@ Franck et Jérôme en particulier: vraiment merci à tous les deux de nous avoir partagé vos idées et vos travaux d’analyse. Tout cela est bien précieux !
J’ai essayé de me faire une opinion donc je vous partage ma démarche.
1)Capitalisation actuelle versus capitaux propres : comme déjà relevé, difficile de trancher en raison des dotations aux amortissements des films et droits qui contribuent à décorréler la valeur réelle des actifs du niveau des capitaux propres.
2) EV/EBITDA : vu le montant et la durée de la créance Pathé, je rajoute les 190m € de la vente des salles restant à percevoir à l’EV (utile peut-être ici de rappeler que l’actionnaire fait crédit à Pathé sur 3 ans) . Donc, lorsque je refais le calcul de JL ici, je suis plutôt à (146+190) /120 = 2.8.
Qu’en déduire ? Je regarde les FCF en prenant pour proxy les flux nets générés par l’activité - les acquisitions d’immos - dividendes des sociétés MEQ (pour rester sur le périmètre actuel).
Juin 2017:58.3- 51.3- 0 = 7m (x2 = 14m)
CA: 56.8 (x2 = 113.6m)
2016: 131.9 - 103.9 - 10.5= 17.5m
CA :188.7
2015: 172 - 160 - 9 = 3m
CA : 217
2014: 142.7 - 127.4- 6.3= 9m
CA: 190
2013: 101.5 - 129.8 - 7.6= -35.9m
CA:169
2012: 61.2 - 85.4 - 9.7= -33.9m
CA:105
Même si les FCF s’améliorent dans le temps, le seul vrai pic est à 9% du CA en 2016. Et cela redescend à 5.4% en juin 2017.
3) Rien de transcendant donc mais à lire les contributions des uns et des autres, on comprend que le cash est réinvesti en moyenne sur les 4 dernières années à hauteur de 120m par an en acquisition d’immos, avec 80% de cette somme investie comme suit en 2016:
-fictions télévisuelles en cours de prod (44%);
-films et droits ciné (22%);
-films et séries d’animation en cours de prod (14%).
Sur cette répartition, le diagramme page 34 du document de référence 2016 est éclairant: il montre que plus de la moitié de cette somme est investie dans les séries télévisuelles américaines.
Il serait intéressant de :
-s’intéresser au retour sur investissement dégagé par ces séries télévisuelles américaines
Visiblement, pas d’autre vue analytique de rentabilité que celle détaillée plus bas sur le résultat opérationnel. Tout juste rentables hors coûts de structure, donc pas. Pas vu de suivi par saison pour Narcos par exemple … ;
-voir combien et quelles séries sont concernées
Saison 2 de F is for Family mise en ligne fin mai 2017 + Saison 3 de Narcos à suivre en septembre 2017 ;
-savoir sur quel canal elles sont diffusées
A priori, que Netflix et pas de chaine TV.
Et contrairement à ce que j’ai pu lire, ces investissements ne font pas progresser le CA non stop , regardez 2016 (-13%) et juin 2017 (-25%).
4) Ci-dessous, une synthèse du rapport semestriel 2017.
Évolution du CA sur le S1 2017:
# production et distribution d’œuvres cinématographiques pour +40.8M
fait -24.5M ou -37%, avec dans le détail:
* droits de diffusion aux chaînes de tv françaises pour +7,8M font -13.7 M ou -64% (pas de prévente versus 7.8M avec les visiteurs en juin 2016)
--> effet de base : excellente année 2016 avec les chaînes historiques qui sont passées de 71 à 38% des ventes
-->mais les ventes de catalogue aux autres chaînes TNT progressent,qui sont passées de 24 à 55% des ventes
* - distribution en salle pour 11,6M fait -10M: toujours sur 7 films mais qui ont fait 43% d’entrée en moins
* ventes de droits à l’international pour +12,9M, font -2.6M ou -17%
* autres produits d’exploitations des films quasi stables
* ventes de vidéos et vod pour+6,3M font +28% ou +1.4M
# fictions et séries d’animation TV pour 13.3M, font +5.6M ou +72%.
*+9M ou 225% pour les US
*-3.9M ou -92% pour la France
#redevance de marque et produits stable versés par LCGP à 1.8M.
--> En synthèse, la progression avec Netflix aux USA (+9M) ne compense pas encore les pertes de revenus (-13.7M) auprès des chaînes traditionnelles, dont la contribution s’effrite au profit des chaînes de la TNT.
Évolution du résultat opérationnel sur le S1 2017
Sur le S1 2017, hors PV sur cession de participation dans LCGP, on est à -9.7M versus +7.2M en 2016, soit une regression de 17M, qui s’explique par:
-12M sur la production et la distribution (-61%)
*dont -10.6M en exploitation de films de long métrage , après inclusion de la quote-part du RN de LGM
*dont -1.3 M pour les séries d’animation et de fiction tv AVEC :
-un profit de 0.4M pour les prods US
-une perte de 1.6M pour les prods françaises
-4.4M d’augmentation des frais de structures malgré une baisse de CA de 25% (coûts de rénovation de d’immeuble des Champs-Élysées inclus ? )
-0.6M sur l’exploitation de salles (-5%)
--> En synthèse, c’est la cata sur les longs metrages suite à une baisse importante du CA.
