REVUE DU S&P500 01/12/2022
(EN PRINCIPE, JE RÉDIGE CETTE REVUE TOUTES LES 3 SEMAINES)
PREAMBULE
Ce qui est exposé ci-après représente une "mise à plat" de mes réflexions concernant le marché boursier US. Je ne prétends absolument pas déterminer l’orientation du marché et, d’ailleurs, pour mes propres opérations boursières, je peux parfois prendre le contrepied de ce qui est présenté ci-dessous.
La principale utilité de ce travail est de poser des garde-fous qui m’éviteraient de prendre des décisions trop radicales en nuançant la vision que pourrait avoir l’indécrottable bull que je suis depuis toujours.
Enfin, je rappelle que je suis un investisseur "value" qui, s’il trouve des opportunités, les achètera quelles que soient les conditions de marché. Je ne peux plus pratiquer le DCA car l’épargne sur mes revenus professionnelles est devenue symbolique par rapport à la taille de mon patrimoine. Des investissements réguliers n’ont plus beaucoup d’impact pour permettre de "moyenner". De là découle mon obligation de tenter de "timer" un tant soit peu le marché.
Je commence par les conclusions afin de faciliter la lecture, le détail et les explications se trouvent à la suite.
EN RESUME
Tendance de marché : bearish
Récession : légèrement bearish (anciennement "très légèrement bearish")
Valorisation du marché : bearish
Sentiment du marché : neutre
Sentiment des analystes : légèrement bearish
Bilan de la Fed : bearish
Smart Money : légèrement bearish
Comme on pourra le lire ci-dessous, plusieurs éléments envoient des signaux contradictoires par rapport à la tenue du marché : les marchés obligataires, le marché du pétrole et le marché des options anticipent tous les 3 un ralentissement économique qui ne se reflète absolument pas dans le marché des actions. Pour moi, ces contradictions sont un appel à la prudence.
I. TENDANCE DU MARCHE
A partir de ce mois, j’utilise 2 outils pour déterminer si nous sommes en marché haussier ou baissier.
1. le placement des moyennes mobiles à 50 et à 200 jours
Quand la MM50 se situe au-dessus de la MM200, nous sommes en marché haussier. Quand elle se situe en dessous, nous sommes en marché baissier. Ca ne signifie pas que j’achète ou je vends en fonction de ce critère, ça signifie juste qu’il faut éviter de prendre des positions franches contre la tendance. Ce qui n’empêche pas de se montrer raisonnablement contrarian comme en mars 2002 ou en novembre 2008.
Aujourd’hui, la MM50 se situe sous la MM200. De mon point de vue, nous sommes toujours en marché baissier. (inchangé par rapport au 10/11/2022)
2. L’indicateur On Balance Volume
L’OBV reflète le volume des transactions et l’influence qu’exerce le volume sur les prix, à la hausse à la baisse. Il permet donc de vérifier si la tendance des cours est confirmée par des volumes ou non.
Pour le moment, l’OBV est en tendance baissière et ne confirme pas la hausse du S&P500
II. RECESSION ?
1. Courbe des taux 2 ans et 10 ans : déjà fréquemment abordé. Je ne détaille plus si ce n’est que c’est cet évènement qui me fait anticiper une récession dont j’avais "timé" le début dans une fourchette allant du 01/10/2022 au 05/01/2024.
2. Courbe des taux 3 mois et 10 ans : Ici l’inversion a eu lieu brièvement le 18/10 et durablement depuis le 25/10. Historiquement, j’ai constaté qu’une récession se produisait entre 8 et 14 mois après ce phénomène. Ce qui ferait théoriquement démarrer la récession entre le 18 juin 2023 et le 25 mars 2024.
==> la période possible de récession, si récession il y a, se situerait donc dans la fourchette commune aux 2 périodes d’inversion des taux, soit entre le 18/06/2023 et le 05/01/2024.
3. Demandes initiales de chômage : Si on excepte la récession et le chômage de mars 2020 volontairement créés par les pouvoirs publics, on constate que les récessions commencent toujours APRES que les demandes initiales de chômage aient commencé à augmenter.
Après une hausse relativement importante le 2Q2022, nous avons connu une décroissance à partir du 16/07. Depuis un point bas le 24/09, la tendance (lente) à la hausse semble avoir repris.
4. Total des heures travaillées : chaque récession depuis 60 ans a débuté avec une diminution des heures totales travaillées aux US. Si la courbe tend à ralentir sa hausse, elle n’en demeure pas moins en hausse à des niveaux très élevés.
5. Heures prestées en travail intérimaire
Lors des derniers marchés baissiers, la courbe des heures prestées en intérim prenait une tendance baissière quand le marché était toujours haussier et elle a permis d’anticiper les bears markets. La tendance reste fermement haussière.
