduire à un risque inflationniste plus élevé aux USA qu’en Europe :
- moins de "slack" sur le marché de l’emploi, y compris pour des emplois peu qualifiés
- un stimulus monétaire et budgétaire plus massif aux USA qu’en zone euro, en raison des contraintes juridiques sur le QE en zone euro (cf. le jugement de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe l’an dernier) et d’une plus grande discipline de marché (même si elle est très affaiblie) sur les dérives budgétaires en zone euro qu’aux USA
- une conjoncture politique qui conduit à une remise en cause de l’orthodoxie budgétaire (par exemple des cibles / plafonds de dette publique en % PIB) par les élites démocratiques au pouvoir aux USA - pas simplement par l’aile gauche adepte de la MMT - alors qu’en zone euro l’Allemagne continue à jouer le rôle de garde-fou
- des facteurs structurels, comme la démographie (même si le dernier recensement américain montre une baisse du taux de fécondité aux USA, désormais inférieur à celui de la France)

Ce risque inflationniste plus prononcé aux USA qu’en Europe se retrouve dans les anticipations d’inflation de long-terme du marché : désormais supérieures à la cible de 2% de la Fed aux USA, et inférieures à celle de la BCE en zone euro.

2) Le contre-exemple du Japon : @Flosk22 : Les 2 reproches que l’on fait souvent aux autorités japonaises s’agissant de leur réponse initiale (années 1990s / début des années 2000s) à la déflation :

- une approche beaucoup trop graduelle dans les mesures anti-déflation (taux d’intérêt nuls ou négatifs, QE) : la BoJ a pris les bonnes mesures (en tout cas on n’a pas trouvé mieux depuis face à une déflation), mais elle les a mis en place de façon très progressive, avec une calibration initiale très prudente, compte tenu des incertitudes sur les effets de ces mesures (il faut garder à l’esprit que beaucoup annonçaient une hyper-inflation au Japon en conséquence de l’augmentation massive de la masse monétaire entraînée par les mesures de la BoJ, exactement comme bcp le font actuellement aux USA voire en Europe !). En agissant de façon trop graduelle, la BoJ a laissé s’enraciner les anticipations déflationnistes dans les mentalités des agents économiques - qui dès lors deviennent très difficiles à faire évoluer.

- une certaine passivité face à la "zombification" du système bancaire et de l’économie : le risque de mesures anti-déflation appliquées de façon durable, c’est de freiner, voire d’empêcher, le nécessaire renouvellement du tissu économique, par l’élimination des banques et entreprises non-viables. Avec des taux nuls voire négatifs, des entreprises surendettées et non viables peuvent survivre indéfiniment. La conséquence, c’est une mauvaise allocation du travail et du capital dans l’économie, qui pèse sur la croissance structurelle du pays, et enracine encore plus la déflation.

Évidemment, la Fed et la BCE ont tiré les leçons de l’expérience japonaise pour leurs propres mesures anti-déflation, d’abord en 2008 (premier QE de la Fed) et 2015 (premier QE de la BCE) puis à l’occasion de la pandémie en 2020. Elles ont d’ailleurs largement bénéficié d’échanges avec la BoJ (à titre d’exemple, on m’a envoyé en stage à la BoJ en 2014 pour préparer le QE de la BCE). Il faut bien comprendre que la BoJ a plus de 20 ans d’expérience sur ces sujets, donc ce sont vraiment les meilleurs experts au niveau technique (ils ont appris de leurs erreurs), la Fed et la BCE restent presque des "débutants" en la matière, même si avec 2 crises majeures leur expérience s’est bien étoffée.

Le premier enseignement, ça a été d’agir de façon beaucoup moins graduelle quand les anticipations d’inflation à moyen/long terme décrochent de la cible de la banque centrale : ainsi, la banque centrale vise délibérément à impressionner en annonçant des montants de QE massifs, voire des QE illimités comme la Fed à l’occasion de la pandémie. C’est une application de la théorie du "big stick" dans le domaine monétaire (que Draghi avait déjà exprimée par son discours "whatever it takes" en 2012). On en voit aussi l’application dans la communication de la Fed et de la BCE sur le fait qu’elles sont prêtes à laisser temporairement l’inflation dépasser leur cible.

Le second enseignement, c’est d’essayer de calibrer correctement les mesures dans le temps pour éviter les effets néfastes de zombification. Dans le domaine bancaire, cela signifie bien séparer les mesures systémiques de soutien au banque des mesures idiosyncratiques de sauvetage des banques les plus en difficulté, par exemple. C’est un point sur lequel je travaille en ce moment : j’aide les banques centrales à mettre en place des cadres appropriés pour les mesures idiosyncratiques (ELA, Emergency Liquidity Assistance = Apport de Liquidité d’Urgence) pour ne pas "surcharger" les mesures systémiques, qui dès lors peuvent être recalibrées plus facilement (si on n’a pas de filet de sécurité idiosyncratique, alors les mesures systémiques sont sur-calibrées pour sauver les "maillons faibles"). Les mesures idiosyncratiques sont à dessein "douloureuses" pour les banques qui en auraient besoin (= on les force à se réformer, i.e. on empêche la zombification).

3) Anticipations d’inflation des ménages : @Flosk22 : Les ménages forment leurs propres anticipations d’inflation (c’est d’ailleurs sans doute ce que vous faites quand vous vous posez ces questions) et ajustent leurs comportements de consommation et d’investissement en conséquence (de façon plus ou moins consciente et organisée, plus ou moins graduelle).

Ces choix de consommation et d’investissement vont affecter le système bancaire, de même que votre mode de consommation alimentaire va impacter votre foie. Le système bancaire "synthétise" l’ensemble des flux de tous les agents économiques. Par exemple, si vous vous inquiétez particulièrement de l’inflation, vous allez peut-être rechercher des informations sur ce forum sur les obligations indexées sur l’inflation ou sur l’or, et peut-être passer des ordres en conséquence, qui vont impacter les banques et influer sur les prix de marché. Le rôle du système bancaire n’est pas d’exprimer une opinion sur le risque inflationniste, mais simplement de permettre la réconciliation des flux acheteurs et vendeurs de protection sur l’inflation, le prix de marché servant à équilibrer ces flux.

D’où le focus de la banque centrale, quand elle surveille les anticipations d’inflation, sur les prix de marché - ils doivent fournir une synthèse intéressante sur les flux de l’ensemble des agents économiques (y compris les ménages), donc sur les anticipations. En complément, la banque centrale utilise des enquêtes et sondages, y compris auprès de ménages, par exemple sur les perceptions d’inflation. Et bien sûr certains de mes collègues sont experts sur le lien entre anticipations/perceptions d’inflation (selon différentes mesures) et inflation réalisée, donc la banque centrale intègre aussi cela dans son analyse.