Et comme attendu, suite à la baisse du CA sur la prod de séries françaises, on serre les dents pour atteindre tout juste l’équilibre (mais hors frais de structure) avec les séries US
On pourrait d’ailleurs se dire que les rats (actionnaires ayant apporté à l’OPA) ont fui le navire avant des changements structurants (érosion du business avec les chaînes traditionnelles et développement avec les plateformes US) et une mauvaise fréquentation sur les long-metrages. Le tout, histoire de pas régaler le train de vie des artistes qui augmente !
A checker toutefois: cette augmentation du train de vie provient-elle de la renovation envisagée sur l’immeuble des Champs-Élysées ? Ceux qui me lisent ont peut-être vu des travaux ?
5)Voici les questions que je me posais avant de me plonger dans le semestriel. J’ai rajouté les éléments de réponse que j’ai trouvés en italique.
- s’agit-il d’un changement de modèle pour monter en puissance avec Netflix via leur partenariat sur 7 ans? Peu voir aucun élément sur les caractéristiques financières du partenariat avec cette plateforme ou les autres. Inutile de s’emballer fissa, les séries sont tout juste rentables aux us , hors coûts de structure, donc pas.
- le cas échéant, quelle est la valeur résiduelle d’un catalogue historique déjà diffusé par Netflix pendant 7 ans ?Toujours pas d’idée arrêtée
-comment les chaînes de télévision qui assurent l’essentiel du financement du cinéma (cf. p 4 du PV AG 16/5/16) pourraient-elles réagir à ce partenariat et quels sont les effets possibles sur la rentabilité future de Gaumont ? Difficile de savoir s’il y a un impact «coup de gueule» anti Netflix. Toutefois, ca serre les dents sur les séries francaises, en particulier avec les chaînes traditionnelles. Mais l’essentiel n’est sans doute pas là ! En terme d’eco-systeme, il faudrait comprendre les interactions avec les chaînes traditionnelles sur les long-métrage, qui impactent bien plus le compte de résultat . Y aurait-il ici des sachants ?
6)Pour revenir à la valorisation, on se pose la question de la valeur du catalogue et de sa mise en valeur ! A 97€ / action et en intégrant généreusement les 190m à suivre de pathé, on le paie :
302 (capi sur 3 119 723 actions )
+5.1 Dettes nettes à fin juin
+97 rachat de titres au 5/7/17
-190 à suivre de Pathé
= 214m.
Donc pour résumer , on a un catalogue et un savoir-faire à 214m pour :
-un FCF de 17.5 en 2016 quand cela dépote plutôt bien. Soit 8% de rendement sur l’EV payé;
-un FCF de 58.3-51.3= 7m à fin juin , transposé à 14m en année pleine. Soit du 6.5% sur l’EV payé.
Pour estimer les rendements, je ne déduis pas la valeur «cachée» des immeubles car ils sont bien portés au bilan. Mais cette valeur cachée est avérée, cf 4.2 page 19 du dernier rapport semestriel (restructuration et rénovation des immeubles sur les Champs-Elysées envisagées pour remise en location ultérieure & juste valeur reconnue non représentative).
Quand on met 214 d’EV sur la table,
- on porte une créance sur Pathé de 190m jusqu’en 2020 inclus en déduction de l’EV;
- on a aussi dans les actifs 100m d’immobilier, ce qui reviendrait finalement à ne payer le catalogue que 114m.
6) Au vu de ces éléments, ma conclusion provisoire sur ce dossier (qui m’incite à rester à l’écart) :
-je ne sais pas émettre une opinion sur la valeur du catalogue estimé dans le meilleur des cas à 114m aujourd’hui;
-je n’ai pas apprécié la solidité de Pathé pour honorer le paiement des 190m restant à percevoir jusqu’en 2020 suite à la vente de la participation dans LGCP;
-les rendements en terme de FCF / EV sur 2016 / mi 2017 à 8% puis 6.5% sont intéressants mais demandent à être confirmés dans le temps et au gré des cycles «artistiques»;
-mais surtout,
a) je ne connais pas les intentions du majoritaire sur la redistribution progressive de ce cash (aujourd’hui réinvesti mais dégagé espérons le demain) aux actionnaires;
b) sauf erreur, il pourrait se distribuer après une bonne année des dividendes en actions , arriver à 95% des votes et opérer un retrait (en ayant fait porté dans l’intervalle le risque de ses projets structurants aux minoritaires). Dans ce registre, je vous laisse apprécier d’ailleurs la réponse faite par le Président à la question posée par un actionnaire sur la vingtième résolution de l’AG du 16/5/2017 ;
c) faute d’avoir mis la main sur suffisamment d’éléments analytiques, je ne parviens pas à apprécier le retour sur investissement des 120m réinvestis annuellement (et donc par jeu de vase communiquant l’appréciation de la valeur du catalogue).
-Les fondamentaux du S1 2017 ne sont pas bons. Des virages stratégiques semblent se dessiner sans pour autant que nous puissions à ce stade mesurer leurs impacts. La rentabilité du business reste très dépendante du succès en terme de fréquentation des long-métrages.
Je m’excuse d’avance pour le caractère décousu du post, au vu des rajouts successifs au fil de mes recherches et avancées.
Heureux de partager dans la bienveillance avec ceux qui le souhaitent pour continuer à progresser … et pourquoi pas pour faire évoluer mon opinion.
Dernière modification par Bergamote (19/08/2017 08h18)