6. Truck Tonnage Index : j’ajoute cet indicateur en raison de sa corrélation passée avec le S&P500. Aujourd’hui, la divergence entre l’indice boursier et l’indice "camions" reste importante. Après avoir connu une hausse presqu’ininterrompue depuis août 2021, le "TTI" connait une baisse de 2,3 % à fin octobre.
7. ISM "New Orders" : un nouvel indicateur que j’inclus dans ma liste de suivi : l’ISM Nouvelles commandes. Il s’agit d’une des composantes du célèbre ISM Manufacturier.
Si l’ISM manufacturier représente, en lui-même, un indicateur avancé de l’activité économique permettant, souvent, d’anticiper les récessions, l’ISM "new orders" est, quant à lui, un indicateur avancé … de l’indicateur avancé. Il permet d’anticiper la tendance de l’ISM Manufacturier.
Sur le graphique ci-dessous, j’ai repris la moyenne à 4 mois de l’ISM new orders (pour éviter les faux signaux qu’un indicateur passant brièvement sous les 50 pourrait envoyer).
Et c’est assez troublant : chaque fois que la moyenne à 4 mois est passée sous le seuil des 50, ce fut un bon timing pour vendre.
8. ISM Manufacturier : C’est l’indicateur avancé de la santé économique. Un ISM sous 50 traduit une contraction économique. Il est en diminution constante et se situe à 50,2.
9. Baltic Dry Index : il mesure le coût de transport par bateau dans le monde entier. On constate qu’il est en tendance baissière depuis une bonne année.
10. Confiance du consommateur : on constate que chaque récession a été précédée d’une perte de confiance du consommateur américain. Cet indicateur est en tendance baissière depuis la période "pré covid" (ce qui démontre, une fois de plus, le caractère "bullesque" de la hausse de 2021). Néanoins, il est en fort rebond ces 2 derniers mois.
11. Case shiller index : l’économie américaine est dépendante du consommateur mais aussi de son marché immobilier (lui aussi en situation bullesque en 2021). Les prix ont commencé à prendre une courbe descendante (données arrêtées à fin août)
12. Pouvoir d’achat immobilier des ménages américains : le graphique présente un historique un peu court mais il confirme que le pouvoir d’achat immobilier des ménages a baissé de plus de 40 % depuis les plus haut. En toute logique, les prix devraient, eux aussi, baisser dans la même proportion.
III. VALORISATION DU MARCHE AMERICAIN
1. Price to book : 4,06
Repères :
Moyenne 2000-2022 : 2,95
Plus bas crise covid (mars 2020) : 2,92
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 1,85
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 1,78
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 2.43
2. PER de Shiller : 29,81
Repères :
Moyenne 2000-2022 : 26,99
Plus bas crise covid (mars 2020) : 24,82
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 19,70
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 13,32
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 21,96
Plus bas 1ere guerre du golf (octobre 1990) : 14,82
Plus bas « choc Volker » (aout 1982): 6,64
Plus bas stagflation année 70 et choc pétrolier (décembre 1974) : 8,29
3. Prime de risque (per de Shiller inversé – taux des t-bond 10 y) : -0,33 %
La prime de risque est négative au plus bas depuis octobre 2007. Le marché donne l’impression de penser que la hausse des taux longs n’est pas durable. Ce qui est possible si les US devaient rentrer en récession dans les 12 mois qui viennent.
Repères :
Moyenne 2000-2022 : 0,70 %
Plus bas crise covid (mars 2020) : 3,20 %
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 2,12 %
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 1,78 %
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 0,61 %
4. "Buffet Indicator" ( corrigé pour tenir compte des remarques de Fallout)
(capitalisation boursière US - bilan Fed / PIB) : 124 %
Repères :
Plus bas crise covid (mars 2020) : 95.8 %
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 57.7 %
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 37.5 %
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 64.5 %
Début du grand bull market 1982-2000 (août 1982) : 31,16 %
Conclusions : Les valorisations générales sont à nouveau en hausse. Nous nous trouvons largement au-dessus des moyennes et l’indice ne price certainement pas une récession mais, au contraire, envisage une belle croissance économique combinée à une période de taux bas. Ce qui est plutôt contradictoire avec le marché des TIPS à 10 ans qui, quant à lui, anticipe une croissance économique (molle) de 1,34 % et une inflation moyenne (raisonnable) de 2,34 % pour les 10 prochaines années.
IV. PSYCHOLOGIE DES INVESTISSEURS
1. Ratio S&P500/WTI : 49.31
L’économie est de l’énergie transformée, quand le pétrole est cher (la courbe brune vers le bas) par rapport aux actions, on anticipe un ralentissement futur et donc le marché n’est pas trop euphorique. Pour le moment, le niveau du ratio est relativement élevé et il vient de quitter son canal descendant. La bourse et le pétrole envoient donc des signaux contradictoires et la "zénitude" semble toujours présente.