4) Système "à bout de souffle" ou évolution normale du taux d’intérêt naturel ?

@Flosk22 : Plutôt que de parler (comme je le fais, comme la plupart des commentateurs) de facteurs déflationnistes et inflationnistes, il serait plus précis de parler des facteurs qui font évoluer le taux d’intérêt naturel. Le taux d’intérêt naturel est le taux d’intérêt réel (= après inflation) qui permet d’équilibrer les flux d’épargne et la demande d’investissement, avec le plein emploi et des prix stables.

Ce taux d’intérêt naturel ne peut être qu’estimé et non observé. Si la banque centrale établit son taux directeur au-dessus du taux d’intérêt naturel, sa politique monétaire aura tendance à exercer une force déflationniste ; si son taux directeur est inférieur au taux d’intérêt naturel, sa politique monétaire aura tendance à exercer une force inflationniste.

Quand bien même elle aurait une idée très précise du taux d’intérêt naturel (ce qui n’est pas le cas), la banque centrale peut (et doit !) parfois faire dévier son taux directeur du taux d’intérêt naturel, afin de lisser le cycle économique (cela justifie, par exemple, d’avoir un taux directeur inférieur au taux d’intérêt naturel pendant une pandémie majeure). Si elle ne le faisait pas, le cycle économique jouerait pleinement, avec des effets très destructeurs lors des récessions sévères (effets d’hystérèse sur l’emploi : pertes de qualifications lors de périodes de chômage prolongé, dépressions / maladies / risques sociaux etc.).

Voici l’évolution estimée du taux d’intérêt naturel en Europe depuis le 14e siècle (selon une étude que j’ai déjà citée ici) :

On voit une évolution séculaire baissière, au fur et à mesure que l’Europe devient économiquement et technologiquement plus avancée, plus démocratique, plus âgée.

Ce taux d’intérêt naturel est essentiellement exogène à la banque centrale. Cela signifie que la banque centrale ne peut pas le faire vraiment évoluer avec sa politique monétaire. Tout ce qu’elle peut faire (c’est son rôle), c’est gérer la déviation (estimée) entre son taux directeur et le taux d’intérêt naturel pour lisser le cycle économique et atteindre l’objectif de stabilité des prix.

C’est pour cela que vous entendrez souvent les banquiers centraux (orthodoxes) dire parfois que "l’inflation est un phénomène monétaire" : si la banque centrale gère correctement sa déviation par rapport au taux d’intérêt naturel, alors on ne doit pas voir d’inflation excessive.

Idem bien sûr pour la déflation - sauf qu’avoir un taux directeur négatif quand le taux d’intérêt naturel devient très faible voire négatif, c’est techniquement beaucoup plus compliqué (des mesures comme le QE, l’helicopter money, les taux négatifs etc. sont possibles mais risquées et elles ont des effets secondaires). C’est pour cela qu’un opérationnel comme moi sera généralement moins inquiet par un risque inflationniste que par un risque déflationniste…

Pourquoi dis-je que le taux d’intérêt naturel est "essentiellement" exogène à la banque centrale ? Parce que si la banque centrale manque à son mandat de gardienne de la stabilité des prix, alors cela doit forcément avoir un impact sur le taux d’intérêt naturel, puisqu’il y a alors un impact sur l’équilibre entre épargne et investissement. Donc le cadre institutionnel de la banque centrale (par exemple son indépendance) est sans doute l’un des nombreux facteurs qui a conduit à la baisse séculaire du taux d’intérêt naturel, mais le taux d’intérêt naturel est essentiellement exogène à la politique monétaire (habituelle) de la banque centrale.

Comme vous le voyez sur le graphique, la baisse du taux d’intérêt naturel est un phénomène séculaire - et qui manifeste largement l’amélioration de nos conditions de vie au fil des siècles :
- quand on risque de se faire détrousser sur chaque chemin, le taux d’intérêt naturel est plus élevé (toutes choses égales par ailleurs) que lorsque l’ordre règne
- quand la monnaie est manipulée à sa guise par le souverain, le taux d’intérêt naturel est plus élevé (toutes choses égales par ailleurs) que lorsqu’une banque centrale indépendante, opérant sous contrôle démocratique, respecte fidèlement son mandat de stabilité des prix
- quand on n’a pas de projets de long-terme sur lesquels investir, soit parce qu’il n’existe pas de marchés de capitaux, soit parce qu’il n’y a pas de projets intéressants (innovations technologiques), par exemple, alors l’argent sert à la consommation immédiate, et le taux d’intérêt naturel est plus élevé (toutes choses égales par ailleurs)

Donc le système n’est pas du tout "à bout de souffle" : la baisse continue du taux d’intérêt naturel manifeste au contraire l’amélioration continue des conditions de vie et de l’activité économique. Cela dit, elle pose un défi pour les banques centrales, car elles ont du mal (comme la plupart des gens) avec l’idée de taux négatifs. Techniquement, ce n’est pas simple d’empêcher une déflation. Mais il ne faut pas exclure la possibilité que les prochaines générations vivent dans un monde à taux d’intérêt essentiellement négatifs… et que cela puisse être une bonne chose !

5) Quelles nouvelles mesures contre une déflation ?

Jusqu’à présent, la Fed et la BCE opèrent largement selon le "playbook" nippon, en tirant les leçons de l’expérience japonaise depuis 25 ans. On peut dire que cela a été un succès face au risque déflationniste aux USA et en Europe, puisque désormais il semble que les gens s’inquiètent davantage du risque inflationniste ! (ce n’est pas mon cas)

Les mesures actuellement en place face au risque déflationniste sont :
a) une gestion quantitative de la monnaie (QE), une fois que le taux directeur a atteint sa "borne basse" (0%, pour la plupart des banques centrales)
b) un taux d’intérêt négatif sur les réserves excédentaires des banques pour accélérer la circulation de la monnaie dans le système bancaire et l’économie (effet "patate chaude")
c) des injections de liquidité à taux nul voire négatifs au niveau des banques, comme les TLTRO (Targeted Longer-Term Refinancing Operations) à 4 ans de la BCE
d) un engagement explicite de la banque centrale de maintenir des taux bas et/ou de laisser temporairement l’inflation dévier au-dessus de sa cible ("forward guidance"), afin de ré-ancrer les anticipations d’inflation de long-terme autour de la cible de la banque centrale

