@Kabal : Je ne me plains pas : je constate. Comme vous et @gunday le relevez, avec la révolution industrielle nous avons peu à peu puis de plus en plus rapidement troqué une domination par des chefs de guerre, un clergé et des propriétaires terriens (aristocrates, riches marchands…) pour une domination par des financiers, des scientifiques et des communicants.
Peu importe l’époque, les pauvres mènent une existence peu enviable - ce n’est pas là mon sujet non plus.
Ce que je voulais exprimer, c’est que les mécanismes de domination et d’asservissement de nos nouveaux maîtres sont peut-être en apparence plus confortables mais aussi plus insidieux. Comme vous le soulignez @Kabal, auparavant c’est le nombre et la force physique des masses populaires dont on tirait profit : par la conscription, le vote, le labeur. En échange, on leur donnait un salaire le plus misérable possible, mais dans la même monnaie que celle utilisée par les puissants, qui collectée en nombre suffisant leur donnait à force les mêmes droits et opportunités. Nous avons d’ailleurs conservé ce schéma mental justement car la transition au nouveau modèle n’est pas achevée et qu’il reste des artefacts physiques de l’ancien, comme le cash, la voiture personnelle, les liens familiaux ou tribaux, qui s’y conforment mal.
Dans le nouveau modèle de domination, la monnaie n’est plus envisagée comme un stock mais comme un flux. Si l’on peut créer des trillions de dollars en appuyant sur la touche Enter, vous vous doutez bien que la devise n’est plus vraiment la monnaie qui a cours entre puissants. La monnaie véritable est devenue l’information, et c’est ce que l’on extrait des masses (dont le nombre et la force n’importe plus vraiment) et que l’on contrôle via les communicants. Femme, noir, pakistanais, vous oubliez queer ?, tout est fait pour vous isoler en tant qu’individu et que vous ne communiquiez pas ou mal avec les autres - en tant que noeud terminal dans un réseau. Votre accès "personnalisé" à la société reste certes modulé par l’argent aux niveaux les plus bas mais ce qui détermine votre rang, c’est l’information : celle à laquelle vous avez accès, son exactitude, la rapidité à laquelle vous y avez accès, celle que vous produisez ou modifiez, votre influence, qui se mesure par votre capacité à extraire et rediriger ces flux de devise sans autre valeur que symbolique. Votre existence physique a bien peu de poids si votre perception du monde et tout ce qui vous entoure obéit à des droits d’accès régis par ce réseau. C’est votre "double numérique" qui détermine tout.
Le problème c’est que dans ce modèle l’humain est inférieur en tout point aux machines. Ceux qui ne voudront pas subir une domination totale n’auront donc tôt ou tard d’autre choix que de "fusionner" d’une manière ou d’une autre avec celles-ci. Ou bien comme le dit @Iqce, se réfugier dans la physicalité et revenir à un mode de vie presque pré-industriel, si cela est toléré par la majorité. Le sauvage John de Huxley.
TL;DR : Préférez-vous vivre comme "bobonne" ou comme un noeud minant une shitcoin ? Personnellement je choisis "bobonne", je trouve plus de sens à repriser des chaussettes pour quelqu’un que j’aime que brûler mon énergie en guise de "proof of work" pour être payé par le réseau en shitcoins.
Dernière modification par doubletrouble (08/06/2021 11h53)
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