Moyenne 2000-2022 : 34,47
Plus bas crise covid (mars 2020) : 86,95
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 14,90
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 17,57
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 26,77
Plus bas marché baissier actuel (28/06): 34,22
2. Ratio S&P500/Gold : 2,24
Quand l’or est chère, les investisseurs ont peur et privilégie la sécurité. Le marché n’est alors pas trop euphorique. Le ratio reste proche de sa moyenne historique n’indiquant ni crainte de l’avenir, ni confiance aveugle pour le futur.
Repères
Moyenne 2000-2022 : 2,11
Plus bas crise covid (mars 2020) : 1,62
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 0,68
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 0,75
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 2,52
Plus bas marché baissier actuel (16/06) : 1,98
3. Ratio S&P500/consummer staples (comparaison de l’évolution du S&P500 avec le secteur le plus défensif de la quote, le secteur des produits de consommation de base (parmi les poids lourds de ce secteur, on trouve Procter and Gamble, Coca Cola, Pepsico, Walmart, Costco, Philip Morris, …) : 5,28
Repères
Moyenne 1998-2022 : 4,78
Plus bas crise covid (mars 2020) : 5,06
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 4,03
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 3,54
Plus bas éclatement bulle internet (septembre 2002) : 4,13
Plus bas marché baissier actuel (16/05) : 5,17
4. Ratio junk bonds/obligations sans risque (attrait du risque) : 0,90
Si le niveau de "confiance" reste élevé, on constate que le marché obligataire ne nous envoit pas le même message que le marché actions puisque les obligations sans risque surperforment les obligations risquées ces derniers jours.
Repères :
Moyenne 2007-2022 : 0,97
Plus bas crise covid (mars 2020) : 0,51
Plus bas crise de l’euro (août 2011) : 0,86
Plus bas crise des subprimes (mars 2009) : 0,75
Plus bas marché baissier actuel (04/03) : 0,73
5. EPCR 5 jours (mesure le rapport entre les options put et les options call) : 0,83
Plus haut atteint depuis le début de ce marché baissier (22/11) : 0,96
Un 2e"pic" a été atteint le 22/11 indiquant une inquiétude certaine du marché. Depuis, la courbe de la peur a repris un canal descendant. Le marché des options donne un signal contradictoire par rapport au marché d’actions, donnant l’impression que, malgré la hausse des cours, les intervenants de marché sont "blindés" d’options put.
Repères :
Plus haut crise de l’euro : 0.93
Plus haut crise du covid : 1.05
Marché baissier 2008-2009 :
Pic le 22/01/08 : 0,93
Pic 17/03/09 : 1.01
Pic 16/07/08 : 0.91
Pic 17/09/08 : 0.97
Pic 10/10/08 : 0.98
Pic 21/11/08 : 1.01
Pic 16/01/09 : 0.95
Pic 23/02/09 : 0.88
Pic 06/03/09 : 0.84
6. Vix : 20,55
Plus haut atteint depuis le début de ce marché baissier (07/03) : 36,45
Retour du marché dans la zone "zen" …
Repères :
Plus haut crise covid (mars 2020) : 66,04
Plus haut crise de l’euro (août 2011) : 43,05
Plus haut crise des subprimes (novembre 2008) : 79,13
Plus haut éclatement bulle internet (septembre 2002) : 42,66
7. Pourcentage d’actions dont le cours se situe au-dessus de sa moyenne mobile à 200 jours : 48,26 %
Plus bas atteint au cours de ce marché baissier : 15,57 % (le 16/06)
Repères :
Plus bas crise du covid : 10,2 %
Plus bas crise de l’euro : 14,9 %
Plus bas crise des subprimes : 7,1 %
Plus bas éclatement bulle internet : 25,2 %
Plus bas atteint depuis le début de ce marché baissier : 18 %
Conclusions : en ce début novembre, le marché semble relativement serein. On constate très peu de signes de stress …
V. Optimisme des analystes et normalité des résultats des entreprises
1. Prévision des bénéfices (yardeni.com)
Les prévisions des analystes conservent leur trend baissier même si elles n’anticipent toujours pas une baisse des profits
2. Bénéfices prévus et réalisés, écart par rapport à la moyenne
Les bénéfices du S&P500 réalisés jusque 2021 et prévus en 2022 et 2023. Manifestement, depuis
2021, ils prennent un courbe qui s’écarte de manière exponentiel de leur moyenne.
Néanmoins, comme je l’avais exprimé lors des revues précédentes, ces prévisions ne me semblaient pas réalistes et, au cours de ces 2 derniers mois, elles ont ont été revues à la baisse, ce qui a mécaniquement réduit l’écart par rapport à la moyenne et les projections commencent à devenir un peu moins déraisonnables.
VI. LIQUIDITES
Le QT se poursuit.
VII. SMART MONEY
Les insiders (CEO, CFO et actionnaires de + de 10 % de sociétés cotées) sont réputés anticiper les cycles boursiers. Ils sont toujours attentistes …