Évidemment, il y a beaucoup de brainstorming dans la communauté académique et au sein des banques centrales sur de nouvelles idées si les mesures (a, b, c, d) s’avéraient insuffisantes, par exemple :

e) transformation des portefeuilles d’investissement des banques centrales en portefeuilles de politique monétaire : outre leurs portefeuilles de QE, les banques centrales ont des portefeuilles d’investissement qu’elles gèrent séparément ; on pourrait les transformer en portefeuille de QE, avec des objectifs de volumes suivant une logique de QE

f) taux d’intérêt négatifs sur la circulation fiduciaire : ce n’est pas une idée nouvelle, elle a été imaginée par Silvio Gesell il y a plus d’un siècle. De même que la BCE applique un taux négatif (-0,5%) aux réserves excédentaires des banques, on pourrait imaginer une dépréciation naturelle des billets de banque - avec le même objectif d’augmenter la vélocité de la monnaie. Ce n’est pas facile (mais pas impossible) à faire avec de la monnaie papier (par exemple on pourrait appliquer un taux de dépréciation aux billets selon leur année d’émission), beaucoup plus simple avec d’éventuelles monnaies numériques de banques centrales (Central Bank Digital Currencies, CBDC)

g) helicopter money : comme le QE, il s’agirait d’augmenter la masse monétaire, mais sans passer par le système financier (avec les effets inégaux de création de richesse que cela implique) mais par des distributions monétaires aux ménages. A noter que le "vrai" helicopter money est monétaire (= distributions par la banque centrale), et non budgétaire : les chèques de Biden, par exemple, s’accompagnent d’une hausse de la dette publique, donc à terme d’une charge fiscale plus élevée (alors que pour l’helicopter money monétaire, le "prix à payer" est inflationniste). Perso je pensais que la pandémie (par essence limitée dans le temps) aurait pu être un bon environnement pour tester cette idée, mais cela reste très difficile à envisager pour une banque centrale - car dès lors il y aurait une pression constante pour recommencer, avec à terme une menace sur son indépendance. Donc les distributions financières ont été faites par les États.

6) Politique monétaire et inégalités : @Rasmussen : vraiment, je ne vous comprends pas quand vous affirmez que les banques centrales n’enrichiraient que les riches. Surtout quand je lis votre file de présentation : vous avez pleinement bénéficié de la politique monétaire accommodante (i) en vous endettant à des conditions très favorables (prêt conso) et (ii) en gagnant massivement sur vos investissements en bourse, les banques centrales fournissant évidemment un vent très porteur à partir de mars/avril 2020.

Vous voyez bien, sur la base de votre exemple personnel, qu’il n’y a nul besoin d’être "riche" pour tirer avantage de la politique monétaire très accommodante dans le contexte de la pandémie ! En revanche, il fallait (i) faire fonctionner ses méninges et (ii) avoir de l’audace. Cela a été votre cas, bravo ! Et ça tombe bien, parce que c’est exactement ce que l’on peut souhaiter : récompenser la prise d’initiatives, la prise de risques, le financement de l’économie - et non pas déverser des subventions, en enracinant dans la population l’idée que "ça tombe tout seul".

C’est précisément pour cela qu’un système libéral est plus efficace qu’un système subventionné : il valorise l’initiative, le travail, le mérite, l’intelligence. C’est d’ailleurs l’un des arguments essentiels en faveur de l’orientation des mesures des banques centrales vers le système financier, plutôt que des mesures de type subventions comme l’helicopter money : la banque centrale laisse le système bancaire jouer son rôle d’allocation du capital. Si l’État (ou autre administration publique) était un meilleur allocateur du capital que le marché, la Guerre Froide aurait fini bien différemment…

Cela dit, je reconnais volontiers que le QE bénéficie plus directement aux détenteurs d’actifs et peut donc conduire à une aggravation des inégalités : c’est le rôle de l’État (et non pas de la banque centrale, qui n’a ni la légitimité, ni les outils pour ça) de corriger éventuellement ces inégalités, par la fiscalité (par exemple un renforcement de la fiscalité sur le patrimoine) et les politiques sociales.

Le niveau d’inégalité économique dans une société est le résultat d’un choix politique : en France, nous avons fait collectivement le choix d’un niveau modéré d’inégalité économique (sachant qu’un niveau d’égalité absolue entraînerait au minimum un appauvrissement considérable du pays, au pire une tyrannie). C’est un choix démocratique. Ce n’est pas le rôle d’une banque centrale d’interférer avec ce choix : elle fait ce qu’il faut pour maintenir la stabilité de la monnaie, l’État gère les conséquences éventuelles par des mesures redistributives.

En l’occurrence, la réalité en France, c’est une remarquable stabilité des indicateurs d’inégalité économique : l’indice de Gini sur le niveau de vie est stable autour de 0,29 depuis presque 50 ans (légèrement inférieur à la moyenne de l’UE). L’indice de Gini sur les patrimoines bruts (évidemment plus élevé) a même eu tendance à baisser ces dernières années (autour de 0,63 actuellement).

C’est ça la réalité des chiffres en France et cela va à l’encontre du discours médiatique et politique dominant : donc ceux qui se plaignent de la supposée "montée des inégalités" en France méconnaissent la situation, ou le font délibérément avec un agenda politique.

Mon interprétation, c’est que le degré élevé de redistribution en France amortit naturellement les éventuels effets inégalitaires "de premier tour" du QE, ce qui n’est pas le cas aux USA (où les indices de Gini sur les niveaux de vie et les patrimoines ont fortement augmenté depuis 10 ans).

7) Vieillissement démographique et déflation : @Rasmussen : comme dit plus haut, il faudrait plutôt réfléchir au rôle éventuel du vieillissement démographique sur l’évolution du taux d’intérêt naturel. S’il y a inflation ou déflation par la suite dépend de la nature de l’action de la banque centrale ("l’inflation est un phénomène monétaire").

Quand je dis que le vieillissement démographique est un facteur déflationniste, je simplifie évidemment beaucoup (idem d’ailleurs pour la technologie et pour la mondialisation). Il y a des effets parfois contradictoires. Les effets du vieillissement sur les prix peuvent être très différents selon les biens et services, et aussi différents selon la cause du vieillissement (l’allongement de l’espérance de vie est déflationniste, alors que la baisse de la natalité est inflationniste).

Mais en termes "nets", le vieillissement démographique est bien déflationniste (plus précisément : en termes nets, il conduit bien à une baisse du taux d’intérêt naturel), et il y a une abondante littérature économique pour le confirmer (ce ne sont quelques exemples rapidement trouvés sur internet) :

Demographics and real interest rates: Inspecting the mechanism (Carvalho, Ferrero, Nechio) a écrit :

The demographic transition can affect the equilibrium real interest rate through three channels. An increase in longevity—or expectations thereof—puts downward pressure on the real interest rate, as agents build up their savings in anticipation of a longer retirement period. A reduction in the population growth rate has two counteracting effects. On the one hand, capital per-worker rises, thus inducing lower real interest rates through a reduction in the marginal product of capital. On the other hand, the decline in population growth eventually leads to a higher dependency ratio (the fraction of retirees to workers). Because retirees save less than workers, this compositional effect lowers the aggregate savings rate and pushes real rates up. We calibrate a tractable life-cycle model to capture salient features of the demographic transition in developed economies, and find that its overall effect is a reduction of the equilibrium interest rate by at least one and a half percentage points between 1990 and 2014. Demographic trends have important implications for the conduct of monetary policy, especially in light of the zero lower bound on nominal interest rates. Other policies can offset the negative effects of the demographic transition on real rates with different degrees of success.

Aging and Deflation from a Fiscal Perspective (Katagiri, Konishi, Ueda) a écrit :

Our  analysis  reveals  that  the  effects  of  aging  depend  on  its  causes.  Aging  is  deflationary  when  caused  by  an  increase  in  longevity  but  inflationary  when  caused  by  a  decline  in  birth  rate. Numerical  simulation  shows  that  aging  over the past 40 years in Japan generated deflation of about 0.6 percentage points annually.

Is ageing deflationary? Some evidence from OECD countries (Gajewski) a écrit :

We present a theoretical and empirical discussion related to interconnections between inflation and ageing, providing some empirical results regarding the impact of ageing-related variables on inflation in a sample of OECD countries. According to the macroeconomics textbook ageing is generally inflationary, but a growing body of arguments can be identified to support the opposite impact. The simple empirical model is estimated via Fixed Effects (FE) and panel-corrected SE (PCSE), robust to groupwise heteroscedasticity and serial correlation. Generally, our results suggest that ageing exerts downward pressure on prices.

Aging and the Economy:The Japanese Experience (Canon, Kudlyak, Reed) a écrit :

A study from earlier this year by economists Mikael Juselius and Elod Takats examined the relationship between aging and inflation in a panel of 22 advanced economies, spanning 1955-2010. The authors found a stable and significant correlation between the age structure of a population and inflation. However, the correlation contrasts with the Japanese experience. In particular, a larger share of dependents (both young and old) was correlated with higher inflation in that study, while a larger share of the working-age population was correlated with deflation (excess supply and deflationary bias). The authors found that the correlation between inflation and the dependency ratio (young and old popula-tions divided by working-age population) was weakest for Japan, indicating that its experi-ence might not provide a predictive model for other economies.

Une autre façon de réfléchir aux effets du vieillissement sur l’inflation, c’est une lecture politique : les personnes âgées votent beaucoup plus que les jeunes et pour beaucoup elles ont accumulé des actifs, elles vivent de rentes plus ou moins fixes. Elles sont traditionnellement hostiles à l’inflation - qui au contraire faciliterait le désendettement (en termes réels) des jeunes ménages endettés.

Le poids politique croissant des personnes âgées dans l’électorat conduit les responsables politiques à la prise en compte de leurs inquiétudes sur une résurgence inflationniste. Cela a peut-être contribué à l’émergence de banques centrales indépendantes, avec un clair mandat de maintien de la stabilité des prix.

8) Technologie, mondialisation et déflation : Je ne reviens pas en détail sur ce point, je suis d’accord avec les réponses déjà apportées par GBL.

L’effet le plus direct des technologies et de la mondialisation, c’est une baisse des coûts de production, qui se répercute sur les prix à la consommation.

Technologie et mondialisation ont également conduit à une intensité concurrentielle accrue, une fragilisation (voire une destruction) des situations de rente - par exemple Uber vs taxis, mise en concurrence digitale des restaurants, artisans etc., délocalisations, émergence d’une économie digitale freelance etc.

Ces évolutions sont évidemment au profit des consommateurs - tant qu’elles n’aboutissent pas à de nouvelles situations de rente, monopoles ou oligopoles (e.g. GAFAM). Donc là aussi, l’effet inflationniste ou déflationniste des nouvelles technologies et de la mondialisation dépend en grande partie des autorités publiques. Si, comme elles le doivent, elles protègent la libre concurrence et l’entrée de nouveaux concurrents et "disrupteurs", alors en termes nets, technologie et mondialisation doivent contribuer à la baisse du taux d’intérêt naturel.

9) Démocratie moderne et taux d’intérêt naturel : @Caratheodory : dans mes trop longs messages, il m’arrive fréquemment de faire des raccourcis et des ellipses. Je ne sais pas si démocratie "moderne" est le terme exact (peut-être mieux démocratie contemporaine ?).

Je faisais référence à la démocratie occidentale telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, c’est-à-dire :
- une bourgeoise politiquement active, mobilisée pour défendre ses intérêts (l’émergence de LREM en est une parfaite illustration, le noyautage du Parti démocrate par Wall Street et la Silicon Valley en est une autre)
- une auto-exclusion choisie des classes populaires du processus démocratique, par abstention, par enfermement sur des votes extrêmes qui permettent le maintien indéfini de la bourgeoisie au pouvoir (RN), ou bien par comportement politique incohérent (un coup je suis la mode du moment, un autre je mets un gilet jaune, ensuite je m’abstiens etc.)

En l’absence de mécanismes politiques cohérents (chez nous, historiquement, le PCF et les syndicats, désormais affaiblis ou en voie de disparition), l’exclusion des catégories populaires du processus démocratique conduit à un pouvoir très focalisé sur les priorités économiques (suppression de l’ISF, PFU) et sociétales (mariage homosexuel, dépénalisation des drogues etc.) de la bourgeoisie économiquement et culturellement dominante (les bobos, en résumé), et à l’ignorance totale des préoccupations populaires (sécurité, immigration, inégalités).

Je ne vois pas cette situation politique changer de sitôt, même si des accidents peuvent survenir épisodiquement (Brexit, Trump). Perso je vois ça comme une crise démocratique profonde, mais quoi qu’il en soit d’un point de vue économique cela crée les conditions favorables pour une défense des droits de la propriété et une politique monétaire anti-inflationniste. (La banque centrale est indépendante, bien sûr, mais elle n’est pas insensible au contexte politique.) J’ai donc du mal à envisager une hyper-inflation dans ce contexte politique (car la bourgeoisie est durablement au pouvoir et elle voudra protéger l’indépendance de la banque centrale).

10) Capitalisme et taux d’intérêt naturel : Là aussi, c’est une ellipse et une approximation. Ce que j’avais à l’esprit, c’est l’existence de marchés de capitaux, qui permettent leur circulation libre et rapide dans l’économie. Cette fluidité des capitaux doit permettre des ajustements plus rapides de la machine économique face à des chocs sur l’offre ou la demande, donc à mon sens ça doit contribuer à faire baisser le taux d’intérêt naturel.

Évidemment, je suis très influencé par mon expérience personnelle de la conduite de la politique monétaire dans les pays pauvres. Dans beaucoup de pays où je travaille, il n’y a pas de marchés de capitaux développés, et la démocratie est souvent imparfaite (pour être poli). Les épargnants sont sans cesse exposés à des risques de pertes en capital. Le taux d’intérêt naturel dans ces pays est évidemment bien plus élevé que chez nous. Par exemple dans les zones rurales (largement débancarisées) de Madagascar ou du Cambodge, les ménages peuvent emprunter à des taux > 45-50% / an, auprès d’institutions de microfinance, ou bien à des taux bien supérieurs encore auprès d’usuriers (certaines institutions caritatives occidentales rachètent ensuite ces créances, pour permettre aux emprunteurs de s’en sortir).

Voilà pour ce nouveau pavé, j’espère avoir apporté les clarifications nécessaires - tout en sachant que tout ceci est bien évidemment sujet à des vastes débats et que chacun aura son opinion, selon ses convictions profondes.

Pour le reste, peu d’activité en bourse de mon côté (performance assez médiocre cette année). J’ai injecté 40k$ de liquidités (sans les investir) et j’ai allégé de moitié ma position sur le GBTC (Grayscale Bitcoin Trust) après le tweet de Musk "découvrant" le caractère très polluant du Bitcoin - afin de réduire mon levier. J’ai acheté quelques calls sur des valeurs de conviction, à la faveur de la baisse des valeurs technologiques américaines. Ce sont mes premiers achats d’options - à titre expérimental pour le moment. Je reviendrai en détail sur mon portefeuille et cette nouvelle stratégie dans un prochain message.

J’ai été occupé ces derniers jours avec bien d’autres choses : notamment 2 bonnes choses de faites :

Dernière modification par Scipion8 (23/05/2021 19h11)

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#936 23/05/2021 19h05

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GoodbyLenine, le 15/05/2021 a écrit :

Notons qu’en général, les fonctionnaires en activité ne sont guère impactés négativement par l’inflation (encore que  dans certains pays…).

Quelques données chiffrées (montrant l’inverse) avaient été apportées sur ce fil.
Vous aviez pourtant participé au "débat"…


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2    #937 23/05/2021 22h31

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@Scipion8 : Attention à la myopie que peuvent conférer certains indicateurs. Vous citez le GINI, mais le problème c’est que dans une société relativement homogène (courbe de Lorenz raisonnable) il peut baisser aussi bien parce que des pauvres accèdent à la classe moyenne (l’idéal) que parce que la classe moyenne s’appauvrit… ce qui est très mal vécu.

Under Pressure: The Squeezed Middle Class | en | OECD

Certes, vous pourrez me rétorquer qu’une partie des millennials comparativement plus pauvres au même âge que leurs parents hériteront in fine de la “différence”, mais beaucoup trop tard dans leur vie pour que cela ait un impact sur leur trajectoire : en attendant, ils vont continuer de différer l’accès à la propriété (besoin de mobilité pour suivre les bullshit jobs où ils sont) et à la fondation d’un foyer (cette instabilité géographique complique la création de liens humains durables).

On se retrouve donc avec une armée de hamsters qui pour les plus chanceux investissent leur argent car ils ne peuvent pas l’utiliser directement pour construire leur vie, qui quoi qu’il en soit consomment toujours plus pour essayer de combler le vide hurlant de cette existence contre nature et projeter une apparence de bonheur envers et contre tout, et finalement héritent du pactole de leurs parents quand il est temps de se payer des soins coûteux, de choisir son futur EHPAD ou de préparer leur propre succession.

On aura beau continuer de prolonger l’adolescence (jusqu’à 30 ans déjà…) ou provoquer toutes sortes de culpabilité pathologiques (ne pas avoir d’enfant, c’est bon pour l’environnement) pour essayer de faire passer la pilule de ce manque cruel d’agentivité, la borne inamovible de la mort ne peut qu’accroître le ressentiment sourd et le mal être des masses au fur et à mesure qu’elles voient leurs modestes espoirs réduits à peau de chagrin.

Je ne vois pas dans ces conditions, à moins de surveiller toujours plus étroitement les hamsters en détresse psychologique, ou les remplacer par des machines, comment on pourrait éviter une instabilité croissante du système.

Vous avez déjà vu dans de mauvaises animaleries ces hamsters neurasthéniques qui s’entre dévorent ?


✯ Mangia bene, caca forte, e non aver paura della morte.

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1    #938 23/05/2021 23h11

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Maxicool:

Non seulement ces débats (celui sur le lien que vous avez indiqué, comme d’autres sur le forum) ne parlaient pas du même sujet (ils ne parlaient nullement de l’impact de l’inflation sur les revenus et le pouvoir d’achat des fonctionnaires),
…. mais aussi vous noterez que ma participation au débat vers lequel vous avez fourni un lien avait consisté à indiquer que, si un enseignant gagne moins de fois le SMIC qu’avant, ça ne signifie pas qu’il a moins de pouvoir d’achat, ni qu’il est plus mal traité que d’autres (car le pouvoir d’achat du SMIC a augmenté, et presque tout le monde gagne moins de fois le SMIC qu’avant).

Vous pouvez continuer à penser que les fonctionnaires sont financièrement de plus en plus maltraités (essayez quand même de le faire avec de bons arguments, pas ces mauvais arguments du nombre de SMIC, qui décrédibilisent les syndicats qui les avancent), en France (ma phrase ne se limitait pas à la France) (et je pense qu’en France les fonctionnaires sont financièrement traités assez raisonnablement (mais doivent quand même s’adapter aux changements, comme tout le monde, même si beaucoup de monde y est rétifs), donc on est en désaccord sur ce point précis), mais vous devriez éviter de surréagir dans des discussions dont le sujet est très éloigné de ça, dès lors qu’on y utilise le mot "fonctionnaires".

Note: de fait, le statut des fonctionnaires en France les protège de l’inflation, quand  le contrat de travail d"un salarié du privé protège juste d’une baisse du salaire brut nominal, et qu’un indépendant n’a aucune de ces protections.


J'écris comme "membre" du forum, sauf mention contraire. (parrain Fortuneo: 12356125)

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#939 24/05/2021 00h19

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Scipion8 a écrit :

C’est précisément pour cela qu’un système libéral est plus efficace qu’un système subventionné : il valorise l’initiative, le travail, le mérite, l’intelligence.

Je suis avec intérêt vos interventions, qui m’apprennent souvent beaucoup, mais ce point particulier m’interpelle.

Vous me donnez l’impression d’avoir oublié de citer la cupidité dans votre liste, qui me paraît pourtant détenir une place de premier plan.
Je ne suis par ailleurs pas certain d’avoir la même définition du mérite et de l’intelligence que vous, ce pourrait être un débat intéressant peut être, mais sans doute polémique et je ne tiens pas à faire dévier la discussion sur votre file.

GoodbyLenine a écrit :

et je pense qu’en France les fonctionnaires sont financièrement traités assez raisonnablement

Tout dépend desquels je suppose. Mais le fait l’Etat n’arrive plus à recruter de personnel compétent en nombre suffisant dans certains ministères est je le crois le signe que la situation n’est pas aussi claire pour tout le monde.

Dernière modification par LieKolchin (24/05/2021 00h46)

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#940 24/05/2021 07h48

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> Goodbylenine

Je faisais allusion à ce passage :

Depuis 2002 (en 19 ans donc), le point d’indice a augmenté de 8,5%.
(…)
Sur la période 2002 à 2021 :
(…)
- Evolution du point d’indice : +8,50%
- Inflation : +29% (voir ce calculateur)

Je ne comprends donc pas trop quand vous dites "les fonctionnaires en activité ne sont guère impactés négativement par l’inflation". Ni pourquoi ce serait de "faux arguments" et une "surréaction de ma part", étant donné que ce ne sont "que" des chiffres sourcés.

Vous utilisez les termes "je suis convaincu que, il me semble que, je crois que" ; Gandolfi ici et moi-même (sur le topic mis en lien ci-dessus) vous apportons quelques chiffres "concis et factuels" (art. 4 de la charte) montrant que ce que vous croyez est peut-être erroné. Pour finalement parler de "sur-réaction" et de "faux argument".

Je ne comprends pas non plus pourquoi vous affirmez qu’un fonctionnaire (par son contrat lui garantissant son travail à vie) est mieux protégé de l’inflation qu’un indépendant. Je pense que ce dernier est (pour une partie d’entre eux) libre de fixer ses prix afin de compenser l’inflation si elle le touche.

Un exemple me vient à l’esprit : le coût de l’entretien de ma chaudière à condensation (car je l’ai fait faire il y a peu de temps). Tout d’abord en contrat classique :
- 2011 : 140
- 2012 : 149
- 2015 : 155
Soit une augmentation de 10,71% en 4 ans.

Puis en contrat d’entretien :
- 2015 : 191
- 2016 : 195
- 2017 : 199
- 2019 : 201
- 2020 : 206
Soit une augmentation de 8% environ en 5 ans.

Je prendrais le coût du traitement en orthodontie de mes filles sur la même période, l’augmentation serait plus importante encore.

Désolé d’avoir sur-réagi à nouveau ;-)

Fin de cette "dérive" sur le topic de Scipion8 pour ma part.
Place aux discussions sur le portefeuille de Scipion8.


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5    #941 24/05/2021 09h58

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Scipion8, le 23/05/2021 a écrit :

Ce risque inflationniste plus prononcé aux USA qu’en Europe se retrouve dans les anticipations d’inflation de long-terme du marché : désormais supérieures à la cible de 2% de la Fed aux USA, et inférieures à celle de la BCE en zone euro.

Scipion,

J’ai quand même du mal à comprendre à quoi fait-on allusion chaque fois que l’on parle de cible d’inflation par la BCE ou la FED ?

Déjà, parle-t-on de la même inflation dans les deux cas ? Parce que s’il s’agit des prix à la consommation, on peut bien cibler tout ce que l’on veut, je cherche encore l’intérêt dans le monde [occidental] d’aujourd’hui, très orienté services.

Dans mon coin, l’immobilier c’est +50% en 3-4 ans. Dès que vous faites appel à un artisan pour la moindre broutille, non seulement vous avez toutes les chances d’attendre des semaines, mais en plus l’addition atteint vite un demi-SMIC mensuel pour une demi-journée de travail.

Donc ça me fait une belle jambe de savoir que le prix des grille-pains chinois ou des croquettes KFC sont sous la cible de 2% par an ! Mais ce n’est pas du tout le monde dans lequel je vis !

Si on se base sur le budget d’un jeune couple en France qui souhaite devenir propriétaire dans un bassin d’emploi, l’inflation ces récentes années est phénoménale, et en grande partie causée par l’action des banques centrales qui a écrasé les taux longs.

Alors c’est sûr que si [l’immobilier pour se loger dans les bassins d’emploi, ou les services comme les artisans, la mutuelle…] ne sont pas pris en compte dans le calcul de l’inflation qui est "ciblée", on peut continuer les politiques quantitatives encore longtemps, avec un large satisfecit.

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#942 24/05/2021 12h53

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LieKolchin a écrit :

Scipion8 a écrit :

C’est précisément pour cela qu’un système libéral est plus efficace qu’un système subventionné : il valorise l’initiative, le travail, le mérite, l’intelligence.

Je suis avec intérêt vos interventions, qui m’apprennent souvent beaucoup, mais ce point particulier m’interpelle.

Vous me donnez l’impression d’avoir oublié de citer la cupidité dans votre liste, qui me paraît pourtant détenir une place de premier plan.
Je ne suis par ailleurs pas certain d’avoir la même définition du mérite et de l’intelligence que vous, ce pourrait être un débat intéressant peut être, mais sans doute polémique et je ne tiens pas à faire dévier la discussion sur votre file.

Le problème me semble venir du fait que Scipion dit « est » quand il faudrait dire « me semble ».

Ce qui me semble est qu’il oublie le principe de subsidiarité et donc de décentralisation des décisions économiques et politiques jusqu’au plus bas niveau où il est possible de les décentraliser pour expliquer les avantages pratiques du libéralisme. Il me semble aussi que nous ne sommes pas vraiment dans cette épure (car le principe de subsidiarité se heurte au fait qu’il y a des économies d’échelle), les monceaux de dette publique qui s’accumulent devraient, si la théorie standard marche, provoquer des révisions déchirantes.

Je suis tombé sur une des formes que ces révisions déchirantes pourraient prendre Interview de Stéphanie Kelton. Je n’ai pas assez travaillé pour voir ce qui cloche là dedans. Les théories macroéconomiques (ou macro-sociologiques si je puis me permettre un néologisme) ne sont pas comme les théories mathématiques, il semble toujours possible de les prendre en défaut si on regarde pendant assez longtemps leurs effets quand elles sont appliquées et que c’est ainsi qu’on s’aperçoit comment elles sont fausses. Or, ce keynesianisme sous stéroïdes n’a été testé nulle part.

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1    #943 24/05/2021 13h28

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Le rôle des banques centrales me fait penser à celui de la banque au monopoly. On arrive en fin de partie, il est important que les acteurs continuent à jouer en leur donnant un peu d’argent à chaque tour mais au final, ce sont toujours les mêmes qui ramassent la mise.
Comment finit la partie : en général, un des joueurs renverse la table.

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#944 25/05/2021 00h45

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Scipion8 a écrit :

Vous voyez bien, sur la base de votre exemple personnel, qu’il n’y a nul besoin d’être "riche" pour tirer avantage de la politique monétaire très accommodante dans le contexte de la pandémie !

Bien au contraire : je suis riche. Mon ménage a 36k de revenus annuel par unité de consommation, ce qui est proche du double de la médiane nationale.
Quel aide-soignante, quel livreur aurait pu faire ce que j’ai fait ? J’y suis parvenu grâce à de l’épargne accumulée + un prêt que l’on n’accorde pas à tout le monde. Ma prise de risque ou mon habileté est relativement accessoire.
J’ai récolté une petite partie de la production de la planche à billets et fais ce que l’Etat ne fais pas assez : je redistribue mes plus-values à des personnes qui en ont davantage besoin et les méritent davantage que moi, et soutiens des projets environnementaux non rentables. à 60 ans je me débarrasserai de tout excepté ma RP, et j’aurai encore bien trop avec ma retraite, que je n’attendrai donc pas de toucher pour me consacrer à des tâches plus terre à terre.

Heureux de constater que vous n’êtes pas contre une réforme de la fiscalité du patrimoine, voire pour la monnaie fondante de Gesell, idée déjà mise en pratique par certaines cryptos. Faire fondre les tas d’or des dragons, mon rêve !

Surpris en revanche par votre argumentaire sur une stabilité des inégalités de patrimoine : les chiffres de l’Insee sont trop anciens, attendez 2 ans pour avoir les résultats 2021 et je mets ma main au feu que l’on verra une forte hausse suite à l’augmentation stratosphérique du prix des actifs patrimoniaux depuis un an. Je rejoins aussi l’argument de Doubletrouble sur les insuffisances d’un indice pour résumer les inégalités de patrimoine.

InvestisseurHeureux a écrit :

Si on se base sur le budget d’un jeune couple en France qui souhaite devenir propriétaire dans un bassin d’emploi, l’inflation ces récentes années est phénoménale, et en grande partie causée par l’action des banques centrales qui a écrasé les taux longs.

Exactement, et c’est aussi un facteur d’augmentation des inégalités. Impossible dans ces conditions pour un smicard dont le salaire n’augmente pas d’acquérir du patrimoine dont le prix a augmenté et de devenir propriétaire. A quoi bon un crédit taux 0 si le montant maximum empruntable ne vaut pas la moitié d’un T3 ?

Concernant le taux d’intérêt "naturel" : R. Solow, M. Allais, E. Phelps, etc, nous enseignent qu’il est égal à la croissance potentielle de l’économie.
Cette croissance potentielle dépend notamment de l’évolution de la productivité et de la population active (on sait que cette dernière se stabilise).
Un taux d’intérêt inférieur à la croissance est inflationniste mais permet théoriquement de lutter contre le chômage.
Ceux qui croient dans des gains de productivité élevés ne devraient donc pas croire en des taux bas avec une inflation basse, sauf à oublier les actifs patrimoniaux dans l’inflation, ou à oublier de soustraire la dette de la production apparente.

Bref, nos opinions ne comptent guère. C’est ce que pensent les marchés qui importe. Ils pensent que les bénéfices vont croître davantage que les taux, que l’inflation et que n’importe quoi d’autre. On est à 2 x l’écart-type au-dessus des valo historiques. Les croyances des marchés étant volatiles, cela changera tôt ou tard…


« Celui qui croit en une croissance exponentielle dans un monde fini est fou, ou économiste. »

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#945 25/05/2021 08h44

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Ce qui limite l’expansion des inégalités en France est le niveau élevé de la redistribution explicite, celle qui est mesurée par l’Insee et d’une forme implicite de redistribution, par exemple par la politique du logement (ça nécessite explication mais ce n’est pas le lieu),  qui me semble être une spécificité française.

On verra bien ce que dira la prochaine livraison de l’Insee au sujet de l’ évolution du Gini mais je ne parierais pas sur son explosion. L’aplatissement de l’ échelle des salaires le fait diminuer mais pas les plus-values virtuelles sur les actifs.

Il est vrai qu’un unique indicateur numérique ne permet pas de représenter adéquatement un phénomène complexe mais ça dit quand même des choses. Il faudrait au moins un indice de type Gini sur les patrimoines. La "richesse" d’un menage me semble toutefois mieux représentée par le couple (niveau de vie par UC, patrimoine par adulte) que par toute autre variable statistique.  Or la loi jointe d’un couple renferme beaucoup plus d’informations que les deux lois marginales.

La nouveauté est le retour du big governement aux USA qui indique peut-être une inflexion redistributive de leur système socio-économique (qui ne parviendra toutefois pas de sitôt au niveau de redistribution français).

Il reste que si des idées non orthodoxes comme la MMT etaient appliquées (*) ca changerait le rendement réel long terme des classes d’actifs.

Il y a d’autres types de politique économique possibles, cela dit.

(*) Je ne pense pas que l’administration démocrate actuelle le fera mais ils sont beaucoup moins timorés que je ne le supposais en matière budgétaire et fiscale.

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1    #946 25/05/2021 09h50

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@Caratheodory : Regardez la courbe de Lorenz du patrimoine, elle est beaucoup moins "plate" que celle des revenus :

Courbe de Lorenz ? Wikipédia

Mais je crois que vouloir estimer le succès d’une société à la relative égalité des revenus et/ou du patrimoine est en soit un point de vue très discutable. Personnellement, et j’en veux pour preuve la Chine, je crois que les masses sont beaucoup plus sensibles à la mobilité sociale qu’à l’égalité. Et comme pour tendre vers une égalité de résultats forcément artificielle, on est obligé d’empiler des règlementations et des taxes, je crois que les deux sont antinomiques. Certaines sociétés parviennent à équilibrer les deux (on brandit souvent l’exemple problématique du Danemark*) mais ce n’est clairement pas le cas de la France. Avec ses castes, ses ordres et ses professions réglementées, et même ses sociétés secrètes (plus de 150000 francs maçons), elle a gardé un côté presque médiéval de ce point de vue.

Evidemment Scipion8 pourra se donner en exemple (de l’Aveyron à Washington), mais il est important de noter qu’il a dû accepter pour cela de se conformer à un long parcours très spécifique et balisé (grandes écoles). C’est très différent de la mobilité "à la sueur de son front", que l’on a connu pendant les 30 glorieuses et que vivent encore beaucoup de Chinois provinciaux - où le poseur de briques se reconvertit en vendeur de brochettes devant les chantiers, puis ouvre une petite échoppe, puis accède à la propriété en ville, et peut payer l’université à son fils. La mobilité "initiatique" des études supérieures exclut de fait beaucoup de profils et crée des castes (copains de promo, idéologie partagée), tandis que la mobilité "à la sueur de son front" est ouverte à tous et de par son côté anarchique, moins conductrice à l’émergence de cercles fermés. Au contraire, s’entraider est souvent requis pour continuer à monter. La mobilité via l’école, en revanche, n’incite pas à la collaboration et au partage puisque c’est intrinsèquement une compétition - et c’est donc assez naturellement que ceux qui ont suivi ce parcours auront envie de retirer l’échelle derrière eux, ou tout du moins de mettre en place des gardes-barrières.†

Le point clé, c’est que dans un cas le succès est autorisé, dans l’autre c’est un fait accompli.

* Phébé - Non, le Danemark n’est pas le paradis de la mobilité sociale - Phebe | Le Point

Gatekeeping ? Wikipédia

Dernière modification par doubletrouble (25/05/2021 10h07)


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#947 25/05/2021 10h23

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InvestisseurHeureux, le 24/05/2021 a écrit :

Scipion8, le 23/05/2021 a écrit :

Ce risque inflationniste plus prononcé aux USA qu’en Europe se retrouve dans les anticipations d’inflation de long-terme du marché : désormais supérieures à la cible de 2% de la Fed aux USA, et inférieures à celle de la BCE en zone euro.

Scipion,

J’ai quand même du mal à comprendre à quoi fait-on allusion chaque fois que l’on parle de cible d’inflation par la BCE ou la FED ?

Déjà, parle-t-on de la même inflation dans les deux cas ? Parce que s’il s’agit des prix à la consommation, on peut bien cibler tout ce que l’on veut, je cherche encore l’intérêt dans le monde [occidental] d’aujourd’hui, très orienté services.

Dans mon coin, l’immobilier c’est +50% en 3-4 ans. Dès que vous faites appel à un artisan pour la moindre broutille, non seulement vous avez toutes les chances d’attendre des semaines, mais en plus l’addition atteint vite un demi-SMIC mensuel pour une demi-journée de travail.

Donc ça me fait une belle jambe de savoir que le prix des grille-pains chinois ou des croquettes KFC sont sous la cible de 2% par an ! Mais ce n’est pas du tout le monde dans lequel je vis !

Si on se base sur le budget d’un jeune couple en France qui souhaite devenir propriétaire dans un bassin d’emploi, l’inflation ces récentes années est phénoménale, et en grande partie causée par l’action des banques centrales qui a écrasé les taux longs.

Alors c’est sûr que si [l’immobilier pour se loger dans les bassins d’emploi, ou les services comme les artisans, la mutuelle…] ne sont pas pris en compte dans le calcul de l’inflation qui est "ciblée", on peut continuer les politiques quantitatives encore longtemps, avec un large satisfecit.

Pour ce que j’en ai lu (mais je ne suis pas économiste donc je peut me tromper…), l’inflation mesurée comporte bien le prix des services des artisans (dans des lignes séparées: électriciens, plombiers, services de maintenance de chauffage etc. etc.). Et aussi des loyers. Et également de tout un panier (très complet) de services, de produits de base ou plus élaborés, de transport, d’éducation etc. (liste complète disponible ici- où des liens existent pour télécharger la liste complète des produits et services couverts, catégorie par catégorie et pays par pays). Au total, je compte 891 catégories différentes de produits et de services…au sein desquelles je n’ai pas trouvé les croquettes KFC smile

Votre perception d’une hausse des prix supérieure à celle mesurée n’est pas étonnante : cf. la notion d’inflation perçue, très bien expliquée sur le site de la BCE : inflation perçue. D’ailleurs, vous soulignez résider dans un coin où l’immobilier a pris +50% en quelques années. Ce qui n’est pas non plus courant et ne doit pas aider à se faire une idée objective de l’inflation moyenne (venez par chez moi, les hausses de l’immobilier sont bien plus modérées, quand elles ne sont pas négatives…).

Après, on sera bien d’accord : devenir propriétaire dans paris intra-muros ou avec vue sur mer à Nice n’est pas à la portée du premier venu. Cela étant, ce n’est pas nécessairement une aspiration partagée par tous.

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3    #948 25/05/2021 10h44

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En lisant les derniers messages je pense toute suite au paradoxe de Tocqueville: Paradoxe de l’insatisfaction croissante.

Je me demande donc s’il existe bien ce paradoxe.

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#949 25/05/2021 10h47

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Pour la petite histoire, concernant l’inflation perçue,  on pourra noter que le tarif de l’essence est d’ailleurs pratiquement revenue au niveau de celui du début de la crise des gilets jaunes (automne 2018).


CARBU.COM - Evolution  des prix moyens des carburants en France

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1    #950 25/05/2021 12h18

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Des plus cultivés que moi sauront sans doute mieux parler de l’inflation ’réelle’ vs ’perçue’. Ce que je constate à un niveau (très) micro économique c’est que pour ma part :

- L’immobilier n’a jamais étant autant accessible que depuis 5-10 ans. Pour moi, le coût du crédit a été divisé par plus de trois en 10 ans et les prix ont stagné (plus récemment, très modérément progressé)

- Je trouve plus qu’avant des produits alimentaires de très grande qualité, à des prix raisonnables (voire moins chers qu’avant) = via la multiplication des marchés locaux et circuits (très) courts

- J’ai le sentiment que mon informatique domestique est (relativement) bien meilleur marché qu’il y a 10 ans (avec des performances largement supérieures)

- Faire intervenir de bons artisans chez moi : il fallait que je me coupe un bras dans le temps ; il faut toujours que je me coupe un bras.

- Mon forfait mobile n’a pas bougé d’un iota depuis 10 ans : 19,99€ TTC par mois.

- Ma mutuelle augmente année après année, comme contrat d’entretien chaudière, assurances etc.

Mon inflation perçue = peut être en hausse sensible. Suis-je représentatif? Sans doute pas. je vis en Province, dans une ville pas bien riche et (fait aggravant) je n’utilise que très peu ma voiture (donc peu impacté par le prix des carburants). Quelqu’un résidant dans une ville à la mode ou à Paris intra-muros et qui s’équipe de matériels derniers cris (ou qui a besoin de circuler en voiture tous les jours) aura sans doute une autre perception.

Ma conclusion : le ’mon pauvre Monsieur, tout augmente’ est forcément basé sur un ressenti, lui même forcément très dépendant de conditions micro-locales et individuelles.

Que la BCE m’explique que les prix n’augmentent qu’assez peu ne me choque pas outre mesure. Et que l’idée selon laquelle le panier de produits et de services utilisé pour le calcul serait déconnecté de la vie réelle relève apparemment de la légende urbaine (cf. mon post ci-dessus ; mais, à nouveau, je peut me tromper…).

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